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Circulaire du 10 février 1995 commentant la loi no 95-1 du 2 janvier 1995 portant adaptation de la législation française aux dispositions de la résolution 827 du Conseil de sécurité des Nations Unies instituant un tribunal international en vue de juger les personnes présumées responsables de violations graves du droit humanitaire commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie depuis 1991

Justice et droit
Droits de l'homme
Guerre en Ukraine
Déposé le 9 février 1995 à 23h00, publié le 20 février 1995 à 23h00
Journal officiel

Texte

Paris, le 10 février 1995.

2.3. Coopération judiciaire (art. 7 à 14)

Le titre II de la loi, qui concerne la coopération judiciaire avec le tribunal international, traite dans ses deux chapitres de l'entraide judiciaire et des demandes d'arrestation et de remise.

2.3.2. Arrestation et remise (art. 9 à 14)

Les dispositions qui traitent de l'arrestation et de la remise sont largement inspirées de la procédure de la loi du 10 mars 1927 relative à l'extradition des étrangers. La nature du tribunal international, autorité juridictionnelle internationale, et non pas autorité étatique étrangère,
entraîne cependant plusieurs conséquences.
Tout d'abord, l'autorité judiciaire française décide souverainement, sans intervention du pouvoir exécutif, de la remise des personnes réclamées par le tribunal international.
Ensuite, la procédure a été confiée, du fait de sa spécificité et dans un souci de centralisation, à la chambre d'accusation de Paris.
Le contrôle effectué par cette juridiction est moins approfondi qu'en matière d'extradition puisqu'il a pour seul objet de constater que les faits objets de la demande d'arrestation entrent bien dans le champ d'application de l'article 1er de la loi et qu'il n'y a pas d'erreur évidente (art. 13). Ce contrôle est ainsi de même nature que celui exercé par la chambre criminelle de la Cour de cassation, en matière de dessaisissement des juridictions nationales.
L'article 9 dispose que la demande d'arrestation aux fins de remise au tribunal international est adressée au ministère de la justice, sauf en cas d'urgence, où elle peut être adressée directement et par tout moyen au procureur de la République territorialement compétent, qui, après s'être assuré de sa régularité formelle, la transmet au procureur général près la cour d'appel de Paris, et, dans le même temps, la met à exécution dans toute l'étendue du territoire de la République.
Les articles 10, 11 et 12 déterminent la procédure à suivre en cas de demande d'arrestation aux fins de remise.
Ainsi, l'article 10 prévoit que la personne appréhendée en vertu d'une telle demande doit être déférée dans un délai de vingt-quatre heures au procureur de la République territorialement compétent. Celui-ci ordonne son incarcération, après l'avoir informée, dans une langue qu'elle comprend,
qu'elle fait l'objet d'une demande d'arrestation et qu'elle comparaîtra,
assistée, si elle le souhaite, d'un avocat, dans un délai de cinq jours devant le procureur général près la cour d'appel de Paris.
L'article 10 précise que la personne appréhendée bénéficie des dispositions du code de procédure pénale relatives à la garde à vue, soit le droit de faire prévenir un tiers, d'être examinée par un médecin et de s'entretenir avec un avocat à l'expiration d'un délai de vingt heures si, avant l'expiration de ce délai, elle n'a pas déjà été présentée devant le procureur de la République.
En application de l'article 11, la personne réclamée est transférée dans une maison d'arrêt du ressort de la cour d'appel de Paris, dans un délai maximum de cinq jours à compter de sa présentation devant le procureur de la République, faute de quoi elle est remise en liberté, sauf si le transfèrement a été retardé par des circonstances insurmontables. Cette mise en liberté doit être ordonnée par le président de la chambre d'accusation de Paris, qui est donc seul compétent pour apprécier l'existence ou non des circonstances insurmontables.
C'est ensuite au procureur général près la cour d'appel de Paris qu'il revient de notifier à la personne arrêtée la demande d'arrestation ainsi que les chefs d'accusation portés contre elle. Si l'intéressé n'a pas déjà réclamé un avocat, le procureur général lui rappelle ce droit, afin que cette notification puisse avoir lieu en présence, le cas échéant, d'un avocat désigné ou commis d'office par le bâtonnier.
L'article 12 précise les conditions du déroulement de l'audience devant la chambre d'accusation de Paris. Cette audience doit avoir lieu dans un délai de huit jours à compter de la présentation de l'intéressé au procureur général. Lors de sa comparution, l'intéressé peut demander à ce qu'un délai supplémentaire de huit jours lui soit accordé avant les débats. L'audience est normalement publique, sauf décision contraire de la chambre d'accusation. En application des dispositions de l'article 13, la décision de la chambre d'accusation ordonnant ou refusant la remise doit intervenir dans les quinze jours de la comparution de la personne devant la juridiction (c'est-à-dire de sa comparution lors des débats portant sur l'examen de la demande de remise, et non de l'éventuelle comparaison au cours de laquelle l'intéressé a demandé le report à huitaine des débats). Cet arrêt peut faire l'objet d'un pourvoi, la chambre criminelle de la Cour de cassation devant statuer dans un délai d'un mois à compter de la réception du dossier.
L'article 14 précise que l'intéressé peut demander à tout moment sa mise en liberté à la chambre d'accusation de Paris qui procède conformément aux articles 148-1 et suivants du code de procédure pénale.
L'article 15 règle les modalités pratiques de l'exécution de la décision de remise au tribunal international et fixe pour l'effectuer un délai maximal d'un mois, dont le non-respect est sanctionné par la mise en liberté de l'intéressé, sauf si sa remise a été retardée par des circonstances insurmontables. Comme dans l'hypothèse prévue par l'article 11, cette mise en liberté doit être ordonnée par le président de la chambre d'accusation de Paris, qui est donc seul compétent pour apprécier l'existence ou non des circonstances insurmontables.
L'article 16 rappelle enfin que les dispositions relatives à la remise des personnes au tribunal international doivent être appliquées même si l'intéressé est poursuivi ou condamné en France pour d'autres faits.
Dans cette hypothèse, l'article 16 précise que ne sont pas applicables les dispositions prévoyant la mise en liberté de la personne faisant l'objet d'une procédure de remise en cas de non-respect des délais édictés par la loi. Cette précision doit s'entendre comme indiquant que les libérations prévues par ces dispositions ne peuvent évidemment intervenir si l'intéressé est détenu pour une autre cause.
L'article 16 précise également que la procédure suivie devant le tribunal international en cas de remise suspend la prescription de l'action publique ou de la peine concernant les procédures suivies en France.
Je vous serai obligé de veiller à la diffusion de la présente circulaire et de m'informer, sous le double timbre de la direction des affaires criminelles et des grâces et du service des affaires européennes et internationales, des procédures engagées en application des dispositions de la présente loi, y compris celles consistant dans l'audition de personnes réfugiées sur notre territoire. Une copie de ces procédures devra être adressée au service des affaires européennes et internationales afin d'être transmise pour information au procureur du tribunal international.

2.2. Compétence et dessaisissement


des juridictions françaises (art. 2 à 6)


2.2.1. Compétence des juridictions françaises (art. 2)

L'article 2 du chapitre Ier du titre Ier de la loi pose le principe de la compétence universelle des juridictions françaises pour les infractions mentionnées à l'article 1er dès lors que l'auteur ou le complice de ces faits est trouvé sur le territoire français.
La reconnaissance de cette compétence universelle, qui n'était pas exigée par la résolution du Conseil de sécurité, constitue une importante innovation: elle marque la volonté de la France de collaborer aussi efficacement que possible à la répression de ces crimes.
Elle permet ainsi l'application de la loi française à l'encontre de tout criminel de guerre qui tenterait de se réfugier sur notre territoire, même dans l'hypothèse où celui-ci ne serait pas encore recherché par le tribunal international.
Le deuxième alinéa de l'article 2 précise que les victimes pourront se constituer partie civile, le cas échéant, pour mettre en mouvement l'action publique. Cette précision, qui pourrait paraître juridiquement superfétatoire, a été jugée nécessaire par le Parlement afin d'éviter toute ambiguïté, dans la mesure où la constitution de partie civile est exclue devant le tribunal international.
Conformément à la règle traditionnellement édictée en matière de compétence universelle et dans un souci d'efficacité, le Parlement n'a pas souhaité étendre la compétence des juridictions nationales aux infractions mentionnées à l'article 1er dont les auteurs ne sont pas trouvés en France.
Toutefois, comme cela a été indiqué au cours des débats devant l'Assemblée nationale (J.O. A.N. CR 20 décembre 1994, p. 9446), l'impossibilité de mettre en mouvement l'action publique contre des personnes ne se trouvant pas sur le territoire français n'empêche nullement les parquets de faire procéder, à titre conservatoire et au cours d'une enquête préliminaire, à l'audition des personnes victimes de ces crimes et qui se seraient réfugiées en France.
Les parquets dans le ressort desquels ces victimes ont élu domicile devront ainsi veiller, à la demande de ces dernières, à ce que leurs déclarations puissent être recueillies par procès-verbal, en faisant procéder si nécessaire à leur examen médical en application de l'article 77-1 du code de procédure pénale, afin de conserver leur témoignage au cas de poursuites ultérieures.
En tout état de cause, le tribunal international bénéficiant d'une compétence prioritaire, le dernier alinéa de l'article 2 précise que les procédures en cours portant sur des faits pouvant relever de ses attributions doivent être portées à la connaissance de ce dernier. Cette information devra être faite par l'intermédiaire des parquets et du ministère de la justice,
qui adressera copie de ces procédures, y compris celles concernant le recueil du témoignage des victimes, au tribunal international.

2. Présentation des dispositions d'adaptation

La loi du 2 janvier 1995 distingue, dans ses deux titres, après un article introductif qui fixe son champ d'application, d'une part, la compétence et le dessaisissement des juridictions françaises et, d'autre part, la coopération judiciaire avec le tribunal international.

1. Présentation du tribunal international

La compétence, la composition et le fonctionnement de ce tribunal sont prévus par son statut (ci-joint en annexe), auquel renvoie expressément la résolution 827, et par le règlement de procédure et d'administration des preuves (également ci-joint en annexe), adopté par les juges du tribunal international en application de l'article 15 du statut.
Le tribunal, qui a son siège à La Haye, comporte deux chambres de première instance et une chambre d'appel (art. 11 du statut). Il est composé de onze juges, dont un juge français, élus par l'Assemblée générale de l'O.N.U. pour un mandat de quatre ans renouvelable.
Son procureur, nommé pour quatre ans, est un organe distinct au sein du tribunal, qui agit en toute indépendance, sans pouvoir recevoir d'instructions de quiconque. C'est à lui qu'il appartient de saisir le tribunal en transmettant l'acte d'accusation à un juge siégeant dans une chambre de première instance. Il dispose également de pouvoirs d'investigation étendus, similaires à ceux que détient en France un juge d'instruction.
Le tribunal international est gouverné par deux règles essentielles:
- sa compétence est limitée dans le temps et dans l'espace aux violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie depuis 1991, soit le début des hostilités, et qui constituent, selon le statut du tribunal, des infractions graves aux conventions de Genève de 1949, des violations des lois aux coutumes de la guerre, un génocide ou des crimes contre l'humanité (art. 2 à 5 du statut);
- sa compétence est prioritaire sur celle des juridictions nationales pour les crimes considérés (art. 9 et 10 du règlement).
Le tribunal ne peut prononcer que des peines d'emprisonnement, dont les conditions sont fixées par référence aux peines appliquées par les tribunaux de l'ex-Yougoslavie (art. 24 du statut).

2.2.2. Dessaisissement des juridictions françaises (art. 3 à 6)

Les dispositions du chapitre II de la loi organisent le régime du dessaisissement des juridictions nationales dans le respect du principe de primauté du tribunal international, celui-ci pouvant à tout stade de la procédure demander aux juridictions nationales de se dessaisir en sa faveur. L'économie générale de ces dispositions repose sur la compétence exclusive conférée à la chambre criminelle de la Cour de cassation pour ordonner le dessaisissement, étant précisé que les demandes de la juridiction internationale transitent par le ministère de la justice.
L'article 3 énumère les pièces à produire et les délais de procédure à respecter en cas de demande de dessaisissement.
L'article 4 indique l'étendue des pouvoirs de la chambre criminelle de la Cour de cassation lors de l'examen de la demande. Cette juridiction, saisie par requête de son procureur général, doit vérifier si les faits objets de la demande de dessaisissement de la juridiction française d'instruction ou de jugement entrent dans le champ d'application de la loi et s'il n'y a pas d'erreur évidente.
Sa décision doit intervenir dans le délai d'un mois à compter de la requête. L'article 5 précise qu'en cas de dessaisissement, la transmission du dossier de la procédure au tribunal international est effectuée par l'intermédiaire du ministère de la justice. Il règle par ailleurs la situation dans laquelle la demande de dessaisissement est accompagnée d'une demande de remise,
lorsque la personne faisant l'objet de la procédure suivie devant la juridiction nationale est détenue dans le cadre de cette procédure.
Dans une telle hypothèse, la décision de dessaisissement prise par la Cour de cassation vaudra également décision de remise de l'intéressé au tribunal international, sans qu'il soit nécessaire d'engager la procédure prévue par les articles 10 à 13 de la loi (cf. infra point 2.3.2). Jusqu'à la remise effective de l'intéressé, qui doit intervenir dans le délai d'un mois prévu par le second alinéa de l'article 15 de la loi, les mandats délivrés par les juridictions françaises dessaisies conservent leur force exécutoire.
Enfin, l'article 6 rappelle, dans son premier alinéa, que le dessaisissement des juridictions pénales françaises n'interdit pas aux victimes d'exercer les droits reconnus aux parties civiles devant les juridictions civiles par les articles 4 et 5-1 du code de procédure pénale.
Par ailleurs, le deuxième alinéa de l'article 6 dispose que, dans l'hypothèse où le dessaisissement interviendrait après la constitution de partie civile devant la juridiction de jugement, celle-ci demeurera compétente pour statuer sur l'action civile. Le législateur précise toutefois que cette décision ne pourra évidemment pas intervenir tant que le tribunal international n'aura pas définitivement statué sur l'action publique,
conformément à la règle selon laquelle le criminel tient le civil en état.

