Mme Mathilde Paris alerte Mme la ministre déléguée auprès de la ministre des solidarités et des familles, chargée des personnes handicapées, sur les conséquences de la décision du Conseil d'État du 20 février 2023 reclassant un habitat inclusif avec six personnes ou plus en établissement recevant du public (ERP) de type J.
Bien qu'utile pour assurer la sécurité des personnes en situation de handicap, cette décision signifie que les bailleurs devront respecter une réglementation plus stricte en matière de sécurité incendie, occasionnant ainsi des coûts supplémentaires d'adaptation et de construction, ce qui va remettre en cause le développement actuel de l'habitat inclusif.
L'habitat inclusif est un habitat accompagné et partagé par des personnes en situation de handicap moteur et des personnes âgées. Ce sont des logements indépendants regroupés au sein desquels les habitants disposent à la fois d'espaces de vie individuels et d'espaces communs et où ils bénéficient d'un accompagnement personnalisé selon leurs besoins médico-sociaux et sanitaires.
Or un récent arrêt du Conseil d'État, remet en question la qualité d'habitat ordinaire, de l'habitat inclusif en le requalifiant de bâtiment ERP de type J, ce qui entraîne des surcoûts pour les constructeurs et les bailleurs sociaux qui risquent de se désintéresser de ces projets locatifs. Ainsi, à la suite de la décision du Conseil d'État, un habitat inclusif du Mans s'est retrouvé confronté à une fermeture administrative, (en raison du non-respect de ces normes ERP de type J) et tous les occupants, menacés d'une expulsion, alors qu'aucune solution de relogement adaptée à leur handicap n'a été trouvée.
Ainsi, cette requalification en ERP de type J rentre en contradiction avec la philosophie initiale de l'habitat inclusif, qui se définit comme un logement privé de droit commun et qui tend à s'éloigner du modèle de l'établissement afin de garantir un cadre de vie plus agréable à ses occupants. De plus, elle engage d'importants travaux de mise en conformité aux normes ERP, occasionnant ainsi des coûts multiples que les porteurs de projet n'ont pas forcément les moyens d'assumer et qui pourraient entraîner le désengagement des bailleurs sociaux et privés, au regard des surcoûts associés.
En effet, pour un ERP, les normes de construction ne sont pas les mêmes que pour une habitation « classique » et imposent, notamment : des trappes de désenfumage, des portes coupe-feu, des lumières dans les parties collectives qui restent allumées même en cas de forte chaleur, des alarmes incendies, etc.
Elles entraînent également des modifications de la structure avec l'utilisation de matériaux résistant au feu. Le besoin de normes de sécurité incendie adaptées et renforcées pour les locaux accueillant des personnes en situation de handicap est nécessaire, comme l'a rappelé le dramatique incendie ayant fait onze morts il y a quelques semaines, au sein d'un gîte de vacances accueillant des personnes en situation de handicap.
Néanmoins, bien que ce règlement ait un objectif, incontestablement louable, assurer la sécurité des résidents, il risque de conduire à une remise en cause d'un grand nombre de projets et à un désintérêt des bailleurs privés et sociaux au regard des surcoûts associés aux normes ERP de type J. Au regard de l'ensemble de ces considérations, elle lui demande d'étudier la possibilité d'une mise en place de mesures financières compensatoires de ces surcoûts pour les porteurs de projet d'habitat inclusif et les bailleurs afin de les encourager à poursuivre la construction et la gestion de ce type d'habitat, pour assurer ainsi leur développement et leur pérennité.