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Circulaire du 3 août 1995 relative à l'application de la loi no 95-884 du 3 août 1995 portant amnistie

Justice et droit
Démocratie
Transports
Déposé le 2 août 1995 à 22h00, publié le 5 août 1995 à 22h00
Journal officiel

Texte

I. - 1. Amnistie en raison de la nature de l'infraction (art. 1er à 6)
La loi porte tout d'abord, comme les lois précédentes, amnistie de toutes les contraventions de police (art. 1er), sous réserve, cependant, de l'exclusion des contraventions du code de la route entraînant, en application de l'article R. 256, un retrait de plus de trois points du permis de conduire. Elle prévoit aussi l'amnistie des contraventions de grande voirie (art. 6).
La loi porte également amnistie de droit de certains délits commis avant le 18 mai 1995.
Il s'agit en premier lieu des délits punis uniquement d'une peine d'amende (art. 2, alinéa 1er). Afin de simplifier l'application de cette disposition traditionnelle, la loi prévoit expressément, consacrant en cela la jurisprudence, que l'amnistie ne jouera qu'en l'absence de << toute autre peine ou mesure >> prévue par la loi. Ainsi, par exemple, si une mesure de fermeture ou une confiscation sont encourues, l'amnistie prévue à l'article 2 ne jouera pas.
Sont également amnistiés les délits commis dans des circonstances particulières. Toutefois, afin de prendre en compte la correctionnalisation, par le nouveau code pénal entré en vigueur le 1er mars 1994, de nombreux crimes, cette amnistie de droit n'est pas applicable aux délits passibles d'une peine de dix ans d'emprisonnement (1) (art. 2, alinéa 2).
Les délits concernés par cette amnistie de droit sont:
- les délits commis à l'occasion de conflits du travail ou à l'occasion d'activités syndicales et revendicatives de salariés ou d'agents publics, y compris au cours de manifestations sur la voie publique ou dans les lieux publics (art. 2 [1o]);
- les délits commis à l'occasion de conflits relatifs aux problèmes de l'enseignement ainsi que ceux commis en relation avec la production d'oeuvres ou de logiciels à des fins exclusivement pédagogiques (art. 2 [2o]);
- les délits commis à l'occasion de conflits à caractère agricole, rural,
industriel, artisanal ou commercial, y compris au cours de manifestations sur la voie publique ou dans des lieux publics (art. 2 [3o]);
- les délits commis en relation avec des élections de toute sorte, à l'exception de ceux commis en relation avec le financement direct ou indirect de campagnes électorales ou de partis politiques (art. 2 [4o]);
- les délits de presse, à l'exception de ceux ayant un caractère raciste ou apologétique des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité ou de terrorisme qui sont exclus du bénéfice de l'amnistie (art. 2 [5o] et 25 [16o]);
- les délits commis en relation avec la défense des droits et intérêts des Français rapatriés d'outre-mer (art. 2 [6o]).
La principale innovation de ce texte par rapport à celui du 20 juillet 1988 consiste dans le sort fait aux délits commis en relation avec le financement direct ou indirect de campagnes électorales ou de partis politiques. En effet, l'amnistie en raison de la nature de l'infraction ne jouera pas pour ces faits. Le législateur a, suivant ainsi le projet du Gouvernement, fait un choix inverse de celui de 1988. Il est en effet apparu qu'en cette matière les procédures doivent aller normalement à leur terme. Ces faits seront éventuellement amnistiables au quantum, dans les conditions de droit commun, sous réserve des faits de corruption au sens large exclus de l'amnistie par l'article 25 (4o) de la loi (2).
Conformément à la tradition, sont également amnistiées un certain nombre d'infractions au code de justice militaire et au code du service national (art. 3, 4 et 5), sous réserve, lorsqu'elle est juridiquement possible, de la régularisation de la situation des intéressés avant le 31 décembre 1995.
Les infractions ainsi amnistiées sont moins nombreuses que par le passé. Il apparaît en effet que certaines d'entre elles ne sont plus poursuivies, en raison notamment de l'évolution de notre société (par exemple l'abus de pouvoir en matière de réquisition visé à l'article 463 du code de justice militaire). D'autres ne sont pas amnistiées en raison de leur trop grande gravité (notamment la désertion en temps de guerre prévue par l'article 407, la destruction volontaire d'une arme prévue par l'article 430 ou les violences contre une sentinelle visées à l'article 456).
Vous voudrez bien veiller, en étroite liaison avec l'autorité militaire, à ce que les personnes concernées, notamment celles qui sont détenues, soient informées des possibilités de régularisation de leur situation, et vérifier le moment venu la réalité de cette régularisation pour constater l'amnistie et en informer le casier judiciaire.