A N N E X E I
O.N.U.: Résolution 827 du Conseil de sécurité créant le tribunal international annoncé dans la résolution 808 * (New York, 25 mai 1993)
(Source Nations Unies)

Le Conseil de sécurité,
Réaffirmant sa résolution 713 (1991) du 25 septembre 1991 et toutes les résolutions pertinentes qui ont suivi;
Ayant examiné le rapport établi par le secrétaire général (S/25704 et Add.
1) en application du paragraphe 2 de la résolution 808 (1993);
Se déclarant une nouvelle fois gravement alarmé par les informations qui continuent de faire état de violations flagrantes et généralisées du droit humanitaire international sur le territoire de l'ex-Yougoslavie et spécialement dans la République de Bosnie-Herzégovine, particulièrement celles qui font état de tueries massives, de la détention et du viol massifs, organisés et systématiques des femmes et de la poursuite de la pratique du << nettoyage ethnique >>, notamment pour acquérir et conserver un territoire;
Constatant que cette situation continue de constituer une menace à la paix et à la sécurité internationales;
Résolu à mettre fin à de tels crimes et à prendre des mesures efficaces pour que les personnes qui en portent la responsabilité soient poursuivies en justice;
Convaincu que, dans les circonstances particulières qui prévalent dans l'ex-Yougoslavie, la création d'un tribunal international, en tant que mesure spéciale prise par lui, et l'engagement de poursuites contre les personnes présumées responsables de violations graves du droit humanitaire international permettraient d'atteindre cet objectif et contribueraient à la restauration et au maintien de la paix;
Estimant que la création d'un tribunal international et l'engagement de poursuites contre les personnes présumées responsables de telles violations du droit humanitaire international contribueront à faire cesser ces violations et à en réparer effectivement les effets;
Prenant note à cet égard de la recommandation des coprésidents du comité directeur de la conférence internationale sur l'ex-Yougoslavie en faveur de la création d'un tel tribunal (S/25221);
Réaffirmant à cet égard qu'il a décidé, par la résolution 808 (1993), la création d'un tribunal international pour juger les personnes présumées responsables de violations graves du droit humanitaire international commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie depuis 1991;
Considérant que, jusqu'à la nomination du procureur du tribunal international, la commission d'experts établie par la résolution 780 (1992) devrait continuer à rassembler de manière urgente l'information sur les violations graves dont on aurait la preuve des conventions de Genève et d'autres violations du droit humanitaire international, comme cela est proposé dans son rapport intérimaire (S/25274).
Agissant en vertu du chapitre VII de la Charte des Nations Unies,
1. Approuve le rapport du secrétaire général.
2. Décide par la présente résolution de créer un tribunal international dans le seul but de juger les personnes présumées responsables de violations graves du droit humanitaire international commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie entre le 1er janvier 1991 et une date que déterminera le conseil après la restauration de la paix, et d'adopter à cette fin le statut du tribunal international annexé au rapport ci-dessus mentionné.
3. Prie le secrétaire général de soumettre aux juges du tribunal international, dès qu'ils seront élus, toutes suggestions présentées par des Etats en ce qui concerne le règlement prévu à l'article 15 du statut du tribunal international.
4. Décide que tous les Etats apporteront leur pleine coopération au tribunal international et à ses organes, conformément à la présente résolution et au statut du tribunal international et que tous les Etats prendront toutes mesures nécessaires en vertu de leur droit interne pour mettre en application les dispositions de la présente résolution et du statut, y compris l'obligation des Etats de se conformer aux demandes d'assistance ou aux ordonnances émanant d'une chambre de première instance en application de l'article 29 du statut.
5. Prie instamment les Etats et les organisations gouvernementales et non gouvernementales d'apporter au tribunal international des contributions sous forme de ressources financières, d'équipements et de services, y compris l'offre de personnels spécialisés.
6. Décide que la décision relative au siège du tribunal international est subordonnée à la conclusion entre l'Organisation des Nations Unies et les Pays-Bas d'arrangements appropriés qui soient acceptables par le Conseil de sécurité et que le tribunal international peut siéger ailleurs quand il le juge nécessaire pour l'exercice efficace de ses fonctions.
7. Décide également que la tâche du tribunal sera accomplie sans préjudice du droit des victimes de demander réparation par les voies appropriées pour les dommages résultant de violations du droit humanitaire international.
8. Prie le secrétaire général de mettre rapidement en oeuvre la présente résolution et de prendre en particulier des dispositions pratiques pour que le tribunal international puisse fonctionner de manière effective le plus tôt possible et de lui faire rapport de temps à autre.
9. Décide de demeurer activement saisi de la question.
(*) DAI 7 du 1er avril 1993.





A N N E X E I I


STATUT DU TRIBUNAL INTERNATIONAL

Créé par le Conseil de sécurité agissant en vertu du chapitre VII de la Charte des Nations Unies, le tribunal international pour juger les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie depuis 1991 (ci-après dénommé le Tribunal international) fonctionnera conformément aux dispositions du présent statut.



Article 1er


Compétence du Tribunal international

Le Tribunal international est habilité à juger les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie depuis 1991, conformément aux dispositions du présent statut.



Article 2


Infractions graves aux conventions de Genève de 1949

Le Tribunal international est habilité à poursuivre les personnes qui commettent ou donnent l'ordre de commettre des infractions graves aux conventions de Genève du 12 août 1949, à savoir les actes suivants dirigés contre des personnes ou des biens protégés aux termes des dispositions de la convention de Genève pertinente:
a) L'homicide intentionnel;
b) La torture ou les traitements inhumains, y compris les expériences biologiques;
c) Le fait de causer intentionnellement de grandes souffrances ou de porter des atteintes graves à l'intégrité physique ou à la santé;
d) La destruction et l'appropriation de biens non justifiées par des nécessités militaires et exécutées sur une grande échelle de façon illicite et arbitraire;
e) Le fait de contraindre un prisonnier de guerre ou un civil à servir dans les forces armées de la puissance ennemie;
f) Le fait de priver un prisonnier de guerre ou un civil de son droit d'être jugé régulièrement et impartialement;
g) L'expulsion ou le transfert illégal d'un civil ou sa détention illégale; h) La prise de civils en otages.



Article 3


Violations des lois ou coutumes de la guerre

Le Tribunal international est compétent pour poursuivre les personnes qui commettent des violations des lois ou coutumes de la guerre. Ces violations comprennent, sans y être limitées:
a) L'emploi d'armes toxiques ou d'autres armes conçues pour causer des souffrances inutiles;
b) La destruction sans motif des villes et des villages ou la dévastation que ne justifient pas les exigences militaires;
c) L'attaque ou le bombardement, par quelque moyen que ce soit, de villes,
villages, habitations ou bâtiments non défendus;
d) La saisie, la destruction ou l'endommagement délibéré d'édifices consacrés à la religion, à la bienfaisance et à l'enseignement, aux arts et aux sciences, à des monuments historiques, à des oeuvres d'art et à des oeuvres de caractère scientifique;
e) Le pillage de biens publics ou privés.



Article 4


Génocide

1. Le Tribunal international est compétent pour poursuivre les personnes ayant commis le génocide tel qu'il est défini au paragraphe 2 du présent article, ou l'un quelconque des actes énumérés au paragraphe 3 du présent article.
2. Le génocide s'entend de l'un quelconque des actes ci-après, commis dans l'intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel:
a) Meurtre de membres du groupe;
b) Atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale de membres du groupe;
c) Soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle;
d) Mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe;
e) Transfert forcé d'enfants du groupe à un autre groupe.
3. Seront punis les actes suivants:
a) Le génocide;
b) L'entente en vue de commettre le génocide;
c) L'incitation directe et publique à commettre le génocide;
d) La tentative de génocide;
e) La complicité dans le génocide.



Article 5


Crimes contre l'humanité

Le Tribunal international est habilité à juger les personnes présumées responsables des crimes suivants lorsqu'ils ont été commis au cours d'un conflit armé, de caractère international ou interne, et dirigés contre une population civile quelle qu'elle soit:
a) Assassinat;
b) Extermination;
c) Réduction en esclavage;
d) Expulsion;
e) Emprisonnement;
f) Torture;
g) Viol;
h) Persécutions pour des raisons politiques, raciales et religieuses;
i) Autres actes inhumains.



Article 6


Compétence ratione personae

Le Tribunal international a compétence à l'égard des personnes physiques conformément aux dispositions du présent statut.



Article 7


Responsabilité pénale individuelle

1. Quiconque a planifié, incité à commettre, ordonné, commis ou de toute autre manière aidé et encouragé à planifier, préparer ou exécuter un crime visé aux articles 2 à 5 du présent statut est individuellement responsable dudit crime.
2. La qualité officielle d'un accusé, soit comme chef d'Etat ou de Gouvernement, soit comme haut fonctionnaire, ne l'exonère pas de sa responsabilité pénale et n'est pas un motif de diminution de la peine.
3. Le fait que l'un quelconque des actes visés aux articles 2 à 5 du présent statut a été commis par un subordonné ne dégage pas son supérieur de sa reponsabilité pénale s'il savait ou avait des raisons de savoir que le subordonné s'apprêtait à commettre cet acte ou l'avait fait et que le supérieur n'a pas pris les mesures nécessaires et raisonnables pour empêcher que ledit acte ne soit commis ou en punir les auteurs.
4. Le fait qu'un accusé a agi en exécution d'un ordre d'un gouvernement ou d'un supérieur ne l'exonère pas de sa responsabilité pénale mais peut être considéré comme un motif de diminution de peine si le Tribunal international l'estime conforme à la justice.



Article 8


Compétence ratione loci et compétence ratione temporis

La compétence ratione loci du Tribunal international s'étend au territoire de l'ancienne République fédérative socialiste de Yougoslavie, y compris son espace terrestre, son espace aérien et ses eaux territoriales. La compétence ratione temporis du Tribunal international s'étend à la période commençant le 1er janvier 1991.



Article 9


Compétences concurrentes

1. Le Tribunal international et les juridictions nationales sont concurremment compétents pour juger les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie depuis le 1er janvier 1991.
2. Le Tribunal international a la primauté sur les juridictions nationales. A tout stade de la procédure, il peut demander officiellement aux juridictions nationales de se dessaisir en sa faveur conformément au présent statut et à son règlement.



Article 10


Non bis in idem

1. Nul ne peut être traduit devant une juridiction nationale pour des faits constituant de graves violations du droit international humanitaire au sens du présent statut s'il a déjà été jugé par le Tribunal international pour ces mêmes faits.
2. Quiconque a été traduit devant une juridiction nationale pour des faits constituant de graves violations du droit international humanitaire ne peut subséquemment être traduit devant le Tribunal international que si:
a) Le fait pour lequel il a été jugé était qualifié crime de droit commun;
ou b) La juridiction nationale n'a pas statué de façon impartiale ou indépendante, la procédure engagée devant elle visait à soustraire l'accusé à sa responsabilité pénale internationale, ou la poursuite n'a pas été exercée avec diligence.
3. Pour décider de la peine à infliger à une personne condamnée pour un crime visé par le présent statut, le Tribunal international tient compte de la mesure dans laquelle cette personne a déjà purgé toute peine qui pourrait lui avoir été infligée par une juridiction nationale pour le même fait.



Article 11


Organisation du Tribunal international

Le Tribunal international comprend les organes suivants:
a) Les chambres, soit deux chambres de première instance et une chambre d'appel;
b) Le procureur; et c) Un greffe commun aux chambres et au procureur.



Article 12


Composition des chambres

Les chambres sont composées de 11 juges indépendants, ressortissants d'Etats différents et dont:
a) Trois siègent dans chacune des chambres de première instance; et b) Cinq siègent à la chambre d'appel.



