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Crise au Cameroun entre pouvoir central et séparatistes anglophones

Question écrite de M. Jean-Paul Lecoq - Ministère de l'Europe et des affaires étrangères

Question de M. Jean-Paul Lecoq,

Diffusée le 9 juillet 2018

M. Jean-Paul Lecoq alerte M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la crise qui a lieu au Cameroun depuis 2016 entre le pouvoir central camerounais et des séparatistes anglophones des provinces du sud-ouest et du nord-ouest. En 2016, les régions majoritairement anglophones ont manifesté contre l'imposition du français et du droit romano-germanique dans ces régions dominées par l'anglais et par la Common Law.

Face à ces revendications, le pouvoir central envoya la police disperser la population et effectuer des arrestations arbitraires. Bien que dans le même temps, le président camerounais Paul Biya accepta quelques concessions, avec notamment la mise en place d'une commission pour la promotion du bilinguisme et le multiculturalisme, les mouvements de grève se sont durcis avec des émeutes et des prises d'administrations officielles.

À son tour, le gouvernement a durci la répression en tirant à balles réelles sur les manifestants. Des groupes armés se sont formés en réaction à l'accentuation de la répression et le mouvement se radicalisa de plus en plus avec une montée des pro-sécessionnistes. Le 1er octobre 2017, le leader indépendantiste anglophone Sisiku Ayuk a déclaré symboliquement l'indépendance de la république d'Ambazonie, entraînant une escalade démesurée de la violence au Cameroun.

Les forces gouvernementales tirèrent alors sur une manifestation pacifique. Des arrestations arbitraires, des actes de tortures et des violences sexuelles furent également constatés. Les séparatistes ont répliqué en attaquant les forces de sécurités et en pratiquant le terrorisme comme moyen de lutte armée, notamment sur les administrations centrales, sur certaines écoles et sur des collaborateurs supposés.

La violence a frôlé le point paroxystique avec la destruction de villages entiers par les troupes gouvernementales. Depuis des violations extrêmement graves du droit humanitaire ont lieu continuellement, avec notamment la violation du noyau indérogeable des droits de l'Homme. La population civile se trouve prise en étau entre les violences des séparatistes et des forces gouvernementales.

Le lundi 11 juin 2018, Amnistie International alerte une nouvelle fois sur la situation préoccupante au Cameroun. Ainsi l'ONG estime que « dans les régions anglophones du Cameroun, les forces de sécurité ont tué aveuglément, arrêté et torturé des personnes lors d'opérations qui ont fait des milliers de déplacés ».

Le rapport constate également la destruction de villages, comme le village de Kwakwa entièrement détruit par les forces gouvernementales. De l'autre côté, le rapport constate également des violations du droit humanitaire par les séparatistes qui ont « incendié des écoles et agressé des enseignants et les forces de sécurité ont infligé des actes de torture, tiré sur des foules et détruit des villages ».

La France et la Cameroun entretiennent des relations diplomatiques cordiales, avec notamment des partenariats divers comme des coopérations culturelles, de l'aide au développement ou encore des accords stratégiques sur la défense. En plus de la langue française qui rapproche le peuple camerounais et le peuple français, le Cameroun fait partie de la zone du franc de la coopération financière en Afrique centrale, accentuant la proximité entre le pouvoir camerounais et le pouvoir français, la France étant un pays proche du Cameroun en plus d'être un membre du Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations unies.

Par conséquent, il souhaite l'alerter sur la situation très préoccupante au Cameroun. Il souhaiterait également savoir quel moyen le Quai d'Orsay compte mettre en œuvre pour faire cesser ces violations répétées du droit humanitaire et pour trouver une solution pacifique au conflit qui déchire le Cameroun.

Réponse - Ministère de l'Europe et des affaires étrangères

Diffusée le 27 août 2018

La France suit avec attention la situation au Cameroun, pays ami et partenaire, avec lequel elle entretient une coopération dense et diversifiée, active sur l'ensemble du territoire, y compris dans les régions anglophones. La France a exprimé à plusieurs reprises sa préoccupation concernant l'évolution de la situation dans les deux régions anglophones.

Elle appelle l'ensemble des acteurs à la retenue et à l'arrêt des violences. Elle condamne fermement les crimes commis contre des représentants des forces de l'ordre et rappelle la nécessité, pour les forces de défense et de sécurité, d'agir de manière irréprochable et dans le respect des droits de l'Homme.

La France est convaincue que seul le dialogue permettra de répondre, de manière pacifique et durable, aux préoccupations de toutes les parties, dans le respect de l'unité et de l'intégrité du pays. La France est prête, en concertation avec ses partenaires internationaux, à soutenir tous les efforts qui pourront être menés en ce sens.

La nature bilingue et biculturelle du Cameroun est un atout dans le contexte de mondialisation et la France forme le vœu que les Camerounais puissent en tirer pleinement parti pour leur développement. Ce sont les messages que le secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères a passés au président Paul Biya et aux autorités camerounaises lors de son déplacement au Cameroun les 28 et 29 juin dernier.

A cette occasion, le secrétaire d'Etat s'est rendu à Buea, dans la région anglophone du sud-ouest, où il a rencontré les autorités locales ainsi que des représentants de la société civile.

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