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Cours de religion dans les écoles

Question écrite de Mme Christine Herzog - Éducation nationale

Question de Mme Christine Herzog,

Diffusée le 23 mai 2018

Mme Christine Herzog attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur le fait que le régime des cultes applicable en Alsace-Moselle inclut les cours de religion dans les écoles. Les quatre cultes dits « reconnus » sont : catholique, israélite, protestant luthérien et protestant réformé.

L'enseignement religieux s'effectue pendant les horaires obligatoires, les enfants pouvant bien entendu en être dispensés à la demande des parents. De plus, les chargés de cours de religion sont rémunérés par l'État. Cependant par le passé, un parlementaire mosellan a proposé de bouleverser le droit existant en introduisant le culte musulman dans le régime dit concordataire, y compris pour le financement des mosquées par les communes et pour les cours de religion.

Une décision du Conseil constitutionnel a heureusement cantonné le champ du droit local en précisant que la légitimité de celui-ci reposait exclusivement sur ses racines historiques ; de ce fait, il n'est pas possible de créer un droit local supplémentaire par rapport à l'héritage juridique existant lors du retour de l'ex Alsace-Lorraine à la France.

La question aurait donc pu être clarifiée, ce qu'a d'ailleurs entériné un rapport récent de l'Observatoire de la laïcité. Cependant, le parlementaire susvisé et d'autres responsables sont revenus à la charge. L'Institut du droit local (IDL) a alors proposé de contourner les garde-fous posés par le Conseil constitutionnel.

S'exprimant dans la presse (Républicain Lorrain du 21 novembre 2017), le président de l'IDL a ainsi évoqué l'artifice consistant à assimiler les cours de religion à un « enseignement interreligieux ». Selon lui « il ne s'agirait plus d'un enseignement confessionnel comme aujourd'hui mais de culture religieuse dans le sens large, ce qui permettrait d'y inclure le culte musulman ».

Elle lui demande si la loi Falloux (15 mars 1850) et les dispositions annexes permettent, sans changement législatif, de rebaptiser l'enseignement religieux sous le qualificatif d'enseignement interreligieux dans le seul but d'en faire profiter le culte musulman. Le cas échéant, elle souhaiterait savoir si cela permettrait, comme certains le réclament, de rémunérer les enseignants donnant les cours de religion musulmane.

Enfin, elle lui demande s'il ne serait pas discriminatoire d'édicter une mesure ostensiblement motivée par le culte musulman alors que de nombreuses autres religions sont pour le moins, tout aussi dignes d'intérêt (chrétien orthodoxe, hindouiste, bouddhiste…).

Réponse - Éducation nationale

Diffusée le 17 octobre 2018

L'enseignement dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin est régi par des dispositions particulières constituant la base d'un droit local, dont l'existence est qualifiée de principe fondamental reconnu par les lois de la République par le Conseil constitutionnel (décision n° 2011-157 QPC du 5 août 2011, Société Somodia).

Parmi ces règles particulières figure l'obligation d'assurer un enseignement religieux dans tous les établissements scolaires publics de ces départements. Cette obligation découle de la loi Falloux de 1850 (article 23) et d'une ordonnance allemande du 10 juillet 1873, modifiée par l'ordonnance du 16 novembre 1887 (article 10A), dont les dispositions ont été maintenues dans ces départements par les lois du 17 octobre 1919 et du 1er juin 1924 et l'ordonnance du 15 septembre 1944.

Le Conseil d'État s'est prononcé sur le périmètre de cette obligation et a jugé qu'elle impliquait, pour les pouvoirs publics, d'organiser un enseignement de la religion pour chacun des quatre cultes reconnus en Alsace-Moselle (CE, 6 avril 2001, n° 219376, publiée au recueil Lebon). Par ailleurs, dans sa décision n° 2012-297 QPC du 21 février 2013, le Conseil constitutionnel a considéré qu'en proclamant que la France est une République laïque, la Constitution n'a pas pour autant entendu remettre en cause les dispositions législatives ou réglementaires applicables en Alsace-Moselle lors de l'entrée en vigueur de la Constitution et relatives à l'organisation de certains cultes et, notamment, à la rémunération de ministres du culte.

Il résulte de ces dispositions particulières et de leur interprétation jurisprudentielle, d'abord, que l'obligation de l'État de dispenser un enseignement religieux est circonscrite aux seuls quatre cultes reconnus en Alsace-Moselle avant l'entrée en vigueur de la Constitution (le culte catholique, les deux cultes protestants, correspondant, d'une part, à l'Église luthérienne, dite Église de la confession d'Augsbourg d'Alsace et de Lorraine et, d'autre part, à l'Église réformée d'Alsace et de Lorraine, ainsi que le culte israélite).

L'État ne saurait donc, sur le fondement du droit local, organiser et financer l'enseignement d'un autre culte, notamment du culte musulman, dans les écoles publiques de ces départements. La loi ne saurait en tout état de cause en prévoir la possibilité, le Conseil constitutionnel ayant jugé qu'à défaut de leur abrogation ou de leur harmonisation avec le droit commun, ces dispositions particulières ne peuvent être aménagées que dans la mesure où les différences de traitement qui en résultent ne sont pas accrues et où leur champ d'application n'est pas élargi (décision n° 2011-157 QPC précitée).

Une autre conséquence réside dans le fait que l'organisation d'un enseignement confessionnel dans les écoles publiques de ces départements pour ces quatre cultes constitue une obligation s'imposant à l'État. Le Conseil d'État a en outre précisé dans sa décision du 6 avril 2001 que « [Cette] obligation (…) constitue une règle de valeur législative s'imposant aux pouvoirs réglementaires ».

Ainsi, dès lors que la mise en place de cours de « culture religieuse » ou « d'enseignement interreligieux » à la place des enseignements religieux aurait nécessairement pour conséquence de vider ces enseignements de leur caractère confessionnel, une telle mesure ne pourrait être considérée comme légale au regard des obligations qui incombent à l'État dans ce domaine.

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