Article 13


Qualification et élection des juges

1. Les juges doivent être des personnes de haute moralité, impartialité et intégrité possédant les qualifications requises, dans leurs pays respectifs, pour être nommés aux plus hautes fonctions judiciaires. Il est dûment tenu compte dans la composition globale des chambres de l'expérience des juges en matière de droit pénal et de droit international, notamment de droit international humanitaire et des droits de l'homme.
2. Les juges du Tribunal international sont élus par l'assemblée générale sur une liste présentée par le Conseil de sécurité, selon les modalités ci-après:
a) Le secrétaire général invite les Etats membres de l'Organisation des Nations Unies et les Etats non membres ayant une mission d'observation permanente au siège de l'organisation à présenter des candidatures;
b) Dans un délai de soixante jours à compter de la date de l'invitation du secrétaire général, chaque Etat peut présenter la candidature d'au maximum deux personnes réunissant les conditions indiquées au paragraphe 1 ci-dessus et n'ayant pas la même nationalité;
c) Le secrétaire général transmet les candidatures au Conseil de sécurité.
Sur la base de ces candidatures, le conseil dresse une liste de 22 candidats au minimum et 33 candidats au maximum en tenant dûment compte de la nécessité d'assurer une représentation adéquate des principaux systèmes juridiques au monde;
d) Le président du Conseil de sécurité transmet la liste de candidats au président de l'assemblée générale. L'assemblée élit sur cette liste les 11 juges du tribunal international. Sont élus les candidats qui ont obtenu la majorité absolue des voix des Etats membres de l'Organisation des Nations Unies et des Etats non membres ayant une mission d'observation permanente au siège de l'organisation. Si deux candidats de la même nationalité obtiennent la majorité requise, est élu celui sur lequel s'est porté le plus grand nombre de voix.
3. Si un siège à l'une des chambres devient vacant, le secrétaire général,
après avoir consulté les présidents du Conseil de sécurité et de l'assemblée générale, nomme une personne réunissant les conditions indiquées au paragraphe 1 ci-dessus pour siéger jusqu'à l'expiration du mandat de son prédécesseur.
4. Les juges sont élus pour un mandat de quatre ans. Leurs conditions d'emploi sont celles des juges de la Cour internationale de justice. Ils sont rééligibles.



Article 14


Constitution du bureau et des chambres

1. Les juges du Tribunal international élisent un président.
2. Le président du Tribunal international doit être membre de la chambre d'appel qu'il préside.
3. Après les avoir consultés, le président nomme les juges du Tribunal international soit à la chambre d'appel soit à l'une des chambres de première instance. Les juges ne siègent qu'à la chambre à laquelle ils ont été nommés. 4. Les juges de chaque chambre de première instance choisissent un président qui conduit toutes les procédures devant cette chambre.



Article 15


Règlement du tribunal

Les juges du Tribunal international adopteront un règlement qui régira la phase préalable à l'audience, l'audience et les recours, la recevabilité des preuves, la protection des victimes et des témoins et d'autres questions appropriées.



Article 16


Le Procureur

1. Le Procureur est responsable de l'instruction des dossiers et de l'exercice de la poursuite contre les auteurs de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie depuis le 1er janvier 1991.
2. Le Procureur, qui est un organe distinct au sein du Tribunal international, agit en toute indépendance. Il ne sollicite ni ne reçoit d'instructions d'aucun gouvernement ni d'aucune autre source.
3. Le bureau du Procureur se compose du Procureur et du personnel qualifié qui peut être nécessaire.
4. Le Procureur est nommé par le Conseil de sécurité sur proposition du secrétaire général. Il doit être de haute moralité, d'une compétence notoire et avoir une solide expérience de l'instruction des affaires criminelles et de la poursuite. Son mandat est de quatre ans, il est rééligible. Ses conditions d'emploi sont celles d'un secrétaire général adjoint de l'Organisation des Nations Unies.
5. Le personnel du bureau du Procureur est nommé par le secrétaire général sur recommandation du Procureur.



Article 17


Le greffe

1. Le greffe est chargé d'assurer l'administration et les services du Tribunal international.
2. Le greffe se compose d'un greffier et des autres personnels nécessaires; 3. Le greffier est désigné par le secrétaire général après consultation du président du Tribunal international pour un mandat de quatre ans renouvelable. Les conditions d'emploi sont celles d'un sous-secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.
4. Le personnel du greffe est nommé par le secrétaire général sur recommandation du greffier.



Article 18


Information et établissement de l'acte d'accusation

1. Le Procureur ouvre une information d'office ou sur la foi des renseignements obtenus de toutes sources, notamment des gouvernements, des organes de l'Organisation des Nations Unies, des organisations intergouvernementales et non gouvernementales. Il évalue les renseignements reçus ou obtenus et se prononce sur l'opportunité ou non d'engager les poursuites.
2. Le Procureur est habilité à interroger les suspects, les victimes et les témoins, à réunir des preuves et à procéder sur place à des mesures d'instruction. Dans l'exécution de ces tâches, le Procureur peut, selon que de besoin, solliciter le concours des autorités de l'Etat concerné.
3. Tout suspect interrogé a le droit d'être assisté d'un conseil de son choix, y compris celui de se voir attribuer d'office un défenseur, sans frais, s'il n'a pas les moyens de le rémunérer et de bénéficier, si nécessaire, de services de traduction dans une langue qu'il parle et comprend et à partir de cette langue.
4. S'il décide qu'au vu des présomptions, il y a lieu d'engager des poursuites, le Procureur établit un acte d'accusation dans lequel il expose succinctement les faits et le crime ou les crimes qui sont reprochés à l'accusé en vertu du statut. L'acte d'accusation est transmis à un juge de la chambre de première instance.



Article 19


Examen de l'acte d'accusation

1. Le juge de la chambre de première instance saisi de l'acte d'accusation examine celui-ci. S'il estime que le Procureur a établi qu'au vu des présomptions, il y a lieu d'engager des poursuites, il confirme l'acte d'accusation. A défaut, il le rejette.
2. S'il confirme l'acte d'accusation, le juge saisi, sur réquisition du Procureur, décerne les ordonnances et mandats d'arrêt, de détention, d'amener ou de remise de personnes et toutes autres ordonnances nécessaires pour la conduite du procès.



Article 20


Ouverture et conduite du procès

1. La chambre de première instance veille à ce que le procès soit équitable et rapide et à ce que l'instance se déroule conformément aux règles de procédure et de preuve, les droits de l'accusé étant pleinement respectés et la protection des victimes dûment assurée.
2. Toute personne contre laquelle un acte d'accusation a été confirmé est,
conformément à une ordonnance ou un mandat d'arrêt décerné par le Tribunal international, placée en état d'arrestation, immédiatement informée des chefs d'accusation portés contre elle et déférée au Tribunal international.
3. La chambre de première instance donne lecture de l'acte d'accusation,
s'assure que les droits de l'accusé sont respectés, confirme que l'accusé a compris le contenu de l'acte d'accusation et lui ordonne de plaider coupable ou non coupable. La chambre de première instance fixe alors la date du procès.
4. Les audiences sont publiques à moins que la chambre de première instance décide de les tenir à huis clos conformément à ses règles de procédure et de preuve.



Article 21


Les droits de l'accusé

1. Tous sont égaux devant le Tribunal international.
2. Toute personne contre laquelle des accusations sont portées a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement, sous réserve des dispositions de l'article 22 du statut.
3. Toute personne accusée est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été établie conformément aux dispositions du présent statut. 4.Toute personne contre laquelle une accusation est portée en vertu du présent statut a droit, en pleine égalité, au moins aux garanties suivantes: a) A être informée, dans le plus court délai, dans une langue qu'elle comprend et de façon détaillée, de la nature et des motifs de l'accusation portée contre elle;
b) A disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense et à communiquer avec le conseil de son choix;
c) A être jugée sans retard excessif;
d) A être présente au procès et à se défendre elle-même ou à avoir l'assistance d'un défenseur de son choix; si elle n'a pas de défenseur, à être informée de son droit d'en avoir un, et, chaque fois que l'intérêt de la justice l'exige, à se voir attribuer d'office un défenseur, sans frais, si elle n'a pas les moyens de le rémunérer;
e) A interroger ou faire interroger les témoins à charge et à obtenir la comparution et l'interrogatoire des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge;
f) A se faire assister gratuitement d'un interprète si elle ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l'audience;
g) A ne pas être forcée de témoigner contre elle-même ou de s'avouer coupable.



Article 22


Protection des victimes et des témoins

Le Tribunal international prévoit dans ses règles de procédure et de preuve des mesures de protection des victimes et des témoins. Les mesures de protection comprennent, sans y être limitées, la tenue d'audience à huis clos et la protection de l'identité des victimes.



Article 23


Sentence

1. La chambre de première instance prononce des sentences et impose des peines et sanctions à l'encontre des personnes convaincues de violations graves du droit international humanitaire.
2. La sentence est rendue en audience publique à la majorité des juges de la chambre de première instance. Elle est établie par écrit et motivée, des opinions individuelles ou dissidentes pouvant y être jointes.



Article 24


Peines

1. La chambre de première instance n'impose que des peines d'emprisonnement. Pour fixer les conditions de l'emprisonnement, la chambre de première instance a recours à la grille générale des peines d'emprisonnement appliquée par les tribunaux de l'ex-Yougoslavie.
2. En imposant toute peine, la chambre de première instance tient compte de facteurs tels que la gravité de l'infraction et la situation personnelle du condamné.
3. Outre l'emprisonnement du condamné, la chambre de première instance peut ordonner la restitution à leurs propriétaires légitimes de tous biens et ressources acquis par des moyens illicites, y compris par la contrainte.



Article 25


Appel

1. La chambre d'appel connaît des recours introduits soit par les personnes condamnées par les chambres de première instance, soit par le procureur, pour les motifs suivants:
a) Erreur sur un point de droit qui invalide la décision; ou b) Erreur de fait qui a entraîné un déni de justice.
2. La chambre d'appel peut confirmer, annuler ou réviser les décisions des chambres de première instance.



Article 26


Révision

S'il est découvert un fait nouveau qui n'était pas connu au moment du procès en première instance ou en appel et qui aurait pu être un élément décisif de la décision, le condamné ou le procureur peut saisir le tribunal d'une demande en révision de la sentence.



Article 27


Exécution des peines

La peine d'emprisonnement est subie dans un Etat désigné par le tribunal sur la liste des Etats qui ont fait savoir au Conseil de sécurité qu'ils étaient disposés à recevoir des condamnés. La réclusion est soumise aux règles nationales de l'Etat concerné, sous le contrôle du Tribunal international.



Article 28


Grâce et commutation de peine

Si le condamné peut bénéficier d'une grâce ou d'une commutation de peine en vertu des lois de l'Etat dans lequel il est emprisonné, cet Etat en avise le tribunal. Le président du tribunal, en consultation avec les juges, tranche selon les intérêts de la justice et les principes généraux du droit.



Article 29


Coopération et entraide judiciaire

1. Les Etats collaborent avec le tribunal à la recherche et au jugement des personnes accusées d'avoir commis des violations graves du droit international humanitaire.
2. Les Etats répondent sans retard à toute demande d'assistance ou à toute ordonnance émanant d'une chambre de première instance et concernant, sans s'y limiter:
a) L'identification et la recherche des personnes;
b) La réunion des témoignages et la production des preuves;
c) L'expédition des documents;
d) L'arrestation ou la détention des personnes;
e) Le transfert ou la traduction de l'accusé devant le tribunal.



Article 30


Statut, privilèges et immunités


du Tribunal international

1. La Convention sur les privilèges et immunités des Nations Unies en date du 13 février 1946 s'applique au Tribunal international, aux juges, au Procureur et à son personnel ainsi qu'au greffier et à son personnel.
2. Les juges, le Procureur et le greffier jouissent des privilèges et immunités, des exemptions et des facilités accordés aux agents diplomatiques, conformément au droit international.
3. Le personnel du procureur et du greffier jouit des privilèges et immunités accordés aux fonctionnaires des Nations Unies en vertu des articles V et VII de la Convention visée au paragraphe 1 du présent article.
4. Les autres personnes, y compris les accusés, dont la présence est requise au siège du Tribunal international bénéficient du traitement nécessaire pour assurer le bon fonctionnement du Tribunal international.



Article 31


Siège du Tribunal international

Le Tribunal international a son siège à La Haye.



Article 32


Dépenses du Tribunal international

Les dépenses du Tribunal international sont imputées sur le budget ordinaire de l'Organisation des Nations Unies conformément à l'article 17 de la Charte des Nations Unies.



Article 33


Langues de travail

Les langues de travail du Tribunal international sont l'anglais et le français.



Article 34


Rapport annuel

Le président du Tribunal international présente chaque année un rapport du Tribunal international au Conseil de sécurité et à l'assemblée générale.





