Mme Joëlle Garriaud-Maylam attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et du développement international sur le contenu du protocole additionnel à la convention d'entraide judiciaire en matière pénale avec le Maroc, prochainement examiné par le Parlement et pour lequel le Gouvernement a engagé la procédure accélérée.
Suite à plusieurs mois de tensions franco-marocaines engendrées par des plaintes de l'Action des chrétiens pour l'abolition de la torture, un protocole additionnel à la convention d'entraide judiciaire en matière pénale a été négocié avec le Maroc, afin de relancer la coopération judiciaire avec ce pays.
Ce texte, dont plusieurs dispositions sont inédites en matière d'entraide judiciaire, pourrait porter atteinte à la possibilité d'assigner en justice en France des personnes soupçonnées de crimes graves se trouvant sur son territoire, mais aussi mettre en péril les droits à un procès équitable de Français victimes ou accusés de crimes commis au Maroc.
Nombre d'observateurs s'inquiètent de l'obligation d'information instaurée par ce texte, chaque pays devant immédiatement notifier à l'autre toute procédure pénale ouverte sur son territoire qui pourrait engager la responsabilité d'un ressortissant de l'autre pays. Cette disposition contredit le principe du secret de l'enquête et de l'instruction tel que posé par l'article 11 du code de procédure pénale, indispensable pour mettre les juges à l'abri d'éventuelles pressions.
Elle pourrait être particulièrement grave s'agissant d'éventuels crimes économiques à l'encontre d'investisseurs français au Maroc, ouvrant la porte à des risques de destructions de preuves ou d'intimidation de témoins.
En tant que représentante des Français de l'étranger, elle s'inquiète des risques afférents à l'instauration d'une obligation de renvoi prioritaire, permettant au pays sur le territoire duquel les faits ont été commis de pouvoir en priorité traiter ou clore une affaire, qu'il s'agisse d'une affaire pénale grave ou de petite délinquance.
À ce titre, les autorités marocaines pourraient ainsi empêcher un juge français d'enquêter sur un délit commis au Maroc à l'encontre d'une victime française.
Bien consciente de l'importance de relancer la relation franco-marocaine, elle souligne que cela ne doit pas se faire au prix de la sécurité juridique de nos ressortissants et demande quelles garanties ont été obtenues par le Gouvernement français pour sécuriser l'accès à la justice des Français établis au Maroc ou susceptibles d'être en relation avec la justice marocaine.