Mme Michèle Tabarot appelle l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la situation des minorités religieuses d'Irak et de Syrie et notamment celle des chrétiens d'Orient. La défaite de l'organisation terroriste Daesh ayant été proclamée dans ces pays, la question du retour des déplacés doit maintenant être pleinement prise en considération.
Un récent rapport de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) estime d'ailleurs qu'à la fin du mois de novembre 2017, 2,75 millions des déplacés en Irak étaient rentrés chez eux, tandis que 2,88 millions de déplacés étaient encore dénombrés. Si la tendance se poursuit, l'OIM estime que, dès 2018, le nombre de personnes de retour chez elles sera plus important que le nombre de réfugiés.
Il s'agit bien sûr d'un enjeu considérable que nous devons aborder avec une plus grande attention encore s'agissant des minorités qui ont subi de lourdes persécutions en raison de leur foi. C'est le cas des chrétiens d'Orient et d'autres communautés, dont le retour ne peut s'envisager que dans un cadre juridique reconnaissant leurs droits, au sein d'un État capable de leur apporter une protection.
La France et l'Union européenne ont un rôle éminent à jouer en ce sens dans le cadre des négociations et des échanges diplomatiques que nous avons avec ces pays. Aussi, elle souhaiterait qu'il puisse lui préciser les démarches déjà entreprises et les initiatives qu'il entend prendre afin de veiller à ce que les minorités religieuses puissent revenir au Moyen-Orient avec toutes les garanties de sécurité, de dignité et de tolérance auxquelles ils ont droit.
La France défend, au Proche et au Moyen-Orient comme partout dans le monde, la liberté de religion ou de conviction, inscrite à l'article 18 de la Déclaration universelle des droits de l'Homme. Elle est très engagée en faveur des victimes de violences ethniques et religieuses au Moyen-Orient, parmi lesquelles les chrétiens d'Orient et les personnes appartenant à d'autres minorités, par fidélité envers des populations qui lui sont proches, par cohérence avec son engagement en faveur des droits de l'Homme et parce qu'elle est convaincue que l'on ne pourra pas bâtir la paix dans la région si celle-ci perd sa diversité humaine, culturelle et spirituelle.
La France considère que le maintien de la diversité ethnique et religieuse du Moyen-Orient est une condition indispensable de l'évolution de cette région vers plus de démocratie, de liberté, de tolérance et de prospérité. La France agit de façon responsable pour faire cesser ces persécutions et trouver des solutions pour rétablir la paix.
Elle a pris des initiatives fortes pour mobiliser la communauté internationale, notamment en organisant un débat public au Conseil de sécurité le 27 mars 2015 et en organisant le 8 septembre 2015 une conférence internationale pour la protection des victimes de violences ethniques ou religieuses au Moyen-Orient qui a rassemblé une soixantaine d'Etats et 11 organisations internationales et qui a abouti à la présentation d'un plan d'action listant les priorités qu'il convient de mettre en œuvre dans le domaine politique, humanitaire et judiciaire.
La France poursuit ses efforts pour maintenir la mobilisation de la communauté internationale, avec le Plan d'action de Paris comme document de référence. Le 24 mai 2017, la conférence internationale de suivi à Madrid sur les victimes de persécutions ethniques et religieuses au Moyen-Orient, à laquelle ont pris part 59 Etats et une dizaine d'organisations internationales, a permis de dresser un bilan des actions entreprises au profit des populations minoritaires dans le cadre du Plan d'action agréé.
La visibilité de la France sur cette question est maintenue et le processus doit se poursuivre, la Belgique ayant annoncé son intention d'organiser une nouvelle conférence de suivi en 2018. L'internationalisation de ce dossier, suscitée par la France, est donc confirmée. En Irak, la France doit poursuivre son effort de stabilisation, notamment vers les régions d'origine des minorités, qui sont souvent celles où les destructions ont été les plus importantes et où le taux de retour est plus faible.
Il s'agit de garantir aux populations locales un retour en toute sécurité dans leurs zones d'origine, dans un contexte où près de 3 millions de personnes demeurent déplacées dans ce pays. Alors que l'Irak entre dans une période charnière à l'approche des élections législatives et locales, la France continuera de se mobiliser, aux côtés de ses partenaires de l'UE et de l'ONU, pour encourager les autorités irakiennes à garantir la sécurité des populations minoritaires et au-delà, pour mettre en place une gouvernance inclusive, à un niveau national mais aussi local, qui soit respectueuse de la diversité de l'Irak.
A titre national, un fonds de soutien aux victimes des violences ethniques et religieuses au Moyen-Orient a également été créé en 2015. Il appuie des projets mis en œuvre notamment par des ONG françaises proches du terrain, au profit des communautés minoritaires menacées, et contribue à assurer une présence et une visibilité spécifique de la France au sein des communautés concernées.
Par son biais, la France a déjà engagé 15 millions d'euros, sur près de 60 projets concrets, en Irak, en Syrie, au Liban, en Jordanie et en Turquie. Ces projets très divers ont porté principalement, en 2017, sur l'aide humanitaire en faveur des réfugiés et déplacés qui ne sont pas en mesure de revenir dans leur région d'origine (logement, santé, appui psycho-social), et sur l'appui au retour des personnes déplacées dans leurs localités d'origine (déminage et sécurisation, relance économique, réhabilitation des services de base).
Dans ce contexte, il a été décidé le 18 janvier 2017, dans le cadre du comité de suivi de la Conférence de Paris, de reconduire ce fonds de soutien, pour un montant de 10 millions d'euros sur deux ans. Dans la continuité de l'aide humanitaire, l'aide à la reconstitution du tissu social est une composante transversale des projets qui contribuent au rétablissement des services et à la renaissance d'une économie réelle, en fournissant des opportunités d'emplois aux jeunes notamment.
La France lutte également contre l'impunité des crimes commis en Syrie et en Irak en soutenant la documentation des crimes et violations des droits de l'Homme commis, quels qu'en soient les auteurs, et en mettant tout en œuvre pour que les responsables de ces crimes puissent être traduits devant des juges impartiaux et indépendants, dans le cadre de procès équitables.