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Avis n° 2004-563 du 29 juin 2004 sur le projet de décret relatif aux obligations de service public des télécommunications et au financement du service universel des télécommunications

Handicap et inclusivité
Industrie
Télécommunications et internet
Déposé le 28 juin 2004 à 22h00, publié le 18 novembre 2004 à 23h00
Journal officiel

Texte

L'Autorité de régulation des télécommunications,
Vu la directive 2002/22/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 concernant le service universel et les droits des utilisateurs à l'égard des réseaux et services de communications électroniques (directive « service universel ») ;
Vu le code des postes et télécommunications, et notamment ses articles L. 35 à L. 35-8, L. 36-7, R. 10-8 et R. 20-31 à R. 20-44 ;
Vu la loi n° 2003-1365 du 31 décembre 2003 relative aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom, et notamment son article 9 ;
Vu le décret n° 96-1225 du 27 décembre 1996 portant approbation du cahier des charges de France Télécom ;
Vu la demande d'avis du ministre délégué à l'industrie, en date du 9 juin 2004 ;
Après en avoir délibéré le 29 juin 2004,



I. - Le contexte



La loi n° 2003-1365 du 31 décembre 2003 relative aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom constitue, pour ce qui est du service universel, la transposition de la directive « service universel » susvisée.
Elle maintient la structure du service public des télécommunications établie en 1996, qui distingue trois composantes du service public : le service universel, les services obligatoires et les missions d'intérêt général en matière de défense, de sécurité, de recherche et d'enseignement supérieur.
L'Autorité rappelle qu'outre les obligations à la charge des opérateurs prestataires de service universel s'ajoutent des obligations d'ordre général s'apparentant à des obligations de service public qui pèsent sur l'ensemble des opérateurs. Ainsi, à l'occasion du renouvellement des licences d'Orange France et SFR, et sur proposition de l'Autorité (cf. décision n° 2004-150 en date du 24 mars 2004), le ministre a renforcé les obligations des opérateurs mobiles, notamment en matière d'accessibilité au service pour les personnes handicapées, de protection de l'environnement et de partage des sites radioélectriques, de couverture des zones blanches, de protection du consommateur grâce aux mesures contre le vol des terminaux.
Le service universel, dont la définition est issue de la directive « service universel », comprend quatre composantes : la fourniture d'un service téléphonique fixe de qualité à un prix abordable, la fourniture d'un service de renseignements et d'un annuaire, l'accès à des cabines téléphoniques et des mesures particulières pour les handicapés. Ce contenu est susceptible d'évoluer dès 2005, la Commission européenne ayant l'obligation, en vertu de cette même directive, de réexaminer la portée du service universel avant juillet 2005.
Cette loi introduit également un nouveau mécanisme de désignation par lequel le ministre chargé des télécommunications désigne pour chaque composante l'opérateur attributaire à la suite d'un appel à candidatures. Une fois désigné, l'opérateur en charge d'une des obligations du service universel pourra être compensé par le fonds de service universel du coût net de ses obligations, dès lors que celles-ci constituent une charge excessive.
Le décret soumis pour avis à l'Autorité vient préciser ce nouveau dispositif conformément aux articles L. 35-1 à L. 35-3 du code des postes et télécommunications. Il comprend trois catégories de dispositions : celles relatives à la définition des composantes, celles relatives à la procédure de désignation des opérateurs en charge d'une des composantes du service universel et enfin celles relatives aux modalités de calcul du coût du service universel et des contributions de chacun des opérateurs.
II. - Sur les dispositions relatives à la définition des composantes du service universel (art. 2 du projet de décret)
L'Autorité note que le projet d'article R. 20-30-1 prévoit notamment une obligation pour l'opérateur en charge de la première composante du service universel, à savoir la fourniture du service téléphonique de qualité à prix abordable, de fournir gratuitement aux abonnés des services d'interdiction sélective des appels sortants proposés dans le cadre de son offre de service téléphonique.
L'Autorité estime que la liste prévue à cet article pourrait être modifiée afin de créer un service d'interdiction sélective d'appel suivant la segmentation suivante :
- appels interpersonnels nationaux vers les réseaux fixes. Cette catégorie inclurait les appels locaux, interurbains et vers les numéros non géographiques de type 087BPQMCDN. Ces trois types d'appel sont relativement homogènes en terme d'usage et de tarification. Le surcoût entre un appel local et un appel interurbain tend à disparaître et les offres tarifaires regroupant ces trois types d'appel sont courantes ;
- appels interpersonnels nationaux vers les réseaux mobiles. Compte tenu de leur nature spécifique et du niveau de prix plus élevés, il semble légitime d'isoler les appels vers les mobiles en précisant qu'il s'agit ici uniquement d'appels nationaux ;
- appels internationaux. Ces appels, qu'ils soient vers des réseaux fixes ou mobiles, pourraient être regroupés dans une catégorie distincte, compte tenu de leur nature différente et de la grande variabilité de leur prix ;
- appels vers des prestataires de services. L'ensemble des appels vers des prestataires de services, ou appels vers des numéros spéciaux, pourraient être regroupés en une seule catégorie, la frontière entre services à revenus partagé et à coûts partagés devenant de plus en plus ténue et la tarification de ces communications n'étant soumise à aucune réduction tarifaire contrairement aux communications interpersonnelles ;
- appels payants. Enfin, une option globale d'interdiction d'appel vers les numéros non gratuits pourrait également être ajoutée. Une telle option permettrait de bloquer tous les appels, à l'exception des appels vers les numéros gratuits de type 0800 et les services d'urgence.
Au titre du projet d'article R. 20-30-3, les obligations imposées à l'opérateur désigné en charge de la composante « publiphonie » ont été modifiées. Ainsi, cet opérateur devra désormais implanter une cabine par commune et une supplémentaire pour les communes dont le nombre d'habitants est compris entre 1 000 et 2 500 habitants. Cet assouplissement permet d'adapter les obligations de la composante à la réalité des usages de télécommunications actuels.
L'Autorité relève que le projet d'article R. 20-30-4 précise les mesures que l'opérateur désigné pour l'une des composantes du service universel doit adopter en faveur des handicapés.
L'Autorité considère que les personnes souffrant d'un handicap devraient pouvoir bénéficier de telles mesures de la part de l'ensemble des opérateurs, qu'ils soient ou non en charge d'une des obligations de service universel, et accueillerait favorablement une loi fixant une telle obligation générale. Dès lors qu'une telle obligation est d'ordre général, elle ne devrait pas donner lieu à compensation.



