DÉLOCALISATION DE L'ACTIVITÉ AUTOMOBILE
M. le président. La parole est à M. Éric Coquerel.
M. Éric Coquerel. J'aurais voulu interroger le ministre de l'économie et des finances, puisque je vais le citer, mais il n'est pas là, retenu auprès du Président – et en même temps premier ministre, dirait-on – Emmanuel Macron. Cette manie de faire des annonces en plein milieu d'une séance de questions au Gouvernement est la marque d'un mépris de plus en plus évident de la représentation nationale !
M. Christian Hutin. Il a raison.
M. Pierre Cordier. Ce n'est pas nouveau.
M. Éric Coquerel. Ce n'est pas grave : on va faire comme si!
Le 9 mars dernier, Bruno Le Maire s'est déclaré prêt à recourir à tous les moyens, y compris la nationalisation, pour protéger les entreprises françaises menacées par la crise du coronavirus. Je ne l'ai pas cru : j'ai bien fait. Hier, en effet, à la question : « Est-ce que vous allez exiger de Renault qu'il garde ouverts tous ses sites industriels en France ? », il a répondu non.
À la question : « Est-ce que vous pouvez nous dire qu'il n'y aura pas de suppressions de postes ? », il a encore répondu non. Ce gouvernement se renie sans complexes, sans honte !
Vous avez parlé de contreparties aux aides de l'État au secteur automobile, mais vous avez déjà signé un chèque en blanc de 20 milliards d'euros aux entreprises ! Vous annoncez donner 5 milliards d'euros à Renault sans forcer le groupe à produire en France !
Le covid-19 a bon dos : Renault n'a pas attendu l'épidémie pour délocaliser ses activités ; voilà des années qu'il le fait au nom de sa stratégie financière. La part de véhicules qu'il produit en France est passée de 54 % en 2004 à 30 % en 2012, avant de tomber à 17 % en 2017. Derrière ces chiffres, c'est la mort sociale de milliers de salariés.
Dans le même temps, vous avez distribué à Renault des centaines de millions d'euros rien qu'en crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi. Regardez le résultat, naïfs que vous êtes !
Et vous allez continuer à donner à ces gens l'argent des Français, sans contrepartie ? Vous parlez de créer des voitures plus écologiques ; mais favoriser les délocalisations, abandonner l'idée de relocalisation, est-ce polluer moins ? Non, évidemment ! Avez-vous changé de logiciel depuis l'épidémie ? Non ! Je vous le demande, puisque vous abandonnez nos usines : à quoi servez-vous ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.
Mme Agnès Pannier-Runacher,Monsieur le député, vous avez raison en ce qui concerne l'évolution de la part des voitures fabriquées en France par Renault entre 2004 et 2017 : passant de 51 % à 17 %, elle a bien été divisée par trois. Mais, de 2017 à 2019, le Gouvernement a permis à l'emploi industriel d'augmenter, ce qui n'était pas arrivé depuis 2000.
M. Fabien Di Filippo. C'est la conjoncture qui l'a augmenté !
Mme Agnès Pannier-Runacher,Le Gouvernement a fait en sorte que le nombre de sites industriels ouverts en France l'emporte sur celui des sites fermés ; ce n'était pas arrivé depuis quinze ans. Le Gouvernement a aussi fait de la France l'une des premières destinations européennes des investissements directs étrangers. Et l'amélioration devrait rester sensible en 2019.
M. Pierre Cordier. Pas partout !
Mme Agnès Pannier-Runacher,Si je vous rejoins donc concernant le diagnostic, nous ne vous avons pas attendu pour agir. C'est tout l'enjeu du plan de soutien au secteur automobile que nous présentons aujourd'hui. Au cœur du dispositif, la transition écologique et énergétique : concrètement et sans déni,…
M. Éric Coquerel. Répondez de manière concrète ! Qu’allez-vous demander à Renault ?
Mme Agnès Pannier-Runacher,…le plan permet de développer le véhicule électrique.
M. Christian Hutin. Les gens n’ont pas les moyens de s’acheter des voitures électriques ! Et ceux qui habitent en immeuble ne peuvent pas la brancher pour la recharger !
Mme Agnès Pannier-Runacher,Il permet également la relocalisation en France de la production de chaînes de traction électrique et de véhicules. Voilà du concret, voilà des engagements.
Il permet enfin que l'ensemble de la filière soit solidaire, de sorte que les sous-traitants, longtemps laissés en posture délicate, surtout en période de crise, par les producteurs et les sous-traitants de rang 1, soient désormais accompagnés par eux.
M. Éric Coquerel. Quelles sont les conditions ? C'est du pipeau.