I. - 2. Amnistie en raison du quantum ou de la nature de la peine (art. 7 à
11)

Les infractions punies d'une peine d'amende sont, de manière traditionnelle, amnistiées, sous réserve du paiement de l'amende lorsqu'elle est supérieure à 5 000 F.
Sont également amnistiées les infractions punies de peines d'emprisonnement égales ou inférieures à certains seuils qui sont différents de ceux retenus lors des deux précédentes lois d'amnistie (art. 7). Le législateur a estimé que l'amnistie était une mesure de générosité qui devait être mesurée.
Sont donc amnistiées les peines d'emprisonnement ferme n'excédant pas trois mois ou celles d'un même quantum assorties d'un sursis avec mise à l'épreuve ou avec obligation d'accomplir un travail d'intérêt général. Le Parlement est ainsi revenu à la tradition de toutes les lois d'amnistie antérieures à celle de 1981, qui prévoyaient ce quantum (art. 7 [1o] et [2o]).
Sont également amnistiées les peines d'emprisonnement assorties du sursis simple inférieures ou égales à neuf mois. Le législateur a souhaité manifester par le choix de ce seuil, plus faible que dans les lois précédentes, le souci de ne pas voir amnistiées des infractions d'une certaine gravité (art. 7 [3o]).
Bénéficient également de l'amnistie les délinquants condamnés à une peine avec sursis probatoire ou avec sursis assorti de l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général comprise entre trois et neuf mois, lorsque la condamnation aura été déclarée non avenue, le délai d'épreuve accompli sans incident ou le travail d'intérêt général exécuté (art. 7 [4o et 5o]).
Il en est de même pour les personnes qui ont été condamnées à une peine mixte, lorsque la partie ferme de la condamnation n'excède pas trois mois et que la durée totale de la peine n'excède pas neuf mois, sous les mêmes réserves que celles prévues au 4o de l'article 7 pour les sursis avec mise à l'épreuve.
Dans un souci d'équité, il y aura lieu de surseoir à l'exécution des autres peines prononcées par la même décision et au recouvrement du droit fixe de procédure jusqu'à l'expiration du délai d'épreuve, l'amnistie de l'ensemble des éléments de la condamnation étant subordonnée à l'accomplissement de cette condition.
Sont aussi amnistiées, de manière tout aussi classique, les infractions sanctionnées par une peine alternative à l'emprisonnement, à l'exception de l'interdiction du territoire français prévue par l'article 131-30 du code pénal (art. 8), par une dispense de peine (art. 9) ou par une admonestation, une remise à parents ou une dispense de toute mesure (art. 10).
S'agissant du travail d'intérêt général prononcé à titre de peine de substitution, la loi a prévu que l'amnistie est subordonnée à l'exécution du travail. A donc été abandonnée la distinction opérée par la loi du 20 juillet 1988 entre le travail d'intérêt général prononcé à titre de peine de substitution, qui était amnistié sans condition, et le travail d'intérêt général prononcé à titre d'obligation assortissant un sursis, dont l'amnistie était subordonnée à l'accomplissement du travail. Le régime de l'amnistie du travail d'intérêt général est désormais unifié.
Il est par conséquent primordial que le casier judiciaire soit informé sans délai de chaque accomplissement de travail d'intérêt général, que celui-ci ait été prononcé comme modalité d'un sursis ou à titre principal.
Lorsqu'une peine d'emprisonnement ferme a fait l'objet de la procédure dite de conversion prévue par l'article 132-57 du code pénal et par l'ancien article 747-8 du code de procédure pénale, la peine à retenir, qu'il s'agisse de son quantum ou de sa nature, est celle qui résulte de la conversion (art. 7, dernier alinéa).
Enfin, le législateur a repris le dispositif procédural prévu par les lois de 1981 et de 1988 relatif aux modalités de mise en oeuvre de l'amnistie au quantum: l'amnistie n'est en principe acquise qu'après condamnation définitive. Toutefois, en l'absence de partie civile et de voies de recours, elle est acquise sans signification dès le prononcé du jugement rendu par défaut, par itératif défaut ou par jugement << contradictoire à signifier >>. La personne bénéficiant ainsi de l'amnistie retrouve l'exercice des voies de recours si une instance en réparation est ultérieurement intentée contre elle. Elle peut aussi renoncer aux voies de recours exercées, afin de bénéficier immédiatement de l'amnistie (art. 11).