A N N E X E I I I


REGLEMENT DE PROCEDURE


ET DE PREUVE DU TRIBUNAL INTERNATIONAL



CHAPITRE Ier


Dispositions générales



Article 1er


Entrée en vigueur

Le présent règlement de procédure et de preuve, adopté conformément aux dispositions de l'article 15 du statut du tribunal, entre en vigueur le 14 mars 1994.



Article 2


Définitions

(A) Sauf incompatibilité tenant au contexte, les expressions suivantes signifient:
Règlement: le règlement visé à l'article 1er ci-dessus;
Statut: le statut du tribunal adopté par le Conseil de sécurité dans sa résolution 827 du 25 mai 1993;
Tribunal: le Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie depuis 1991, créé par le Conseil de sécurité dans sa résolution 827 (1993);
Accusé: toute personne physique faisant l'objet d'un acte d'accusation conformément à l'article 47 ci-après;
Arrestation: l'acte par lequel une autorité nationale appréhende et place en garde à vue un suspect ou un accusé;
Enquête: tous les actes accomplis par le procureur conformément au statut et au règlement afin de rassembler des informations et des éléments de preuve;
Partie: le procureur ou l'accusé;
Président: le président du tribunal;
Procureur: le procureur nommé conformément à l'article 16 du statut;
Suspect: toute personne physique au sujet de laquelle le procureur possède des informations qui tendent à montrer qu'elle aurait commis une infraction relevant de la compétence du tribunal;
Victime: toute personne physique à l'égard de laquelle aurait été commise une infraction relevant de la compétence du tribunal.
(B) Aux fins du présent règlement, l'emploi du masculin et du singulier comprend le féminin et le pluriel et inversement.



Article 3


Emploi des langues

(A) Les langues de travail du tribunal sont le français et l'anglais.
(B) L'accusé a le droit de parler sa propre langue.
(C) Toute autre personne comparaissant devant le tribunal peut, sous réserve du paragraphe (D) du présent article, employer sa propre langue si elle n'a pas une connaissance suffisante de l'une ou l'autre des deux langues de travail.
(D) Le conseil de l'accusé peut demander au président d'une chambre l'autorisation d'employer une langue autre que les deux langues de travail ou celle de l'accusé. Si une telle autorisation est accordée, les frais d'interprétation et de traduction sont pris en charge par le tribunal dans les limites éventuellement fixées par le président compte tenu des droits de la défense et de l'intérêt de la justice.
(E) Le greffier prend les dispositions voulues pour assurer la traduction des pièces et l'interprétation des débats dans les langues de travail.



Article 4


Réunions hors le siège du tribunal

Une chambre peut, avec l'autorisation du président, exercer ses fonctions hors le siège du tribunal si l'intérêt de la justice le commande.



Article 5


Effet d'une violation du règlement

Toute exception soulevée par une partie à l'égard d'un acte d'une autre partie et fondée sur une violation du règlement doit l'être dès que possible; elle n'est accueillie et l'acte déclaré nul que si ce dernier est incompatible avec les principes fondamentaux de l'équité et a entraîné effectivement un mauvais fonctionnement de la justice.



Article 6


Modification du règlement

(A) Tout article du règlement peut être modifié à la demande d'un juge, du procureur ou du greffier. Une réunion plénière est convoquée à cet effet.
Chaque juge reçoit communication de la proposition de modification. Celle-ci est adoptée par un vote favorable de sept juges au moins.
(B) S'il n'est pas procédé comme prévu au paragraphe (A) ci-dessus, les modifications du règlement ne peuvent être adoptées qu'à l'unanimité.
(C) Les modifications entrent en vigueur immédiatement, sans préjudice du respect des droits de l'accusé dans les affaires en instance.



Article 7


Textes authentiques

Les textes en français et en anglais du règlement font également foi. En cas de divergence, le texte qui reflète le plus fidèlement l'esprit du statut et du règlement prévaut.



CHAPITRE II


Primauté du tribunal



Article 8


Demande d'information

Lorsqu'il apparaît au procureur qu'une infraction relevant de la compétence du tribunal fait ou a fait l'objet d'enquêtes ou de poursuites pénales devant une institution judiciaire nationale, il peut demander à l'Etat dont relève cette institution de lui transmettre toutes les informations pertinentes.
L'Etat transmet sans délai au procureur ces informations, en application du paragraphe 1 de l'article 29 du statut.



Article 9


Requête du procureur aux fins de dessaisissement

S'il apparaît au procureur, au vu des enquêtes ou poursuites pénales engagées devant une institution judiciaire nationale comme cela est prévu à l'article 8 ci-dessus, que:
i) L'infraction a reçu une qualification de droit commun; ou
ii) La procédure engagée ne serait ni impartiale ni indépendante,
viserait à soustraire l'accusé à sa responsabilité pénale internationale ou n'aurait pas été exercée avec diligence; ou
iii) L'objet de la procédure porte sur des faits ou des points de droit
qui ont une incidence sur des enquêtes ou des poursuites en cours devant le tribunal,
le procureur peut saisir la chambre de première instance désignée à cet effet par le président d'une requête aux fins de demander officiellement le dessaisissement de l'institution judiciaire nationale en faveur du tribunal.


Article 10


Demande officielle de dessaisissement

(A) S'il apparaît à la chambre de première instance saisie d'une telle requête de la part du procureur qu'elle est fondée conformément à l'article 9 ci-dessus, la chambre de première instance peut demander officiellement à l'Etat dont relève l'institution judiciaire nationale que celle-ci se dessaisisse en faveur du tribunal.
(B) La demande de dessaisissement porte également sur la transmission des éléments d'enquête, des copies du dossier d'audience et, le cas échéant,
d'une expédition du jugement.
(C) Lorsque le dessaisissement a été demandé par une chambre de première instance, toute procédure ultérieure est portée devant l'autre chambre de première instance.



Article 11


Non-respect d'une demande officielle de dessaisissement

Si, dans un délai de soixante jours à compter de la date à laquelle le greffier a notifié la demande de dessaisissement à l'Etat dont relève l'institution judiciaire ayant connu de l'affaire dont il s'agit, l'Etat ne fournit pas à la chambre de première instance l'assurance qu'il a pris ou entend prendre les mesures voulues pour se conformer à cette demande, la chambre peut prier le président de soumettre la question au Conseil de sécurité.



Article 12


Décisions des juridictions nationales

Sous réserve du paragraphe 2 de l'article 10 du statut, les décisions des juridictions nationales ne lient pas le tribunal.



Article 13


Non bis in idem

Si le président est valablement informé de poursuites pénales engagées contre une personne devant une institution judiciaire nationale pour une infraction pour laquelle l'intéressé a déjà été jugé par le tribunal, une chambre de première instance rend conformément à la procédure visée à l'article 10, mutatis mutandis, une ordonnance motivée, invitant l'institution judiciaire nationale à mettre fin définitivement aux poursuites. Si l'institution judiciaire nationale s'y refuse, le président peut soumettre la question au Conseil de sécurité.



CHAPITRE III


Organisation du tribunal



Section 1


Les juges



Article 14


Déclaration solennelle

(A) Avant de prendre ses fonctions, chaque juge fait la déclaration solennelle suivante:
<< Je déclare solennellement que je remplirai mes devoirs et exercerai mes attributions de juge du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie depuis 1991 en tout honneur et dévouement, en pleine et parfaite impartialité et en toute conscience. >> (B) Le texte de cette déclaration, signé par le juge en présence du secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies ou de son représentant, est versé aux archives du tribunal.



Article 15


Récusation et empêchement de juges

(A) Un juge ne peut connaître en première instance ou en appel d'une affaire dans laquelle il a un intérêt personnel ou avec laquelle il a ou il a eu un lien quelconque de nature à porter atteinte à son impartialité. En ce cas, il doit se récuser dans cette affaire et le président désigne un autre juge pour siéger à sa place.
(B) Toute partie peut solliciter du président de la chambre qu'un juge de cette chambre soit dessaisi d'une affaire pour les raisons ci-dessus énoncées. Après que le président de la chambre en a conféré avec le juge concerné, le bureau statue si nécessaire. Si le bureau donne suite à la demande, le président désigne un autre juge pour remplacer le juge dessaisi. (C) Le juge d'une chambre de première instance qui examine un acte d'accusation conformément à l'article 19 du statut et à l'article 47 du règlement ne peut siéger à la chambre appelée à juger ultérieurement l'accusé.
(D) Aucun membre de la chambre d'appel ne peut connaître en cette qualité d'une affaire dont il a eu à connaître en première instance.
(E) Si, pour une raison quelconque, un membre d'une chambre est empêché de siéger à l'instance, le président de la chambre peut, si l'empêchement semble devoir être de courte durée, surseoir à la procédure; dans le cas contraire, il en rend compte au président, lequel peut désigner un autre juge et ordonner soit la réouverture des débats, soit, si l'accusé y consent, la poursuite des débats.



Article 16


Démission

La démission d'un juge est adressée par écrit au président pour être transmise au secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.



Article 17


Préséance

(A) Tous les juges sont égaux dans l'exercice de leurs fonctions judiciaires, quels que soient la date de leur élection ou de leur nomination, leur âge ou la durée des fonctions déjà exercées.
(B) Après le président et le vice-président, les présidents des chambres de première instance prennent rang entre eux selon l'ancienneté d'âge.
(C) Les juges élus ou nommés à des dates différentes prennent rang selon la date de leur élection ou de leur nomination; les juges élus ou nommés à la même date prennent rang entre eux selon l'ancienneté d'âge.
(D) En cas de réélection, il est tenu compte de la durée totale des fonctions déjà exercées par le juge intéressé.



Section 2


Présidence du tribunal



Article 18


Election du président

(A) Le président est élu pour une période de deux ans, dès lors que cette période ne dépasse pas sa durée de fonctions en tant que juge. Le président est rééligible une fois.
(B) Si le président cesse d'être membre du tribunal ou démissionne avant l'expiration normale de son mandat, les juges du tribunal élisent parmi eux son successeur pour le reste de son mandat.
(C) Le président est élu à la majorité des juges du tribunal. Si aucun juge ne recueille la majorité, il est procédé à un nouveau tour de scrutin entre les deux juges qui ont obtenu le plus de voix. En cas de partage des voix au second tour, est élu le juge qui a préséance conformément à l'article 17 ci-dessus.



Article 19


Fonctions du président

Le président préside toutes les réunions plénières du tribunal, coordonne les travaux des chambres, contrôle les activités du greffe et s'acquitte de toutes les autres fonctions qui lui sont confiées par le statut et par le règlement.



Article 20


Le vice-président

(A) Le vice-président est élu pour une période de deux ans, dès lors que cette période ne dépasse pas sa durée de fonctions en tant que juge. Le vice-président est rééligible une fois.
(B) Le vice-président peut être membre d'une chambre de première instance ou de la chambre d'appel.
(C) Les dispositions prévues aux paragraphes (B) et (C) de l'article 18 s'appliquent mutatis mutandis au vice-président.



Article 21


Fonctions du vice-président

Sous réserve du paragraphe (B) de l'article 22 ci-après, le vice-président exerce les fonctions du président si celui-ci est absent ou empêché.



Article 22


Remplacement du président et du vice-président

(A) Si le président et le vice-président sont l'un et l'autre empêchés d'exercer la présidence, celle-ci est assurée par le juge doyen conformément à l'article 17 ci-dessus.
(B) Si le président est empêché d'assurer la présidence de la chambre d'appel, celle-ci élit son président parmi ses membres.



Section 3


Fonctionnement interne du tribunal



Article 23


Le bureau

(A) Le bureau est constitué du président, du vice-président et des présidents des chambres de première instance.
(B) Le président consulte les autres membres du bureau au sujet de toutes les questions importantes liées au fonctionnement du tribunal.
(C) Tout juge peut appeler l'attention d'un membre du bureau sur les questions qui méritent à son avis d'être examinées par le bureau ou d'être soumises à une réunion plénière du tribunal.



Article 24


Réunions plénières du tribunal

Les juges se réunissent en plénière pour:
(i) L'élection du président et du vice-président;
(ii) L'adoption et la modification du règlement;


(iii) L'adoption du rapport annuel prévu à l'article 34 dustatut;


(iv) L'adoption de décisions sur les questions liées au fonctionnement
interne des chambres et du tribunal;


(v) La détermination ou le contrôle des conditions dedétention;


(vi) L'accomplissement de toute autre tâche prévue dans le statut ou le
règlement.



Article 25


Sessions plénières

(A) En principe, le tribunal arrête au mois de juillet les dates et la durée de ses sessions plénières ordinaires pour l'année civilesuivante.
(B) Si au moins six juges le demandent, le président doit convoquer d'autres sessions plénières; il peut aussi en convoquer dans tous les cas où l'exigent les fonctions que lui confèrent le statut ou le règlement.



Article 26


Quorum et vote

(A) Un quorum de sept juges est requis pour chaque réunion plénière du tribunal.
(B) Sous réserve des dispositions des paragraphes (A) et (B) de l'article 6 ci-dessus et des paragraphes (B) et (C) de l'article 18 ci-dessus, les décisions adoptées par le tribunal en plénière sont prises à la majorité des juges présents. En cas de partage égal des voix, celle du président ou du juge faisant fonction est prépondérante.



