Mme Élodie Jacquier-Laforge interroge M. le ministre de l'intérieur sur les agressions dans les transports en commun depuis le début du confinement. De plus en plus de témoignages circulent sur les réseaux sociaux quant à l'augmentation des agressions dans les transports depuis le 17 mars 2020, date du début du confinement lié à l'épidémie de covid-19.
Les femmes en seraient les cibles principales. Afin d'assurer la continuité de la sécurité publique dans les transports, elle lui demande s'il a connaissance de cette recrudescence, si des chiffres existent et ce qui est mis en place par le Gouvernement pour y remédier.
Face à l'épidémie de covid-19, les forces de l'ordre se sont mobilisées pour faire respecter les règles du confinement décidées par le Président de la République le 16 mars 2020 et les mesures induites par l'état d'urgence sanitaire. Elles n'en ont pas moins continué, avec le professionnalisme, l'engagement et le sens du devoir qui font leur honneur, à assurer leurs missions fondamentales de sécurité et de protection des Français.
Tel a été le cas dans les transports en commun. En matière de délinquance, les données du service statistique ministériel de la sécurité intérieure font apparaître, pour la période allant du 16 mars au 10 mai 2020, une baisse de 83 % (et de 84 % pour les victimes de sexe féminin) du nombre de victimes dans les transports en commun (métro, train, autobus et tramway) par rapport à la même période de 2019 (4 650 victimes contre 28 100).
Les vols avec violences se distinguent avec une baisse moindre (- 64 %). Les faits de menaces, chantages et atteintes à la dignité ont chuté de 85 % et les violences sexuelles de 83 %. Les données relatives à la seule Ile-de-France font apparaître des évolutions quasiment identiques. Dans le métro, la baisse du nombre de victimes s'établit à 83 % (- 81 % pour les femmes).
Dans le train, elle s'établit également à 83 % (- 85 % pour les femmes). Dans les autobus et tramways, la baisse enregistrée est de 85 % (- 86 % pour les femmes). Ces chiffres doivent cependant être mis en regard de la moindre fréquentation des transports pendant cette période. Quoique difficile à quantifier (gratuité de certains transports, absence fréquente de « valideurs », etc.), la réduction du nombre de voyageurs a été considérable.
Sans disposer de données consolidées à ce stade, le Groupement des autorités responsables de transport évalue ainsi la fréquentation des réseaux de transports durant cette période à 5 % à 10 % de celle observée en temps normal. En Ile-de-France, la fréquentation du métro durant cette période a baissé de 94 % alors que la délinquance diminuait de 84 % (- 81 % pour les femmes).
Rapporté à la fréquentation, le « taux de victimation » a ainsi augmenté durant cette période dans le métro. Au-delà des données relatives à la période allant du 16 mars au 10 mai 2020, il peut être rappelé que la service statistique ministériel de la sécurité intérieure a publié en novembre 2019 une étude approfondie sur les vols et les violences dans les transports en commun, accessible sur le site internet du ministère de l'intérieur (rubrique « Interstats »).
Il doit également être rappelé que la sécurité dans les transports publics de voyageurs constitue de longue date et quelles que soient les circonstances un axe majeur de l'action des forces de l'ordre comme de nombreux autres acteurs publics. Elle est une mission essentielle des exploitants et des autorités organisatrices de transport.
La coopération des différents partenaires est donc une priorité. A ce titre, la direction générale de la police nationale dispose du service national de la police ferroviaire, service à compétence nationale placé sous l'autorité de la direction centrale de la police aux frontières et chargé de coordonner dans l'ensemble du territoire les acteurs chargés de la sécurisation dans le domaine ferroviaire.
Par ailleurs, les services de la direction centrale de la sécurité publique disposent dans certaines agglomérations de services spécialisés (3 services interdépartementaux de sécurisation des transports en commun et 6 unités de sécurisation des transports en commun) tandis qu'en Ile-de-France la sécurisation est coordonnée par la sous-direction régionale de la police des transports de la préfecture de police.
Les relations et les missions conjointes entre les forces de l'ordre et les services internes de sécurité de la RATP (groupe de protection et de sécurisation des réseaux) et de la SNCF (surveillance générale) en particulier sont soutenues et régulières sur l'ensemble des réseaux. Au niveau central, la direction générale de la police nationale dispose à cet égard d'une unité de coordination de la sécurité dans les transports en commun, structure mixte police-gendarmerie comprenant aussi des personnels de la RATP et de la SNCF.
Elle permet de renforcer la coordination stratégique et l'échange d'informations entre les forces de sécurité de l'Etat et les services internes de sécurité de la RATP et de la SNCF. Sur le plan opérationnel, policiers, gendarmes et agents de sécurité de la SNCF et de la RATP travaillent quotidiennement pour assurer la sécurité des transports publics de voyageurs.
En moyenne, plus de 2 000 policiers et gendarmes et plus de 4 000 agents de sécurité de la SNCF et de la RATP travaillent quotidiennement pour assurer la sécurité des transports publics de voyageurs. Par ailleurs, la posture Vigipirate, relevée au niveau maximal en Ile-de-France depuis les attentats de janvier 2015, se traduit par des patrouilles fréquentes dans les gares et aérogares.
Partout en France, les militaires de l'opération Sentinelle contribuent également à la sécurisation des transports en commun. De nouvelles avancées sont néanmoins nécessaires. L‘attaque ignoble commise récemment contre un chauffeur de bus à Bayonne, qui a coûté la vie à un homme et indigné la France, en témoigne, comme en témoignent les trop nombreuses incivilités et violences dont sont victimes les personnels des sociétés de transport comme les usagers.
Face à l'insécurité dans les transports en commun, le ministre de l'intérieur et le ministre délégué chargé des transports ont donc décidé de réunir le 5 août 2020, pour la première fois depuis 2016, le comité national de sécurité des transports en commun. Cette rencontre a permis un échange direct entre État, collectivités territoriales et professionnels des transports en commun.
A l'issue, plusieurs décisions ont été prises pour améliorer la sécurité de nos concitoyens dans les transports en commun :doublement des patrouilles de policiers et de gendarmes dans les transports en commun ;généralisation de la vidéoprotection, pour dissuader les auteurs et faciliter le travail d'enquête en cas d'infractions : les ministres souhaitent que tous les nouveaux bus, trains, métros en soient équipés ;mise en place d'une ligne téléphonique directe et dédiée entre les opérateurs de transports et les centres d'information et de commandement de la police nationale et les centres d'opérations et de renseignement de la gendarmerie nationale ;expérimentation, dans des gares d'Ile-de-France, à des heures matinales et tardives, de points d'accueil tenus par des policiers ou des gendarmes permettant une prise immédiate des plaintes pour les victimes d'infractions dans les transports ;extension, dans le cadre du continuum de sécurité, des pouvoirs des agents de sécurité privée afin de renforcer les moyens de lutte contre la délinquance ;généralisation du port de caméras individuelles par les agents des sociétés de transport au contact du public afin d'améliorer leur sécurité.
Dans ce domaine comme dans d'autres, le Gouvernement souhaite agir en partenariat avec les territoires. Sous l'autorité des préfets, un audit de sécurité de l'ensemble des réseaux de transports sera donc mené d'ici fin septembre pour identifier, partout en France, les bonnes pratiques et les mesures à prendre.