I. - Amnistie de droit de certaines infractions


(art. 1er à 12 de la loi)

Comme il est d'usage, le projet prévoit, d'une part, une amnistie selon la nature de l'infraction et, d'autre part, une amnistie à proportion de la peine prononcée.

V. - Exclusions de l'amnistie (art. 25)

Premier texte de loi après une élection présidentielle, la loi d'amnistie est l'occasion d'affirmer certaines orientations de politique pénale. C'est ainsi que les exclusions du bénéfice de l'amnistie permettent de ne pas accorder de pardon aux comportements les plus inacceptables, auxquels l'oubli est refusé.
Certes, le texte voté a repris par rapport aux exclusions figurant dans les textes de 1981 et 1988 un large << tronc commun >>, contenant les infractions à l'évidence les plus graves.
Parmi le << tronc commun >>, il convient de citer les infractions mettant en cause l'unité de la nation, notamment dans le cadre d'actions terroristes (art. 25 [1o]) ou dans celui de discriminations entre les êtres humains (art. 25 [2o]), les infractions de violences à mineurs de quinze ans (art. 25 [3o]), les infractions en matière de contrefaçon, dont le champ a été élargi aux contrefaçons de marques et de dessins et modèles (art. 25 [6o]) et les infractions de fraude électorale (art. 25 [7o]).
Les faits de trafic de stupéfiants justifient également une stigmatisation particulière (art. 25 [11o]).
La sérénité des relations économiques, atout essentiel pour le pays, dépend par ailleurs largement du respect des règles posées par la loi ou le règlement, quelle que soit la gravité des sanctions encourues. C'est pourquoi sont exclues de l'amnistie les infractions en matière de douane, de fiscalité et de relations financières avec l'étranger (art. 25 [12o]).
Le texte exclut également, comme il est de tradition, les délits de presse les plus graves, relatifs notamment à l'apologie des crimes de guerre.
L'article 24 bis de la loi du 29 juillet 1881, qui incrimine la contestation de l'existence des crimes contre l'humanité, vient compléter cette énumération (art. 25 [16o]).
Il exclut enfin les infractions en matière de patrimoine, dans une rédaction plus précise que celle retenue en 1988, destinée à éviter les difficultés passées d'interprétation (art. 25 [20o]), et les principaux délits portant atteinte à l'environnement (art. 25 [21o]).
Au-delà, le Gouvernement a entendu affirmer ses orientations de politique pénale en prévoyant des exclusions nouvelles ou en élargissant la portée d'exclusions traditionnelles; sont ainsi exclus du bénéfice de l'amnistie:
- les délits de blessures et d'homicides involontaires commis à l'occasion de la conduite d'un véhicule (3), les délits de conduite en état alcoolique et de fuite, ainsi que tous les délits prévus par le code de la route (art.
25 [8o et 9o]);
- le délit de mise en danger d'une personne (art. 25 [8o]);
- les contraventions en matière routière pour lesquelles un retrait de plus de trois points du permis de conduire est prévu (art. 25 [10o]): sont ainsi exclues les contraventions les plus graves telles que les blessures involontaires entraînant une incapacité n'excédant pas trois mois, les non-respects de la priorité, les non-respects des arrêts imposés, les dépassements de 40 km/h ou plus de la vitesse maximale autorisée;
- les infractions de corruption au sens large: corruption, trafic d'influence, concussion, ingérence, prise illégale d'intérêts, favoritisme (art. 25 [4o]); ces faits portent en effet atteinte au fonctionnement de la démocratie et indignent légitimement nos concitoyens;
- les délits liés à l'immigration clandestine, prévus par les articles 19,
21 et 27 de l'ordonnance no 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France (art. 25 [13o]) et les délits qui sont relatifs au travail clandestin et aux trafics de main-d'oeuvre étrangère (art. 25 [14o]): la lutte contre la situation irrégulière d'étrangers en France et contre leur exploitation par des employeurs indélicats exige en effet un effort et une continuité qui ne doivent pas être interrompus;
- le délit d'usurpation d'identité, afin notamment que le casier judiciaire puisse conserver la trace d'agissements susceptibles d'avoir entraîné des inscriptions indues au préjudice des victimes de ces usurpations (art. 25 [18o]);
- les principaux délits en matière de concurrence et de bourse (art. 25 [22o]);
- les délits d'exercice illégal des professions médicales (art. 25 [19o]).
Divers amendements parlementaires, acceptés par le Gouvernement, sont venus restreindre encore le champ de l'amnistie.
Il s'agit en premier lieu des infractions liées à l'interruption volontaire de grossesse.
L'Assemblée nationale a pris l'initiative, en accord avec le Gouvernement,
d'exclure du bénéfice de l'amnistie l'infraction prévue par l'article L.
162-15 du code de la santé publique, créée par la loi no 93-121 du 27 janvier 1993, qui punit de deux années d'emprisonnement et de 30 000 F d'amende le fait d'empêcher une interruption volontaire de grossesse ou de tenter de le faire en perturbant le fonctionnement des hôpitaux ou en intimidant les personnes.
La portée de cette exclusion avait été toutefois limitée par le Sénat aux seules procédures ayant abouti à une condamnation à une peine d'emprisonnement, avec ou sans sursis.
Sur proposition de la commission mixte paritaire, le Parlement a finalement souhaité revenir au texte adopté par l'Assemblée mais en ajoutant à la liste des exclusions celle des délits liés à l'interruption volontaire de grossesse hors du cadre légal.
Sont donc exclus du bénéfice de l'amnistie, outre le délit prévu par l'article L. 162-15 du code de la santé publique, les délits prévus et punis par les articles L. 647 du code de la santé publique et 223-10 à 223-12 du code pénal et par les textes correspondants en vigueur avant le 1er mars 1994 (art. 25 [23o]).
Il s'agit ensuite des infractions liées aux accidents mortels ou corporels du travail, afin de ne pas permettre l'oubli des faits les plus graves en matière de sécurité du travail (art. 25 [28o]), de celles en matière de conditions de travail dans les transports routiers, dont l'actualité récente a encore rappelé toute l'importance (art. 25 [15o]), et du délit d'entrave à la mission de l'inspection du travail (art. 25 [14o]).
Il s'agit enfin de l'abandon de famille (art. 25 [5o]), de la violation de sépulture (art. 25 [17o]) et des infractions de rébellion ou d'outrages à agents ou d'atteintes à la sérénité de la justice (art. 25 [24o à 27o]).