Section 4


Les chambres



Article 27


Roulement des juges

(A) L'affectation des juges aux chambres de première instance et à la chambre d'appel se fait par roulement périodique, compte tenu de la nécessité d'assurer la bonne expédition des affaires.
(B) Les juges prennent leurs fonctions à la chambre à laquelle ils sont affectés dès que le président le juge opportun, compte tenu de la nécessité d'expédier des affaires en instance.
(C) Le président peut à tout moment affecter temporairement un membre d'une chambre de première instance ou de la chambre d'appel à une autre chambre.



Article 28


Affectation aux fins de l'examen


des actes d'accusation

Au mois de juillet de chaque année et après avoir consulté les juges, le président désigne pour chaque mois de l'année civile à venir le juge d'une chambre de première instance auquel les actes d'accusation seront transmis pour examen conformément à l'article 47 ci-après et en publie la liste.



Article 29


Délibéré

Les délibérations des chambres sont et demeurent secrètes.



Section 5


Le greffe



Article 30


Nomination du greffier

Avant de donner son avis au secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies conformément au paragraphe 3 de l'article 17 du statut, le président recueille l'opinion des juges au sujet des candidats à la fonction de greffier.



Article 31


Nomination du greffier adjoint


et du personnel du greffe

Après avoir consulté le bureau, le greffier recommande au secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies la personne à nommer aux fonctions de greffier adjoint ainsi que les autres membres du personnel du greffe.



Article 32


Déclaration solennelle

(A) Avant son entrée en fonctions, le greffier fait devant le président la déclaration suivante:
<< Je déclare solennellement que je remplirai en toute loyauté, discrétion et conscience les devoirs qui m'incombent en ma qualité de greffier du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie depuis 1991 et que j'observerai fidèlement toutes les prescriptions du statut et du règlement du tribunal. >> (B) Le greffier adjoint fait devant le président une déclaration semblable avant son entrée en fonctions.
(C) Tout membre du personnel du greffe fait une déclaration semblable devant le greffier.



Article 33


Fonctions du greffier

Le greffier apporte son concours aux chambres et lors des réunions plénières du tribunal ainsi qu'aux juges et au procureur dans l'exercice de leurs fonctions. Sous l'autorité du président, il est responsable de l'administration et du service du tribunal et est chargé de toute communication émanant du tribunal ou adressée à celui-ci.



Article 34


Division d'aide aux victimes et aux témoins

(A) Il est créé auprès du greffier une division d'aide aux victimes et aux témoins, composée d'un personnel qualifié et chargée de:


(i) Recommander l'adoption de mesures de protection des victimes et des
témoins conformément à l'article 22 du statut;


(ii) Fournir conseils et assistance aux victimes et aux témoins,
particulièrement en cas de viols et violences sexuelles.
(B) Il est dûment tenu compte, lors de la nomination du personnel de la division, de la nécessité d'y employer des femmes ayant une formation spécialisée.



Article 35


Procès-verbaux

Hormis les cas de compte rendu intégral prévu à l'article 81 ci-après, le greffier ou les fonctionnaires du greffe désignés par lui établissent les procès-verbaux des réunions plénières du tribunal et des audiences des chambres, à l'exception des délibérations à huis clos.



Article 36


Répertoire général

Le greffier tient un répertoire général indiquant, pour chaque affaire portée devant le tribunal, tous les renseignements pertinents. Le répertoire général est ouvert au public.



Section 6


Le procureur



Article 37


Fonctions du procureur

(A) Le procureur remplit toutes les fonctions prévues par le statut conformément au règlement et au règlement intérieur du bureau du procureur.
(B) Les pouvoirs du procureur tels que définis aux chapitres IV à VIII du règlement peuvent être exercés par le personnel du bureau du procureur qu'il autorise à cette fin ou par toute personne mandatée par lui à cet effet.



Article 38


Procureur adjoint

(A) Le procureur recommande au secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies la personne à nommer aux fonctions de procureur adjoint.
(B) Le procureur adjoint remplit les fonctions du procureur en cas d'absence ou d'incapacité ou sur instructions formelles du procureur.



CHAPITRE IV


Enquêtes et droits des suspects



Section 1


Enquêtes



Article 39


Déroulement des enquêtes

Aux fins de ses enquêtes, le procureur est habilité à:


(i) Convoquer et interroger les suspects, entendre les victimes et les
témoins, enregistrer leurs déclarations, recueillir tous éléments de preuve et enquêter sur les lieux;


(ii) Prendre toutes autres mesures jugées nécessaires aux fins de
l'enquête et aux fins de soutenir l'accusation au procès;


(iii) Obtenir à ces fins l'aide de toute autorité nationale compétente,
ainsi que tout organisme international, y compris l'Organisation internationale de police criminelle (Interpol);


(iv) Solliciter d'une chambre de première instance ou d'un juge le
prononcé de toute ordonnance nécessaire.



Article 40


Mesures conservatoires

En cas d'urgence le procureur peut demander à tout Etat:


(i) De procéder à l'arrestation et au placement en garde à vue d'un
suspect;
(ii) De saisir tous éléments de preuves matériels;


(iii) De prendre toute mesure nécessaire pour empêcher l'évasion du
suspect ou de l'accusé, l'intimidation ou les atteintes à l'intégrité physique des victimes ou des témoins, ou la destruction d'éléments de preuve.


Article 41


Conservation des informations

Le procureur est responsable de la conservation, la garde et la sécurité des informations et des éléments de preuve matériels recueillis au cours des enquêtes.



Article 42


Droits du suspect pendant l'enquête

(A) Avant d'être interrogé par le procureur, le suspect est informé de ses droits dans une langue qu'il parle et comprend, à savoir:


(i) Son droit à l'assistance d'un conseil de son choix ou s'il est
indigent à la commission d'office d'un conseil à titre gratuit; et
(ii) Son droit à l'assistance gratuite d'un interprète s'il ne comprend
pas ou ne parle pas la langue utilisée lors de l'interrogatoire.
(B) L'interrogatoire d'un suspect ne peut avoir lieu qu'en présence de son conseil, à moins que le suspect n'ait renoncé à son droit à l'assistance d'un conseil. L'interrogatoire doit néanmoins cesser si un suspect, qui a initialement renoncé à son droit à l'assistance d'un conseil, s'en prévaut ultérieurement; l'interrogatoire ne doit reprendre que lorsque le suspect a obtenu de son chef ou d'office l'assistance d'un conseil.



Article 43


Enregistrement des interrogatoires des suspects

Le procureur ne peut interroger un suspect que si l'interrogatoire est enregistré sur bande magnétique ou sur vidéocassette selon les modalités suivantes:


(i) Le suspect est informé, dans une langue qu'il parle et comprend, de
ce que l'interrogatoire est enregistré sur bande magnétique ou sur vidéocassette;


(ii) Si l'interrogatoire est suspendu, l'heure de la suspension et celle
de la reprise de l'interrogatoire sont respectivement mentionnées dans l'enregistrement avant qu'il n'y soit procédé;


(iii) A la fin de l'interrogatoire, il est donné au suspect la
possibilité de préciser ou de compléter toutes ses déclarations; l'heure de la fin de l'interrogatoire est alors mentionnée dans l'enregistrement; et
(iv) La teneur de l'enregistrement est transcrite et copie du texte de
la transcription est remise au suspect; copie de l'enregistrement ou, s'il a été utilisé un appareil d'enregistrements multiples, l'une des bandes originales, est également remise au suspect.


(v) La bande originale de l'enregistrement ou l'une d'entre elles est
placée en présence du suspect, après copie faite si nécessaire de l'enregistrement aux fins de transcription, sous scellés contresignés par lui-même et par le procureur.



Section 2


Du conseil



Article 44


Mandat et qualification

Le conseil choisi par un suspect ou un accusé dépose dès que possible son mandat auprès du greffier. Sous réserve de vérification par le greffier, tout conseil est considéré comme qualifié pour représenter un suspect ou un accusé dès lors qu'il est habilité à exercer la profession d'avocat dans un Etat ou est professeur de droit dans une université.



Article 45


Commission d'office d'un conseil

(A) Le greffier tient une liste des conseils parlant au moins une des deux langues de travail du tribunal et remplissant les conditions visées à l'article 44 ci-dessus, qui en outre ont fait savoir qu'ils accepteraient d'être commis d'office par le tribunal pour représenter un suspect ou un accusé indigent.
(B) Les critères de l'indigence sont déterminés par le greffier et approuvés par les juges du tribunal.
(C) Un conseil est commis d'office pour représenter un suspect ou un accusé indigent conformément à la procédure suivante:


(i) Une demande aux fins de commission d'un conseil doit être présentée
au greffier;


(ii) Le greffier doit s'enquérir des moyens financiers du suspect ou de
l'accusé et apprécier si les critères d'indigence sont réunis;


(iii) Dans l'affirmative, il commet un conseil choisi sur la liste; dans
le cas contraire, il en informe l'intéressé.
(D) En cas de rejet de la demande, le suspect ou l'accusé peut soumettre au greffier une nouvelle demande motivée par un changement de circonstances.
(E) Le greffier commet d'office un conseil pour représenter un suspect ou un accusé qui n'en a pas ou qui n'a pas sollicité la commission d'un conseil,
sauf si le suspect ou l'accusé indique par écrit qu'il a décidé d'assurer lui-même sa défense.
(F) Le greffier en consultation avec les juges détermine le tarif des honoraires à verser au conseil commis d'office.



Article 46


Discipline

(A) Une chambre peut, après un rappel à l'ordre resté sans effet, refuser d'entendre un conseil si elle considère que son comportement est offensant ou entrave le bon déroulement de l'audience.
(B) Un juge ou une chambre de première instance peut, avec l'accord du président, signaler tout manquement du conseil à l'ordre des avocats dans le pays où il est admis à l'exercice de sa profession ou, si l'intéressé est professeur et n'est pas avocat, à l'université dont il relève.



CHAPITRE V


Mise en accusation



Section 1


L'acte d'accusation



Article 47


Présentation de l'acte d'accusation par le procureur

(A) Lorsque l'enquête permet au procureur d'établir qu'il existe des éléments de preuve suffisants pour soutenir raisonnablement qu'un suspect a commis une infraction relevant de la compétence du tribunal, le procureur établit et transmet au greffier pour confirmation par un juge un acte d'accusation auquel il joint tous les éléments justificatifs.
(B) L'acte d'accusation indique le nom du suspect et les renseignements personnels le concernant ainsi qu'une relation concise des faits de l'affaire et la qualification qu'ils revêtent.
(C) Le greffier transmet l'acte d'accusation et les pièces jointes au juge désigné conformément à l'article 28 ci-dessus, lequel informe le procureur de la date fixée pour l'examen de l'acte d'accusation.
(D) Au cours de son examen, le juge entend le procureur. Ce dernier peut présenter tout élément supplémentaire à l'appui d'un chef d'accusation. Le juge peut confirmer ou rejeter chaque chef d'accusation. Il peut également surseoir à sa décision.
(E) Le rejet d'un chef d'accusation n'interdit pas au procureur d'établir ultérieurement un nouvel acte d'accusation sur la base des faits ayant fondé le chef d'accusation rejeté, pour autant que soient produits à l'appui des éléments de preuve supplémentaires.



Article 48


Modifications de l'acte d'accusation

Le procureur peut, sans autorisation préalable, apporter des modifications à l'acte d'accusation à tout moment avant sa confirmation. Postérieurement, il ne peut le faire qu'avec l'autorisation du juge ayant confirmé ou, au cours du procès, avec l'autorisation de la Chambre de première instance. Si une telle autorisation est accordée, l'acte d'accusation modifié est communiqué à l'accusé et à son conseil et, si nécessaire, la date du procès est repoussée pour donner à la défense le temps de se préparer.



Article 49


Jonction d'instances

Des personnes accusées d'une même infraction ou d'infractions différentes commises à l'occasion de mêmes faits peuvent être mises en accusation et jugées ensemble.



Article 50


Jonction de chefs d'accusation

Plusieurs infractions peuvent faire l'objet d'un seul et même acte d'accusation si les actes incriminés ont été commis à l'occasion de même faits et par le même accusé.



Article 51


Retrait d'un acte d'accusation

(A) Le procureur peut, sans autorisation préalable, retirer un acte d'accusation à tout moment avant sa confirmation. Postérieurement il ne peut le faire qu'avec l'autorisation du juge l'ayant confirmé ou, au cours du procès, avec l'autorisation de la Chambre de première instance.
(B) Le retrait de l'acte d'accusation est notifié sans délai au suspect ou à l'accusé et à son conseil.



Article 52


Publicité de l'acte d'accusation

Après la confirmation par le juge de première instance, et sous réserve de l'article 53 ci-après, l'acte d'accusation est rendu public.