III. - Sur les dispositions relatives aux modalités de calcul
des coûts du service universel (art. 3 à 13 du projet de décret)



Sur le projet d'article R. 20-31 :
L'article 3 du projet de décret modifie l'article R. 20-31 du code des postes et télécommunications relatif aux coûts du service universel. La référence à l'article R. 20-34, relatif aux tarifs sociaux, devrait être citée au a de l'article R. 20-31 en ce qu'il concerne la composante « service téléphonique » et non au b relatif aux composantes 2 et 3 du service universel.
Sur le projet d'article R. 20-33 :
L'Autorité accueille favorablement la disparition de la référence aux abonnés non rentables dans la méthode d'évaluation du coût correspondant aux obligations de péréquation géographique.
Une telle référence se concilie mal avec une évaluation zone par zone et peut d'ailleurs conduire à des situations paradoxales où la compensation de la desserte d'une zone se révèle moins coûteuse que celle d'une partie de ses abonnés, ce qui décrédibilise le dispositif et est source de contentieux.
A cet égard, les évaluations menées par l'Autorité dans le cas de France Télécom ont nécessité le développement de modélisations complexes qui, malgré le soin qui peut être apporté à leur mise en oeuvre, restent par nature contestables et fragiles ; ainsi, alors que l'évaluation définitive, fondée sur les données auditées, du montant de cette composante a été respectivement de 5,1 et 5,4 millions d'euros (avant prise en compte des avantages immatériels) pour les années 2000 et 2001, le montant prévisionnel pour l'année 2002 s'est élevé à 56 millions d'euros.
Par ailleurs, l'Autorité note que le rapport au Premier ministre propose de supprimer la mention selon laquelle : « Les coûts d'investissement sont fondés sur les coûts de remplacement calculés sur la base des meilleurs technologies industriellement disponibles. »
L'Autorité s'accorde avec cette proposition, mais estime souhaitable de maintenir la référence à un principe d'efficacité. C'est pourquoi l'Autorité propose de remplacer la dernière phrase du II de l'article R. 20-33 par : « Les coûts pris en compte sont ceux d'un opérateur efficace ».
Sur le projet d'article R. 20-37 :
L'article 8 du projet de décret modifie l'article R. 20-37 pour confier la charge du calcul du taux de rémunération à la seule Autorité.
L'Autorité considère qu'il serait souhaitable que les modalités de calcul de ce taux soient également modifiées afin de prendre en compte la spécificité des prestations de service universel ; les activités de service universel présentent en effet un risque moindre du fait que l'opérateur est compensé, quelle que soit l'ampleur de son déficit.
L'Autorité estime par conséquent qu'il est souhaitable que le décret prenne acte des spécificités du service universel à travers une formule générale, telle que celle proposée en annexe.
Sur le projet d'article R. 20-37-1 :
Le décret n° 2003-338 du 10 avril 2003, qui avait introduit dans le code la définition des avantages immatériels, afin de mettre la France en conformité avec l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 6 décembre 2001, avait repris les avantages listés par la Commission dans sa communication COM (96) 608, en date du 27 novembre 1996, sur les critères d'évaluation pour les systèmes nationaux de calcul du coût et de financement du service universel dans les télécommunications, et les lignes directrices pour les Etats membres en ce qui concerne le fonctionnement de tels systèmes.
L'Autorité constate que l'article 9 du projet de décret modifie l'article R. 20-37-1 du code des postes et télécommunications afin de préciser que la liste des quatre avantages immatériels n'est plus exhaustive et peut donc être enrichie. L'Autorité s'interroge sur l'objectif de cette modification, qui risque d'ouvrir la voie à de nouveaux contentieux. Elle souhaite par conséquent que le décret évite d'employer le terme « notamment », ou, le cas échéant, précise expressément les avantages supplémentaires à prendre en compte.