IV. - Effets de l'amnistie (art. 17 à 24)

La loi ne remet pas en cause la portée habituelle des lois d'amnistie en ce qu'elles entraînent la remise de toutes les peines. Elle reprend certaines atténuations traditionnelles à ce principe et comporte des innovations.
Parmi les atténuations traditionnelles, s'inscrivent:
- le principe selon lequel l'amnistie n'entraîne pas restitution;
- la règle selon laquelle les sanctions pécuniaires supérieures à 5 000 F - à l'exception de celles prononcées en matière contraventionnelle, amnistiées sans condition par l'article 1er - ne seront amnistiées qu'après paiement,
exécution de la contrainte par corps ou, dans le cas des jours-amende,
exécution de l'incarcération.
Par ailleurs, la loi consacre pour la première fois les principes suivants: - la loi limite l'effet traditionnel de l'amnistie qui consiste à rétablir un condamné dans le bénéfice d'un sursis antérieur révoqué par la condamnation amnistiée; la loi prévoit désormais que, si la condamnation antérieure a été assortie d'une mise à l'épreuve ou d'une obligation d'effectuer un travail d'intérêt général et que la condamnation amnistiée est consécutive à des faits commis dans le cours de l'épreuve ou du travail, le bénéfice de ce sursis antérieur n'est pas rétabli (art. 17, alinéa 2).