Article 53


Ordonnance de non divulgation

(A) Lorsqu'il confirme un acte d'accusation, le juge peut, après avis du procureur, ordonner sa non-divulgation au public jusqu'à sa signification à l'accusé ou, en cas de jonction d'instances, à tous les accusés.
(B) Un juge ou une chambre de première instance, après avis du procureur,
peut également ordonner la non-divulgation au public de tout ou partie de l'acte d'accusation, de toute information et de tout document particuliers si l'intérêt de la justice le commande.



Section 2


Ordonnances et mandats



Article 54


Disposition générale

A la demande d'une des parties ou de sa propre initiative un juge ou une chambre de première instance peut délivrer les ordonnances, citations à comparaître et mandats nécessaires aux fins de l'enquête, de la préparation ou de la conduite du procès.



Article 55


Exécution des mandats d'arrêt

(A) Tout mandat d'arrêt doit être signé par un juge et revêtu du sceau du tribunal. Il est accompagné d'une copie de l'acte d'accusation et d'un document rappelant les droits de l'accusé. Au titre de ces droits figurent ceux qui sont énoncés à l'article 21 du statut et, mutatis mutandis, aux articles 42 et 43 ci-dessus, ainsi que le droit de conserver le silence et la mise en garde selon laquelle toute déclaration faite par l'accusé est enregistrée et peut être retenue contre lui.
(B) Le greffier transmet le mandat aux fins d'arrestation et de défèrement de l'accusé aux autorités nationales de l'Etat sur le territoire ou sous la juridiction ou le contrôle duquel l'accusé réside ou a eu sa dernière résidence connue. Ce mandat est accompagné d'instructions selon lesquelles,
au moment de son arrestation, l'acte d'accusation, le document rappelant les droits de l'accusé et la mise en garde prévus au paragraphe (A) ci-dessus doivent lui être lus dans une langue qu'il comprend.
(C) Lorsqu'un mandat d'arrêt émis par le tribunal est exécuté, un membre du bureau du procureur peut être présent à compter du moment de l'arrestation.



Article 56


Coopération des Etats

L'Etat auquel est transmis un mandat d'arrêt agit sans tarder et avec toute la diligence voulue pour assurer sa bonne exécution, conformément à l'article 29 du statut.



Article 57


Procédure après l'arrestation

Après l'arrestation de l'accusé, l'Etat concerné détient l'intéressé et en informe sans délai le greffier. Le transfert de l'accusé au siège du tribunal est organisé par les autorités nationales intéressées en liaison avec le greffier.



Article 58


Dispositions de droit interne


relatives à l'extradition

Les obligations énoncées à l'article 29 du statut prévalent sur tous obstacles juridiques que la législation nationale ou les traités d'extradition auxquels l'Etat intéressé est partie pourraient opposer à la remise ou au transfert de l'accusé au tribunal.



Article 59


Défaut d'exécution d'un mandat d'arrêt

(A) Lorsque l'Etat auquel un mandat d'arrêt a été transmis n'a pu l'exécuter, il en informe sans délai le greffier et en indique les raisons.
(B) Si, dans un délai raisonnable, il n'est pas rendu compte des mesures prises, l'Etat est réputé ne pas avoir exécuté le mandat d'arrêt et le tribunal, par l'intermédiaire du président, en informe le Conseil de sécurité.



Article 60


Publication de l'acte d'accusation

A la demande du procureur, le greffier transmet le texte d'une annonce aux autorités nationales de l'Etat ou des Etats sur les territoires desquels le procureur a des raisons de croire que l'accusé peut se trouver, aux fins de publication dans des journaux à grande diffusion. L'annonce porte à la connaissance de l'accusé que l'on cherche à lui notifier un acte d'accusation le concernant.



Article 61


Procédure en cas d'inexécution


d'un mandat d'arrêt

(A) Si le mandat d'arrêt n'a pas été exécuté, si dès lors l'acte d'accusation n'a pas été signifié à l'accusé et si le procureur établit devant un juge de première instance que:


(i) Le procureur a pris toutes les mesures raisonnables pour effectuer
la signification à personne, notamment en ayant recours aux autorités compétentes de l'Etat sur le territoire ou sous la juridiction ou le contrôle duquel l'accusé réside ou avait sa dernière résidence connue, et
(ii) Le procureur a essayé selon d'autres modalités d'informer l'accusé
de l'existence de l'acte d'accusation en cherchant à publier des annonces appropriées dans les journaux dudit Etat, conformément à l'article 60 ci-dessus,
le juge ordonne que le procureur saisisse une chambre de première instance de l'acte d'accusation.
(B) Dès le prononcé d'une telle ordonnance, le procureur soumet l'acte d'accusation à la chambre de première instance en audience publique, en y joignant tous les éléments de preuve présentés au juge qui a initialement confirmé l'acte d'accusation.
(C) Si la chambre de première instance considère, sur la base de ces éléments de preuve ainsi que de tous autres que le procureur pourra produire, qu'il existe des raisons suffisantes de croire que l'accusé a commis une ou toutes les infractions mises à sa charge dans l'acte d'accusation, elle statue en conséquence. La chambre prie le procureur de donner lecture des parties pertinentes de l'acte d'accusation et de rendre compte des efforts déployés pour effectuer la signification tels que prévus au paragraphe (A) ci-dessus.
(D) En outre, la chambre de première instance délivre contre l'accusé un mandat d'arrêt international qui est transmis à tous les Etats.
(E) Si le procureur établit à l'audience devant la chambre de première instance que le défaut de signification de l'acte d'accusation est imputable en tout ou en partie au défaut ou au refus de coopération d'un Etat avec le tribunal contrairement à l'article 29 du statut, la chambre de première instance en dresse constat et le président en informe le Conseil de sécurité.


Article 62


Comparution initiale de l'accusé

Après son transfert au siège du tribunal, l'accusé comparaît sans délai devant une chambre de première instance et est officiellement mis en accusation. La chambre de première instance:


(i) S'assure que le droit de l'accusé à l'assistance d'un conseil est
respecté;


(ii) Donne lecture ou fait donner lecture de l'acte d'accusation à
l'accusé dans une langue qu'il parle et comprend, et s'assure que l'intéressé comprend l'acte d'accusation;


(iii) Invite l'accusé à plaider coupable ou non coupable et, à défaut
pour l'accusé de plaider, inscrit en son nom au dossier qu'il a plaidé non coupable;


(iv) Donne instructions au greffier de fixer la date du procès.



Article 63


Interrogatoire de l'accusé

Après la comparution initiale de l'accusé, le procureur ne peut l'interroger qu'en présence de son conseil et pour autant que l'interrogatoire soit enregistré sur bande magnétique ou sur vidéocassette conformément à la procédure prévue à l'article 43. Le procureur informe en outre l'accusé préalablement à l'interrogatoire de ce qu'il n'est pas obligé de parler et que, s'il choisit de parler, ce qu'il dira pourra être retenu contre lui.



Article 64


Détention préventive

Après son transfert au siège du tribunal, l'accusé est détenu dans les locaux mis à disposition par le pays hôte ou par un autre pays. Le président peut à la demande d'une des parties faire modifier les conditions de la détention de l'accusé.



Article 65


Mise en liberté provisoire

(A) Une fois détenu, l'accusé ne peut être mis en liberté provisoire que sur ordonnance d'une chambre de première instance.
(B) La mise en liberté provisoire ne peut être ordonnée par la chambre de première instance que dans des circonstances exceptionnelles, et pour autant qu'elle ait la certitude que l'accusé comparaîtra et, s'il est libéré, ne mettra pas en danger une victime, un témoin ou toute autre personne.
(C) La chambre de première instance peut subordonner la mise en liberté provisoire aux conditions qu'elle juge appropriées, y compris la mise en place d'un cautionnement et le cas échéant l'observation des conditions nécessaires pour garantir la présence de l'accusé au procès et la protection d'autrui.
(D) Si besoin est, la chambre de première instance peut délivrer un mandat d'arrêt pour garantir la comparution d'un accusé précédemment mis en liberté provisoire ou en liberté pour toute autre raison.



Section 3


Production de moyens de preuve



Article 66


Communication de pièces par le procureur

(A) Dès que possible après la comparution initiale de l'accusé, le procureur communique à la défense copie de toutes les pièces jointes à l'acte d'accusation lors de la demande de confirmation.
(B) A la demande de la défense, le procureur doit permettre à celle-ci de prendre connaissance des livres, photographies, pièces à conviction et tous documents se trouvant en sa possession ou sous son contrôle qui soit sont nécessaires à la défense de l'accusé, soit seront utilisés par le procureur comme moyens de preuve au procès, soit ont été obtenus de l'accusé ou lui appartiennent.



Article 67


Echange des moyens de preuves

(A) Dès que possible et en toute hypothèse avant le début du procès:


(i) Le procureur informe la défense du nom des témoins à charge qu'il a
l'intention d'appeler pour établir la culpabilité de l'accusé et pour réfuter tout moyen de défense dont le procureur a été informé conformément au paragraphe (ii) ci-dessous;


(ii) La défense informe le procureur de son intention d'invoquer:
a) Une défense d'alibi, avec indication du lieu ou des lieux spécifiques où l'accusé prétend s'être trouvé au moment des faits incriminés, des nom et adresse des témoins ainsi que tous autres éléments de preuve sur lesquels l'accusé à l'intention de se fonder pour établir sa défense d'alibi;
b) Un moyen de défense spécial, y compris le défaut total ou partiel de responsabilité mentale, avec indication des nom et adresse des témoins ainsi que tous autres éléments de preuve sur lesquels l'accusé a l'intention de se fonder pour établir ce moyen de défense.
(B) Le défaut d'une telle notification par la défense ne limite pas le droit de l'accusé de témoigner sur ces moyens de défense.
(C) Si la défense introduit la requête prévue au paragraphe (B) de l'article 66 ci-dessus, le procureur peut à son tour prendre connaissance des livres,
photographies, pièces à conviction et tous documents en la possession ou sous le contrôle de la défense et qu'elle entend produire.
(D) Si l'une ou l'autre des parties découvre des éléments de preuve ou informations supplémentaires qui auraient dû être produits conformément au règlement, elle en informe sans tarder l'autre partie et la chambre de première instance.



Article 68


Communication des moyens de preuve à décharge

Le procureur informe la défense aussitôt que possible de l'existence d'éléments de preuves dont il a connaissance et de nature à disculper en tout ou en partie l'accusé du ou des chefs d'accusation dont il est incriminé.



Article 69


Protection des victimes et des témoins

(A) Dans des cas exceptionnels, le procureur peut demander à la chambre de première instance d'ordonner la non-divulgation de l'identité d'une victime ou d'un témoin pour empêcher qu'ils ne courent un danger ou des risques, et ce jusqu'au moment où ils seront placés sous la protection du tribunal.
(B) Sans préjudice des dispositions de l'article 75 ci-dessous, l'identité de cette victime ou de ce témoin devra être divulguée avant le commencement du procès et dans des délais permettant à la défense de se préparer.



Article 70


Exception à l'obligation de communication

Nonobstant les dispositions des articles 66 et 67 ci-dessus, les rapports,
mémoires ou autres documents internes établis par une partie, ses assistants ou ses représentants dans le cadre de l'enquête ou de la préparation du dossier n'ont pas à être communiqués ou échangés.



Section 4


Dépositions



Article 71


Dépositions

(A) En raison de circonstances exceptionnelles, et dans l'intérêt de la justice, la chambre de première instance peut ordonner à la demande de l'une des parties qu'une déposition soit recueillie en vue du procès. La chambre mandate à cet effet un officier instrumentaire.
(B) La requête visant à faire recueillir une déposition est présentée par écrit. Elle mentionne les nom et adresse du témoin, les conditions de date et de lieu de la déposition, l'objet de cette déposition ainsi que les circonstances exceptionnelles qui la justifient.
(C) S'il est fait droit à la requête, la partie ayant demandé la déposition en donne préavis raisonnable à l'autre partie, qui aura le droit d'assister à la déposition et de contre-interroger le témoin.
(D) La déposition peut aussi être recueillie par voie de vidéoconférence.
(E) L'officier instrumentaire s'assure que la déposition et, le cas échéant, le contre-interrogatoire sont recueillis et enregistrés selon les formes prévues au règlement, il reçoit et réserve à la décision de la chambre les objections soulevées par l'une ou l'autre des parties. Il transmet tout le dossier à la chambre de première instance.



Section 5


Exceptions préjudicielles



Article 72


Dispositions générales

(A) Après la comparution initiale de l'accusé, l'une ou l'autre des parties peut soulever devant la chambre de première instance une ou plusieurs exceptions préjudicielles. La chambre décide si l'exception est présentée sous forme écrite ou orale.
(B) La chambre se prononce sur les exceptions préjudicielles in limite litis.



