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Avis n° 2004-3 du 5 octobre 2004 sur le projet de décret modifiant les décrets n° 90-66 du 17 janvier 1990 et n° 2001-1332 du 28 décembre 2001 pris pour l'application des articles 27, 28, 33, 33-1, 70 et 71 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986

Médias
Culture et patrimoine
Industrie
Déposé le 4 octobre 2004 à 22h00, publié le 29 décembre 2004 à 23h00
Journal officiel

Texte

Saisi pour avis, en application des articles 27 et 33 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée relative à la liberté de communication, d'un projet de décret modifiant les décrets n° 90-66 du 17 janvier 1990 et n° 2001-1332 du 28 décembre 2001, le Conseil supérieur de l'audiovisuel, après en avoir délibéré, formule l'avis suivant, qui porte tant sur le projet de décret lui-même que sur d'autres dispositions du décret n° 90-66 dont il estime qu'elles pourraient être modifiées à cette occasion.

I. - Observations relatives aux dispositions
figurant dans le projet de décret



Le conseil relève que ce projet a pour objet, d'une part, de mettre les décrets précités en conformité avec la loi modifiée et, d'autre part, de tirer les conséquences de l'évolution des relations entre les éditeurs de services, notamment Canal +, et les représentants de l'industrie cinématographique.
Il note que les articles 2 et 5 du projet de décret créent, au sein des services de premières diffusions, une sous-catégorie de services de premières exclusivités qui se voient reconnaître, en contrepartie de l'effort particulier qu'ils consentent en matière de financement de l'industrie cinématographique, un assouplissement de la grille.
Le conseil se félicite de cet assouplissement, qui permettra une meilleure exposition du cinéma à la télévision.
Le conseil constate toutefois que le régime du cinéma repose, depuis de nombreuses années, sur des accords préalables avec les professionnels et que cette pratique a pour conséquence de rendre la réglementation de plus en plus complexe et de moins en moins lisible.
S'agissant du régime prévu par le projet de décret, le conseil note ainsi que la création, au sein des services de premières diffusions, de la sous-catégorie des services de premières exclusivités accroît encore la complexité du dispositif réglementaire.
Le conseil s'interroge, par ailleurs, sur la grille de diffusion d'oeuvres cinématographiques qui résulte du projet de décret, s'agissant du mercredi après-midi. En effet, celui-ci demeure interdit pour les services de cinéma de premières diffusions qui ne seraient pas de premières exclusivités, alors qu'il est autorisé pour tous les autres services de cinéma. Une ouverture généralisée à l'ensemble des services de cinéma lui semblerait justifiée.
Le CSA estime en outre que plusieurs améliorations pourraient être apportées au projet de décret.

Ainsi, ce projet soumet les chaînes de premières diffusions à deux types d'obligations, l'une figurant à l'article 6-2 du décret n° 90-66 (obligation de diffuser au moins soixante-quinze oeuvres cinématographiques en première exclusivité) et l'autre à l'article 12-1 (obligation de diffuser au moins vingt oeuvres cinématographiques d'expression originale française dont les droits ont été acquis avant la fin de la période de prises de vues). Il estime, pour une meilleure lisibilité, qu'il serait préférable que ces deux obligations soient rassemblées dans le même article, le respect cumulatif des deux obligations étant nécessaire pour bénéficier de la qualification de service de premières exclusivités.
En outre, dès lors que les services de premières exclusivités sont une sous-catégorie des services de cinéma de premières diffusions, leur définition pourrait utilement prendre place à l'article 6-3 du décret n° 90-66, après la définition des services de cinéma de premières diffusions, plutôt qu'à l'article 6-2.
Tant pour la définition des services de cinéma de premières diffusions que pour les services de premières exclusivités, le CSA estime souhaitable qu'il soit précisé que le nombre d'oeuvres diffusées répondant aux critères prévus s'apprécie annuellement.
Enfin, compte tenu des avantages concurrentiels qui s'attachent à cette qualification, en termes de grille de diffusion d'oeuvres cinématographiques, le conseil estime que se pose de manière aiguë la question du contrôle du respect des obligations qui y sont liées.
Il considère donc comme essentiel de prévoir un dispositif d'encadrement particulier, qui pourrait s'inspirer de celui prévu au deuxième alinéa du 2° de l'article 27 de la loi du 30 septembre 1986 en matière d'heures d'écoute significatives, dont le bénéfice est accordé chaque année par le CSA.
Le projet de décret pourrait ainsi être complété par une disposition prévoyant que la classification comme service de premières exclusivités est opérée chaque année par le CSA, à la demande du service et au vu des éléments que celui-ci produit pour prouver sa capacité à remplir les conditions requises.



