Question écrite de
Mme Ana MIRANDA PAZ
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Commission européenne
Objet: Application des décrets Beneš en Slovaquie et droit de propriété
En 2007, le Parlement slovaque a proclamé la permanence de la validité en droit des dispositions des décrets Beneš. Adoptés en 1945, ces décrets ont institutionnalisé la discrimination à motivation ethnique à l’encontre des citoyens slovaques d’origine allemande et hongroise, ils ont privé les personnes appartenant aux minorités allemande et hongroise de leurs biens et de leur nationalité et ils ont instauré des mesures violant les droits humains fondamentaux, telles que le travail forcé. Les autorités slovaques font toujours appliquer rétroactivement les confiscations de biens et de terres sans indemnisation, en invoquant les décrets Beneš (voir affaire Bosits/Slovaquie portée devant la Cour européenne des droits de l’homme). Dernièrement, une affaire analogue relative à la confiscation à titre rétroactif, par le fonds foncier slovaque, de terrains privés situés dans la commune de Most pri Bratislave a été portée devant les tribunaux. Le droit de propriété est non seulement un droit fondamental consacré notamment par l’article 17 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, mais il peut aussi permettre aux détenteurs de biens fonciers de bénéficier de programmes financiers de l’Union, tels que la politique agricole commune. En pareils cas, l’application d’une loi discriminatoire n’est pas uniquement une question qui relève des droits de l’homme et viole l’article 2 du traité sur l’Union européenne, mais elle peut aussi avoir des incidences sur la mise en œuvre du droit européen.
La Commission entend-elle enquêter sur les éventuelles violations du droit fondamental à la propriété en Slovaquie?
Dépôt:8.4.2024
Réponse donnée par Mme Jourová, vice-présidente au nom de la Commission européenne (28 mai 2024)
L'article 17 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne (ci-après la «charte») prévoit que toute personne a le droit de jouir de la propriété des biens qu'elle a acquis légalement, de les utiliser, d'en disposer et de les léguer. Toutefois, conformément à son article 51, paragraphe 1, la charte prévoit que ses dispositions s'adressent aux États membres uniquement lorsqu'ils mettent en œuvre le droit de l'Union.
La Commission considère que les «décrets Beneš» sont des actes historiques, entrepris par les autorités de l'ancienne Tchécoslovaquie avant l'adhésion à l'Union européenne et qui ne continuent pas de produire des effets juridiques qui seraient contraires au droit de l'Union.
En conséquence, cette question relève de la compétence nationale et il appartient aux autorités slovaques de veiller à ce que les droits fondamentaux soient effectivement respectés et protégés conformément à leur droit national et à leurs obligations internationales dans le domaine des Droits de l'homme.