Cette nouvelle disposition permettra que l'amnistie n'aboutisse pas à un
traitement plus favorable pour le condamné dont le sursis assorti d'une mise à l'épreuve ou d'une obligation de travail d'intérêt général a été révoqué par une nouvelle condamnation que pour le condamné dont le sursis probatoire a été révoqué par suite du non-respect des obligations qui lui étaient imposées;
- l'article 17, alinéa 4, prévoit que l'amnistie est sans effet sur la réduction de points affectant le permis de conduire, dès lors que ce retrait est intervenu, dans les conditions prévues à l'article L. 11-1 du code de la route (paiement de l'amende, émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, condamnation devenue définitive), avant le 18 mai 1995. Peu importe à cet égard que les points n'aient pas encore été matériellement retirés, cette opération pouvant nécessiter quelque délai en raison du retard pris dans certaines préfectures.


Le choix ainsi fait par le législateur sauvegarde l'institution du
permis à points qui, au demeurant, comporte son propre système de rachat,
notamment en cas de non-commission de nouvelles infractions;
- la loi rappelle, consacrant en cela la jurisprudence, que l'amnistie n'entraîne pas la restitution ou le rétablissement des autorisations administratives annulées ou retirées (art. 18-I);
- le législateur s'est par ailleurs efforcé de clarifier et de simplifier une situation juridique devenue complexe, voire incohérente, quant aux effets de l'amnistie sur les peines ou mesures complémentaires prononcées par les juridictions.
La loi dresse de façon exhaustive la liste des mesures de sûreté qui ne seront pas effacées par l'amnistie de la condamnation dans le cadre de laquelle elles auront été prononcées, qu'elles l'aient été à titre de peine principale ou à titre complémentaire: il s'agit de la faillite personnelle,
de l'interdiction du territoire français, de l'interdiction de séjour, de l'interdiction des droits civiques, des mesures de démolition et de remise en état ou en conformité des lieux, de la dissolution de la personne morale, de l'exclusion des marchés publics, et de l'interdiction de pénétrer dans une ou plusieurs enceintes sportives (art. 18-II).
Toutes les autres mesures disparaîtront donc avec l'amnistie de la condamnation, qu'elles aient été qualifiées par la jurisprudence de mesures de police ou de sécurité ou de mesures de réparation civile.
Les articles 19 à 24 comportent des dispositions classiques en matière d'amnistie: cas des condamnations multiples, absence de réintégration de droit dans les grades ou emplois ainsi que dans les ordres de décoration,
absence d'effet de l'amnistie sur les droits des tiers, interdiction du rappel des sanctions effacées par l'amnistie.
S'agissant de ce dernier point, l'article 23, alinéa 3, prévoit que le délit de rappel illicite d'une condamnation amnistiée est aussi applicable aux personnes morales.
Par ailleurs, l'article 23, alinéa 4, prévoit que la mention de condamnations se trouvant amnistiées pourra continuer pendant un certain délai à figurer dans le fichier national gérant le permis de conduire à points. Le retrait de points ne peut être en effet que la conséquence du paiement d'une amende forfaitaire ou d'une condamnation. L'autorité administrative doit en conséquence pouvoir motiver les retraits effectués en se référant à des condamnations amnistiées. Le système du permis à points comporte déjà un régime autonome de suppression des retraits de points.
Enfin, l'article 23, alinéa 5, prévoit la conservation, par le casier judiciaire, des informations relatives aux condamnations amnistiées,
auxquelles survit l'une des mesures visées à l'article 18.
En revanche, le législateur a souhaité, à la différence des lois d'amnistie précédentes, que l'amnistie de la condamnation n'entraîne pas l'amnistie corrélative de la condamnation pour évasion commise lors de l'exécution de la peine amnistiée.

VI. - Dispositions particulières

La présente loi d'amnistie est, comme les précédentes, applicable aux territoires d'outre-mer et à Mayotte (art. 28). L'inapplicabilité du nouveau code pénal dans ces territoires justifie cependant quelques dispositions particulières, prévues aux deux premiers alinéas de l'article 28. Pour la même raison, le dernier alinéa de ce texte continue à faire référence aux frais de justice, la réforme opérée par la loi du 4 janvier 1993 n'étant pas applicable localement.
Vous voudrez bien me rendre compte de toute difficulté que vous pourriez rencontrer dans l'application de la loi qui vient d'être votée et dans la mise en oeuvre des présentes instructions.