Article 73


Exceptions préjudicielles soulevées par l'accusé

(A) Les exceptions préjudicielles soulevées par l'accusé sont:
(i) L'exception d'incompétence;


(ii) L'exception fondée sur des vices de forme de l'acte d'accusation;


(iii) L'exception aux fins d'irrecevabilité d'éléments de preuve obtenus
de l'accusé ou lui appartenant;


(iv) L'exception aux fins de disjonction des chefs d'accusation joints
conformément à l'article 50 ci-dessus, ou de disjonction d'instances conformément au paragraphe (B) de l'article 82 ci-après;


(v) L'exception fondée sur le rejet d'une demande de commission d'office
d'un conseil.
(B) Les exceptions ci-dessus doivent être soulevées par l'accusé dans les soixante jours suivant sa comparution initiale et en toute hypothèse avant l'audience au fond.
(C) Le défaut par l'accusé de soulever les exceptions préjudicielles ci-dessus dans les délais prescrits vaut renonciation de sa part. La chambre de première instance peut néanmoins déroger à ces délais pour des raisons jugées valables.



CHAPITRE VI


Le procès en première instance



Section 1


Dispositions générales



Article 74


Amicus curiae

Une chambre peut, si elle le juge souhaitable dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, inviter ou autoriser tout Etat, toute organisation ou toute personne à faire un exposé sur toute question qu'elle juge utile.



Article 75


Protection des victimes et des témoins

(A) Un juge ou une chambre peut, de sa propre initiative ou à la demande d'une des parties ou de la victime ou du témoin intéressé, ordonner des mesures appropriées pour protéger la vie privée et la sécurité de victimes ou de témoins, à condition toutefois que lesdites mesures ne portent pas atteinte aux droits de l'accusé.
(B) Une chambre peut tenir une audience non contradictoire (ex parte) pour déterminer s'il y a lieu d'ordonner notamment:


(i) Des mesures de nature à empêcher la divulgation au public ou aux
médias de l'identité d'une victime ou d'un témoin, d'une personne qui leur est apparentée ou associée ou du lieu où ils se trouvent, telles que:


a) La suppression, dans les dossiers du tribunal, du nom de
l'intéressé et des indications permettant de l'identifier;


b) L'interdiction de l'accès du public à toute pièce du dossier
identifiant la victime;


c) Lors des témoignages, l'utilisation de moyens techniques permettant
l'altération de l'image ou de la voix ou l'usage d'un circuit de télévision fermé, et d) L'emploi d'un pseudonyme;


(ii) La tenue d'audiences à huis clos conformément à l'article 79
ci-après;


(iii) Les mesures appropriées en vue de faciliter le témoignage d'une
victime ou d'un témoin vulnérable, par exemple au moyen d'un circuit de télévision unidirectionnel.
(C) La chambre assure le cas échéant le contrôle du déroulement des interrogatoires aux fins d'éviter toute forme de harcèlement ou d'intimidation.



Article 76


Déclaration solennelle des interprètes et des traducteurs

Avant de prendre ses fonctions, tout interprète ou traducteur prononce une déclaration solennelle aux termes de laquelle il s'engage à accomplir sa tâche avec dévouement, indépendance et impartialité et dans le plein respect de son devoir de confidentialité.



Article 77


Outrage au tribunal

(A) Sous réserve des dispositions du paragraphe (D) de l'article 91, un témoin qui refuse de répondre à une question en rapport avec l'affaire dont la chambre est saisie, ou qui persiste dans son attitude, peut être déclaré coupable d'outrage au tribunal et condamné à une amende ne dépassant pas 10 000 US dollars ou à une peine de prison de six mois au maximum.
(B) Toutefois, si elle le juge approprié, la chambre peut relever le témoin de son obligation de répondre.
(C) L'amende est payée au greffier, qui la verse à un compte distinct.



Article 78


Audience publique

Sauf disposition contraire, la procédure devant une chambre de première instance est publique, à l'exception du délibéré.



Article 79


Audience à huis clos

(A) La chambre de première instance peut ordonner que la presse et le public soient exclus de la salle pendant tout ou partie de l'audience:
(i) Pour des raisons d'ordre public ou de bonnes moeurs;


(ii) Pour assurer la sécurité et la protection d'une victime ou d'un
témoin ou pour éviter la divulgation de son identité en conformité à l'article 75 ci-dessus; ou (iii) En considération de l'intérêt de la justice.
(B) La chambre de première instance rend publiques les raisons de sa décision.



Article 80


Maintien de l'ordre

(A) La chambre de première instance peut ordonner que toute personne soit exclue de la salle afin de sauvegarder le droit de l'accusé à un procès équitable et public ou afin de maintenir l'ordre.
(B) La chambre de première instance peut ordonner l'exclusion de l'accusé de la salle d'audience et poursuivre les débats en son absence si l'accusé,
après avoir été averti que son comportement risque de justifier son exclusion de la salle d'audience, persiste dans ce comportement.



Article 81


Enregistrement des débats


et conservation des preuves

(A) Le greffier établit et conserve un compte rendu intégral de tous les débats, y compris un enregistrement sonore, sa transcription et, lorsque la chambre de première instance le juge nécessaire, un enregistrement vidéo.
(B) La chambre de première instance peut ordonner la divulgation de tout ou partie du compte rendu des débats à huis clos lorsque les raisons qui ont motivé le huis clos ont disparu.
(C) Le greffier assure la conservation et la garde de tous les éléments de preuve matériels produits au cours des procédures.
(D) La chambre de première instance détermine si des photographies, des enregistrements vidéo ou des enregistrements sonores peuvent être pris lors de l'audience autrement que par le greffe.



Section 2


Déroulement du procès



Article 82


Jonction et disjonction d'instances

(A) En cas d'instances jointes, chaque accusé a les mêmes droits que s'il était jugé séparément.
(B) La chambre de première instance peut ordonner un procès séparé pour des accusés dont les instances avaient été jointes en application de l'article 49, pour éviter tout conflit d'intérêt de nature à causer un préjudice grave à un accusé ou pour sauvegarder l'intérêt de la justice.



Article 83


Instruments de contrainte

Les instruments de contrainte tels que les menottes ne sont pas utilisés si ce n'est pour éviter un risque d'évasion au cours du transfert ou pour des raisons de sécurité; ils sont retirés lorsque l'accusé comparaît devant la chambre.



Article 84


Déclarations liminaires

Avant la présentation par le procureur de ses moyens de preuves, chacune des parties peut faire une déclaration liminaire. Toutefois la défense peut décider de faire sa déclaration après que le procureur ait présenté ses moyens de preuve et avant de présenter elle-même ses propres moyens de défense.



Article 85


Présentation des moyens de preuve

(A) Chacune des parties peut appeler des témoins à la barre et présenter des moyens de preuve. A moins que la chambre n'en décide autrement dans l'intérêt de la justice, les moyens de preuve sont présentés dans l'ordre suivant:
(i) Preuves du procureur;
(ii) Preuves de la défense;
(iii) Réplique du procureur;
(iv) Duplique de la défense;


(v) Moyens de preuve ordonnés par la chambre de première instance
conformément à l'article 98 ci-après.
(B) Chaque témoin peut, après son interrogatoire principal, faire l'objet d'un contre-interrogatoire et d'un interrogatoire supplémentaire. Toutefois le juge peut également poser toute question au témoin à quelque stade que ce soit. Le témoin est d'abord interrogé par la partie qui le présente.
(C) L'accusé peut, s'il le souhaite, comparaître en qualité de témoin pour sa propre défense.



Article 86


Plaidoiries

Après présentation de tous les moyens de preuve, le procureur peut présenter son réquisitoire, et la défense y répondre. S'il le souhaite, le procureur peut répliquer et la défense présenter une duplique.



Article 87


Délibéré

(A) Après les plaidoiries des parties, le président de la chambre déclare clos les débats et la chambre se retire pour délibérer à huis clos. L'accusé n'est déclaré coupable que lorsque la majorité de la chambre de première instance considère que la culpabilité de l'accusé a été prouvée au-delà de tout doute raisonnable.
(B) La chambre de première instance vote séparément sur chaque chef visé dans l'acte d'accusation. Si deux ou plusieurs accusés sont jugés ensemble,
en application de l'article 49 ci-dessus, la chambre statue séparément sur le cas de chacun d'eux.



Article 88


Jugement

(A) Le jugement est prononcé, en audience publique et en présence de l'accusé, à une date qui a été notifiée aux parties et aux conseils.
(B) Si elle juge l'accusé coupable de l'infraction et si à l'examen des preuves il est établi que l'infraction a donné lieu à l'acquisition illicite d'un bien, la chambre de première instance le constate spécifiquement dans son jugement et peut ordonner la restitution de ce bien conformément à l'article 105 ci-après.
(C) Des opinions individuelles ou dissidentes peuvent être jointes au jugement.



Section 3


De la preuve



Article 89


Dispositions générales

(A) En matière de preuve, les règles énoncées dans la présente section s'appliquent à toute procédure devant les chambres. La chambre saisie n'est pas liée par les règles de droit interne régissant l'administration de la preuve.
(B) Dans les cas où le règlement est muet, la chambre applique les règles d'administration de la preuve propres à parvenir, dans l'esprit du statut et des principes généraux du droit, à un règlement équitable de la cause.
(C) La chambre peut recevoir tout élément de preuve pertinent qu'elle estime avoir valeur probante.
(D) La chambre peut exclure tout élément de preuve dont la valeur probante est largement inférieure à l'exigence d'un procès équitable.
(E) La chambre peut demander à vérifier l'authenticité de tout élément de preuve obtenu hors audience.



Article 90


Témoignages

(A) En principe, les chambres entendent les témoins directement. Cependant, s'il n'est pas possible d'assurer la présence d'un témoin, les chambres peuvent ordonner que celui-ci dépose selon les modalités prévues à l'article 71.
(B) Avant de témoigner, tout témoin fait la déclaration solennelle suivante: << Je déclare solennellement que je dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité. >> (C) Un témoin, autre qu'un expert, qui n'a pas encore témoigné ne doit pas être présent lors de la déposition d'un autre témoin. Toutefois, s'il a entendu cet autre témoignage, le sien n'est pas pour autant irrecevable.
(D) Un témoin peut refuser de faire toute déclaration qui risquerait de l'incriminer.



Article 91


Faux témoignage sous déclaration solennelle

(A) De sa propre initiative ou à la demande d'une partie, la chambre avertit le témoin de son obligation de dire la vérité et des conséquences pouvant résulter d'un faux témoignage.
(B) Si la chambre a de bonnes raisons de croire qu'un témoin a sciemment et volontairement fait un faux témoignage, elle peut demander au procureur d'examiner l'affaire en vue de préparer et de soumettre un acte d'accusation pour faux témoignage.
(C) Les dispositions de procédure et de preuve prévues aux chapitres quatre à huit du règlement s'appliquent, mutatis mutandis, aux procédures visées au présent article.
(D) Un juge ayant siégé à la chambre de première instance devant laquelle le témoin a comparu ne peut connaître des procédures pour faux témoignages dont le témoin est l'objet.
(E) Le faux témoignage sous déclaration solennelle est passible d'une amende ne pouvant excéder 10 000 US dollars ou d'une peine d'emprisonnement de douze mois maximum, ou des deux. L'amende est payée au greffier, qui la verse au compte distinct visé au paragraphe (C) de l'article 77 ci-dessus.



Article 92


Aveux

Sous réserve du respect rigoureux des conditions visées à l'article 63 ci-dessus, l'aveu de l'accusé donné lors d'un interrogatoire par le procureur est présumé libre et volontaire jusqu'à preuve du contraire.



Article 93


Ligne de conduite délibérée

Les éléments de preuve permettant d'établir une ligne de conduite délibérée sont recevables dans l'intérêt de la justice.



Article 94


Faits de notoriété publique

La chambre de première instance n'exige pas la preuve de ce qui est de notoriété publique, mais en dresse le constat judiciaire.



Article 95
Eléments de preuve obtenus par des moyens contraires aux droits de la personne internationalement protégée
Les éléments de preuve obtenus directement ou indirectement par des moyens constituant une grave violation des droits de la personne internationalement protégée ne sont pas recevables.



Article 96


Administration des preuves en matière


de violences sexuelles

(A) En matière de violences sexuelles:


(i) La corroboration du témoignage de la victime par des témoins n'est
pas requise;


(ii) Le consentement de la victime ne peut être invoqué comme moyen de
défense;


(iii) Le comportement sexuel antérieur de la victime ne peut être
invoqué comme moyen de défense.



Article 97


Secret des communications entre avocat et client

Toutes les communications échangées entre un avocat et son client sont considérées comme couvertes par le secret professionnel, et leur divulgation ne peut pas être ordonnée à moins que:
(i) Le client ne consente à leur divulgation; ou
(ii) Le client n'en n'ait volontairement divulgué le contenu à un tiers
et que ce tiers n'en fasse état au procès.



Article 98


Pouvoir des chambres d'ordonner de leur propre initiative


la production de moyens de preuve supplémentaires

La chambre de première instance peut ordonner la production de moyens de preuve supplémentaires par l'une ou l'autre des parties. Elle peut de sa propre initiative citer des témoins à comparaître.