II. - Observations relatives aux autres dispositions du décret n° 90-66 du 17 janvier 1990



A l'occasion du projet de décret qui est soumis au CSA, plusieurs améliorations rédactionnelles pourraient être apportées au décret n° 90-66 du 17 janvier 1990 modifié.
Ainsi, l'article 6-1 pourrait être modifié pour préciser que le CSA a compétence pour qualifier les oeuvres produites ou coproduites par un producteur établi en France, lorsque le bénéfice du soutien financier de l'Etat n'a pas été sollicité.
A l'article 6-6, qui définit les services de paiement à la séance, le membre de phrase selon lequel la rémunération de la part des usagers doit être « directement liée soit à la durée d'utilisation du service, soit à l'émission » n'apparaît pas compatible avec des formules d'abonnement par saison ou à l'année (notamment les saisons de football ou les offres théâtrales). Il serait donc souhaitable que soit expressément prévue la faculté d'abonnements par saison, à l'exclusion d'abonnements à des programmes pornographiques, à charge pour le CSA, par voie conventionnelle, de veiller à ce que ce type d'abonnement n'aboutisse pas à la création de chaînes à temps complet, fût-ce à titre temporaire.
Il serait souhaitable que l'article 7, relatif à la diffusion d'oeuvres cinématographiques européennes et d'expression originale française aux heures de grande écoute, précise, comme c'était le cas avant sa modification par le décret n° 2001-1330 du 28 décembre 2001, que sont considérées comme diffusées aux heures de grande écoute les oeuvres diffusées en tout ou partie dans les tranches ainsi définies. En effet, la suppression de cette mention ne semble pas avoir été intentionnelle et elle introduit un doute sur les modalités selon lesquelles cette obligation doit être respectée.
L'article 14, relatif aux heures de grande écoute pour la diffusion d'oeuvres audiovisuelles, renvoie à la convention la fixation de ces heures « pour les éditeurs de services diffusés par voie hertzienne terrestre en mode numérique, distribués par câble ou diffusés par satellite, ainsi que pour les programmes rediffusés des services de cinéma à programmation multiple ». Cette rédaction devrait être aménagée sur deux points, compte tenu des modifications apportées aux articles 33 et 33-1 de la loi du 30 septembre 1986 par la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004.
En premier lieu, cet article ne devrait plus faire référence aux services « distribués par câble ou diffusés par satellite » mais aux services « distribués par les réseaux n'utilisant pas de fréquences assignées par le Conseil supérieur de l'audiovisuel ».
En second lieu, le renvoi à la convention n'est pas pertinent pour les services soumis à simple déclaration (II de l'article 33-1 de la loi), pour lesquels les heures de grande écoute devraient être fixées par le décret.
Enfin, le conseil relève que le projet de décret n'apporte pas d'assouplissement à la grille de diffusion des oeuvres cinématographiques sur les services de paiement à la séance (art. 11 du décret). Il comprend que les discussions en cours sur la chronologie des médias, rendues nécessaires par le développement à terme de la vidéo à la demande, incitent à différer l'aménagement de cette grille. Il estime néanmoins qu'à terme ces services devraient bénéficier de la grille la plus souple.
Fait à Paris, le 5 octobre 2004.

Pour le Conseil supérieur de l'audiovisuel :


Le président,


D. Baudis