Paris, le 3 août 1995.

(1) L'expression << passible de dix ans d'emprisonnement >> s'applique à la peine prévue dans l'incrimination et non à la peine encourue réellement, qui peut être aggravée en raison de l'état de récidive, par exemple.
(2) Compte tenu des termes mêmes de l'article 25 de la loi, qui font référence à l'exclusion << du bénéfice de la loi >> dans son ensemble, les exclusions l'emportent sur les cas d'amnistie de droit.
(3) Il convient d'entendre le mot << véhicule >> dans son acception la plus large. Sont donc concernés les véhicules ou engins terrestres, fluviaux,
maritimes ou aériens.

I. - 3. Contestations relatives à l'amnistie


et constatation de celle-ci (art. 12 et 27)

Il est prévu, de manière traditionnelle, diverses règles de compétence en cas de contestations relatives au bénéfice de l'amnistie.
L'article 12 prévoit notamment que les contestations sont soumises aux règles de compétence et de procédure prévues par les deuxième et troisième alinéas de l'article 778 du code de procédure pénale.
L'article 27, reprenant une disposition introduite dans la loi de 1988,
règle le cas particulier des infractions amnistiées en raison des circonstances de fait visées à l'article 2 de la loi, en prévoyant que le ministère public constate l'amnistie. Le casier judiciaire national n'est en effet pas en mesure de traiter automatiquement ces dossiers, l'application éventuelle de l'amnistie résultant de la consultation de la procédure.

II. - Amnistie par mesure individuelle (art. 13)

Le texte de la loi reprend une disposition traditionnelle donnant au Président de la République la possibilité d'accorder l'amnistie des infractions n'entrant pas dans le champ d'application de l'amnistie de droit, d'une part aux personnes âgées de moins de ving et un ans au moment des faits et, d'autre part à des personnes ayant servi, de manière déterminante,
l'intérêt général (anciens combattants, résistants, scientifiques, etc.).
Il ne reprend en revanche pas la possibilité introduite par la loi de 1988 d'accorder la << grâce amnistiante >> des mesures d'interdiction du territoire français, pour lesquelles une mesure de grâce individuelle reste possible. Au surplus, le Parlement a souhaité conserver à l'amnistie par mesure individuelle son caractère de récompense exceptionnelle pour des jeunes majeurs et des citoyens s'étant particulièrement distingués.

III. - Amnistie des sanctions disciplinaires


et professionnelles (art. 14 à 16)

Les fautes disciplinaires et professionnelles commises avant le 18 mai 1995 sont amnistiées de plein droit, sous certaines réserves traditionnelles (art. 14).
Leur amnistie, lorsqu'elles ont également donné lieu à une condamnation pénale, est subordonnée à l'amnistie de l'infraction.
Les fautes constituant des manquements à la probité, aux bonnes moeurs ou à l'honneur ne peuvent être amnistiées que par une mesure individuelle du Président de la République.
Sont également amnistiés, sous les mêmes conditions, les faits retenus comme motifs de sanctions par un employeur (art. 15). Cette amnistie ne donne toutefois pas droit à réintégration, à la différence des dispositions des lois de 1981 et 1988. Il est en effet apparu au Parlement que cette mesure,
au demeurant peu efficace dans sa mise en oeuvre (quarante-quatre personnes seulement ont été réintégrées par suite de la loi de 1981 et 17 par suite de la loi de 1988), constituait une ingérence excessive de la loi dans des rapports de droit privé.
Le législateur n'a pas davantage souhaité ordonner, comme en 1981 et 1988,
la réintégration des étudiants ou élèves des établissements universitaires ou scolaires publics sanctionnés disciplinairement. En revanche, ces personnes se trouvent amnistiées par application des dispositions très générales de l'article 14.
Enfin, il convient d'observer que les sanctions administratives relatives au permis de conduire ne sont plus amnistiées alors qu'elles l'étaient dans les précédentes lois.

JACQUES TOUBON