Sur le projet d'article R. 20-39 :
Le projet d'article 11 modifie l'article R. 20-39 du code des postes et télécommunications. Il reprend la définition du chiffre d'affaires à prendre en compte, en excluant celui réalisé au titre de l'acheminement et de la diffusion de services de radio ou de télévision, conformément à l'article L. 35-3, tout en excluant aussi celui lié à l'exploitation d'antennes collectives.
L'Autorité s'interroge sur la signification de la notion « d'antennes collectives » et considère qu'il serait souhaitable que ce terme soit précisé par le décret afin d'éviter toute ambiguïté.
Dans un même souci de clarification, l'Autorité considère qu'il est nécessaire de préciser que le « chiffre d'affaires » mentionné à différentes reprises est toujours le même, à savoir le chiffre d'affaires tel que défini aux second et troisième alinéas de cet article.
En outre, l'Autorité est favorable à l'existence d'un mécanisme permettant de simplifier la gestion du fonds de service universel. Elle observe à cet égard que le seuil d'exemption, fixé à 400 000 euros, paraît faible ; il pourrait conduire une entreprise de petite taille (moins de 2 employés sur la base de ratios communément observés) à contribuer en lui imposant des charges de gestion disproportionnées ; c'est pourquoi l'Autorité considère qu'un relèvement du seuil à cinq millions d'euros permettrait d'alléger la charge pour les entreprises du secteur sans nuire à un principe d'équité, compte tenu de la forte concentration du secteur.
Il y a lieu, également en tout état de cause, que le texte réglementaire permette de lever toute ambiguïté quant au mécanisme ; l'Autorité est à cet égard favorable, pour des raisons pratiques et d'équité, à ce que le dispositif conduise successivement :
- d'abord à isoler les opérations impliquées dans le financement, compte tenu du seuil d'exemption ;
- puis à répartir la charge de financement entre ces opérateurs.
Enfin, l'Autorité observe que le dispositif envisagé conduit à des effets de seuil. Il paraîtrait préférable de mettre en place un dispositif de franchise, compatible avec les dispositions législatives, répartissant les charges de financement sur la base du montant du chiffre d'affaires au-delà du seuil considéré.
L'Autorité a pu mener une estimation de l'effet des différentes modifications ci-dessus exposées : elles augmentent de moins de 1 % les contributions à la charge des plus gros contributeurs par rapport au dispositif prévu par le projet de décret.
Par ailleurs, l'Autorité constate, eu égard au rapport fait au Premier ministre sur ce point, que, même en l'absence de disposition dans ce décret relatif à l'évaluation de la charge excessive imposée par l'article L. 35-3 du code des postes et télécommunications, il lui reviendra d'effectuer cette évaluation. Dans un souci de sécurité juridique, il semble préférable de confier expressément cette compétence à l'Autorité.
Les autres articles du projet de décret n'appellent pas de commentaire particulier de la part de l'Autorité. Sous la réserve des remarques énoncées ci-dessus et des modifications rédactionnelles formulées en annexe, l'Autorité émet un avis favorable sur le projet de décret.
Le présent avis et les propositions rédactionnelles annexées seront transmis au ministre délégué à l'industrie et publiés au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 29 juin 2004.

Article Annexe

A N N E X E
PROJET DE DÉCRET RELATIF AUX OBLIGATIONS DE SERVICE PUBLIC DES TÉLÉCOMMUNICATIONS
ET AU FINANCEMENT DU SERVICE UNIVERSEL DES TÉLÉCOMMUNCATIONS

Le président,


P. Champsaur