Article 99


Statut de la personne acquittée

(A) En cas d'acquittement, l'accusé est remis en liberté.
(B) Toutefois, en cas d'appel interjeté à l'audience par le procureur dès le prononcé du jugement d'acquittement, sur ses réquisitions, la chambre peut émettre un mandat d'arrêt contre l'accusé qui prend effet immédiatement sans préjudice des dispositions de l'article 108 ci-après.



Section 4


Sentence


Article 100


Procédure préalable au prononcé de la sentence

Après jugement de culpabilité, le procureur et la défense peuvent présenter toutes informations pertinentes permettant à la chambre de première instance de décider de la sentence appropriée.



Article 101


Peines

(A) Toute personne reconnue coupable par le tribunal est passible de l'emprisonnement pouvant aller jusqu'à l'emprisonnement à vie.
(B) Lorsqu'elle prononce une peine la chambre de première instance tient compte des dispositions prévues au paragraphe 2 de l'article 24 du statut,
ainsi que:
(i) De l'existence de circonstances aggravantes;


(ii) De l'existence de circonstances atténuantes, y compris le sérieux
et l'étendue de la coopération que l'accusé a fournie au procureur avant ou après la déclaration de culpabilité;


(iii) De la grille générale des peines d'emprisonnement telles
qu'appliquées par les tribunaux en ex-Yougoslavie;


(iv) De la durée de la période, le cas échéant, pendant laquelle la
personne reconnue coupable avait été gardée à vue en attendant d'être remise au tribunal ou en attendant d'être jugée par une chambre de première instance;


(v) De la durée de la période, le cas échéant, pendant laquelle la
personne reconnue coupable avait déjà purgé une peine imposée à raison du même acte par un tribunal national, en application du paragraphe 3 de l'article 10 du statut.
(C) En cas de multiplicité des peines, la chambre de première instance détermine si celles-ci doivent être purgées de façon consécutive ou si elles doivent être confondues.
(D) La sentence est prononcée en audience publique et en présence de la personne reconnue coupable sous réserve du paragraphe (B) de l'article 102 ci-après.



Article 102


Statut du condamné

(A) La sentence emporte immédiatement exécution dès son prononcé conformément au paragraphe (D) de l'article 101 ci-dessus. Toutefois, dès notification d'appel, il est sursis à l'exécution de la sentence jusqu'au prononcé de la décision d'appel, le condamné restant néanmoins détenu comme prévu à l'article 64 ci-dessus.
(B) Si, conformément à une décision antérieure de la chambre, le condamné est en liberté provisoire ou est en liberté pour toute autre raison, et n'est pas présent au moment du prononcé du jugement, la chambre émet un mandat d'arrêt à son encontre. Lors de son arrestation, notification lui est alors donnée de la déclaration de culpabilité et de la sentence, après quoi il est procédé conformément à l'article 105 ci-après.



Article 103


Lieu d'emprisonnement

(A) La peine de prison est exécutée dans un Etat choisi par le tribunal sur une liste d'Etats ayant indiqué leur volonté d'accueillir des personnes condamnées pour l'exécution de leur peine.
(B) Le transfert du condamné vers cet Etat est effectué aussitôt que possible après expiration du délai d'appel.



Article 104


Contrôle de l'emprisonnement

L'exécution de toutes les peines de prison est soumise au contrôle du tribunal ou d'un organe désigné par lui.



Article 105


Restitution de biens

(A) Après jugement de culpabilité contenant le constat spécifique prévu au paragraphe (B) de l'article 88, la chambre de première instance doit, sur requête du procureur, ou peut, de sa propre initiative, tenir une audience spéciale pour déterminer les conditions spécifiques dans lesquelles devra être restitué le bien en question ou le produit de son aliénation. La chambre peut ordonner dans l'intervalle les mesures conservatoires qu'elle juge appropriées pour la préservation et la protection du bien et du produit de son aliénation.
(B) La décision de restitution s'étend au bien et au produit de l'aliénation du bien même s'il se trouve entre les mains de tiers n'ayant aucun rapport avec les infractions dont l'accusé a été reconnu coupable.
(C) Les tiers sont cités à comparaître devant la chambre de première instance et ont la possibilité de justifier leur possession du bien ou du produit de son aliénation.
(D) Si la chambre de première instance peut, à l'examen des preuves et de leur force probante, déterminer qui est le propriétaire légitime du bien,
elle en ordonne la restitution à ce dernier.
(E) Si la chambre de première instance ne peut pas déterminer qui est le propriétaire légitime du bien, elle en informe les autorités nationales compétentes et leur demande de le déterminer.
(F) Le greffier transmet aux autorités nationales compétentes les ordonnances rendues par une chambre de première instance conformément au paragraphe (D) du présent article.



Article 106


Indemnisation des victimes

(A) Le greffier transmet aux autorités compétentes des Etats concernés le jugement par lequel l'accusé a été reconnu coupable d'une infraction qui a causé des dommages à une victime.
(B) La victime ou ses ayants droit peuvent, conformément à la législation nationale applicable, intenter une action devant une juridiction ou toute autre institution compétente, pour obtenir réparation du préjudice.
(C) Aux fins d'obtenir réparation du préjudice conformément au paragraphe (B) ci-dessus, le jugement du tribunal est définitif et déterminant quant à la responsabilité pénale de la personne condamnée.



CHAPITRE VII


L'appel



Article 107


Disposition générale

Les dispositions du règlement en matière de procédure et de preuve devant les chambres de première instance s'appliquent, mutatis mutandis, à la procédure devant la chambre d'appel.



Article 108


Acte d'appel

Toute partie qui souhaite interjeter appel d'un jugement doit, dans les trente jours suivant son prononcé, déposer auprès du greffier et signifier à l'autre partie l'acte d'appel, écrit et motivé.



Article 109


Dossier d'appel

(A) Le dossier d'appel est constitué des éléments du dossier de première instance certifié par le greffier, qui sont désignés par les parties.
(B) Dans les trente jours de la certification du dossier de première instance par le greffier, les parties se mettent d'accord sur les éléments du dossier qui selon elles sont nécessaires à la décision d'appel.
(C) En cas de désaccord au terme de ce délai, l'appelant et l'intimé disposent d'un délai de soixante jours à compter de la certification par le greffier pour désigner les éléments du dossier que chacun considère nécessaires à la décision d'appel.
(D) La chambre d'appel reste libre de demander la transmission du dossier complet de première instance.



Article 110


Copie du dossier d'appel

Le greffier fait autant de copies du dossier d'appel qu'il y a de parties et de juges en chambre d'appel.



Article 111


Mémoire de l'appelant

Le mémoire de l'appelant comporte tous les éléments de droit et de fait. Il est déposé auprès du greffier et est signifié à l'autre partie dans un délai de quatre-vingt-dix jours à compter de la certification du dossier.



Article 112


Mémoire de l'intimé

Le mémoire de l'intimé comporte tous les éléments de droit et de fait. Il est déposé auprès du greffier et est signifié à l'autre partie dans un délai de trente jours à compter du dépôt du mémoire de l'appelant.



Article 113


Mémoire en réplique

L'appelant peut déposer un mémoire en réplique dans un délai de quinze jours à compter du dépôt du mémoire de l'intimé.



Article 114


Date d'audience

Après l'expiration des délais de dépôt des mémoires prévus aux articles 111, 112 et 113 ci-dessus, la chambre d'appel fixe la date d'audience et le greffier en informe les parties.



Article 115


Moyens de preuve supplémentaires

Une partie peut demander à pouvoir présenter devant la chambre d'appel des moyens de preuve supplémentaires dont elle ne disposait pas au moment du procès en première instance. Une telle demande doit être déposée auprès du greffier et signifiée à l'autre partie au moins quinze jours avant la date fixée pour l'audience.
La chambre d'appel autorise la présentation de ces moyens de preuves si elle considère que l'intérêt de la justice le commande.



Article 116


Report des délais

La chambre d'appel peut faire droit à une demande de report de délais si elle le considère justifié.



Article 117


Arrêt

(A) La chambre d'appel rend son arrêt en se fondant sur le dossier d'appel et, le cas échéant, sur les nouveaux éléments de preuve qui lui ont été présentés.
(B) L'arrêt est rendu en audience publique et en présence de l'accusé à une date qui a été notifiée aux parties et aux conseils.



Article 118


Statut de l'accusé après l'arrêt d'appel

(A) En cas de condamnation, l'arrêt est exécutoire immédiatement.
(B) Si l'accusé n'est pas présent au jour du prononcé de l'arrêt, soit en raison de son acquittement en première instance, soit en raison d'une ordonnance prise conformément à l'article 65 ci-dessus ou pour toute autre cause, la chambre d'appel rend son arrêt en son absence et ordonne son arrestation et sa mise à disposition du tribunal, hormis le cas de l'acquittement.



CHAPITRE VIII


Révision



Article 119


Demande en révision

S'il est découvert un fait nouveau qui n'était pas connu de la partie intéressée lors de la procédure devant une chambre de première instance ou la chambre d'appel ou dont la découverte n'avait pu intervenir malgré toutes les diligences effectuées, la défense ou, dans l'année suivant le prononcé du jugement définitif, le procureur peut soumettre à la même chambre une demande en révision du jugement.



Article 120


Examen préliminaire

Si la majorité des juges de la chambre qui a statué sur l'affaire conviennent que le fait nouveau, s'il avait été établi, aurait pu être un élément décisif de la décision, la chambre révise le jugement et prononce un nouveau jugement après audition des parties.



Article 121


Appel

Après révision, le jugement prononcé par la chambre de première instance peut faire l'objet d'un appel conformément au chapitre VIII ci-dessus.



Article 122


Renvoi de l'affaire


devant la chambre de première instance

Si le jugement à réviser est frappé d'appel lors du dépôt de la demande en révision, la chambre d'appel peut renvoyer l'affaire à la chambre de première instance pour qu'elle statue sur la demande.



CHAPITRE IX


Grâce et commutation de peine



Article 123


Notification par les Etats

Si, selon la législation de l'Etat sur le territoire duquel est incarcéré le condamné, ce dernier peut faire l'objet d'une grâce ou d'une commutation de peine, l'Etat en informe le tribunal conformément à l'article 28 du statut.



Article 124


Appréciation du président

Le président, au vu de cette notification, apprécie après consultation des juges s'il y a lieu d'accorder une grâce ou une commutation de peine.



Article 125


Critères généraux d'octroi

Aux fins d'apprécier de l'opportunité d'une grâce ou d'une commutation de peine, le président du tribunal tient compte, entre autres, de la gravité de l'infraction commise, du traitement réservé aux condamnés se trouvant dans la même situation, de la volonté de réinsertion sociale dont fait preuve le condamné ainsi que du sérieux et de l'étendue de la coopération fournie au procureur.

2.1. Champ d'application de la loi

Le champ d'application de la présente loi est fixé par son article 1er, qui rappelle que sont visées les violations graves du droit humanitaire commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie à partir du 1er janvier 1991, telles que définies par le statut, à savoir les infractions graves aux conventions de Genève de 1949, les violations des lois ou coutumes de la guerre, le génocide ou les crimes contre l'humanité, dès lors que ces infractions constituent des crimes ou délits en droit français.
Est ainsi rappelé le principe de la double incrimination, qui, compte tenu de la nature et de la gravité des agissements visés par le statut, ne soulève aucune difficulté d'application, ces agissements constituant évidemment des infractions en droit français.
En particulier, le fait que le génocide et les autres crimes contre l'humanité ne constituent dans notre droit des incriminations spécifiques que depuis l'entrée en vigueur du nouveau code pénal est sans incidence, ces comportements ayant toujours été pénalement sanctionnés par les textes antérieurs, tels que ceux relatifs aux homicides volontaires, aux violences, aux enlèvements ou aux séquestrations.
En réalité, le respect du principe de double incrimination s'impose principalement pour permettre aux juridictions françaises, si elles étaient saisies de ces faits, de prononcer des peines, les textes internationaux précités n'édictant en effet aucune pénalité. Il en résulte en pratique que, pour les faits commis entre le 1er janvier 1991 et le 1er mars 1994, seules les peines prévues par l'ancien code pénal, du moins lorsqu'elles sont plus douces, pourront être prononcées.

2.3.1. Entraide judiciaire (art. 7 et 8)

Les articles 7 et 8 énoncent les règles relatives à l'entraide judiciaire,
qui, dans un souci de simplification et de rapidité, est centralisée devant le procureur de la République de Paris.
L'article 7 dispose que les demandes d'entraide sont adressées au ministère de la justice qui les transmet pour exécution au procureur de la République de Paris. Le troisième alinéa de l'article 7 prévoit toutefois une transmission directe à ce magistrat en cas d'urgence.
En application de l'article 8, les demandes d'entraide sont exécutées, selon leur nature, par le procureur de la République de Paris ou par le juge d'instruction de Paris qui voient leur compétence étendue à l'ensemble du territoire national. Le procureur du tribunal international peut, le cas échéant, assister à l'exécution de ces demandes.

Pour le ministre et par délégation:


Le directeur du cabinet,


J. GAEREMYNCK