M. Jean-Noël Guérini appelle l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la présence non signalée de nanoparticules dans de nombreux aliments industriels. Une enquête de 60 millions de consommateurs, publiée dans son numéro de septembre 2017, aboutit à des conclusions sans appel.
Les dix-huit produits sucrés testés contenaient tous sans exception des nanoparticules de dioxyde de titane (additif E171), dans des proportions variées. Pour autant, elles n'étaient pas signalées sur les emballages comme le prévoit l'article 18 du règlement européen n° 1169/2011 du 25 octobre 2011 concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires, qui précise, sans mentionner de seuil, « le nom des ingrédients est suivi du mot « nano » entre crochets ».
Or ces substances, qui n'ont d'autre objet que de blanchir et d'intensifier la brillance des confiseries, des plats préparés ou des dentifrices, sont potentiellement toxiques. En effet, de taille infinitésimale, elles peuvent aisément passer les barrières physiologiques et se retrouver dans le foie, le cur, les poumons, mais également se disséminer dans l'environnement.
En janvier 2017, une étude menée par l'institut national de la recherche agronomique (INRA) concluait ainsi que l'exposition chronique au E171 favorisait la croissance de lésions précancéreuses chez le rat. En avril 2017, l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation (Anses) rendait à son tour un avis inquiétant, après avoir observé que le dioxyde de titane entraînait dans le côlon des rats une croissance accélérée de lésions initialement bénignes comme les polypes et possédait donc de « potentiels effets promoteurs de la cancérogenèse du E171 ».
Ce constat engage à conduire, comme le recommande l'Anses, « les études nécessaires à la parfaite caractérisation du danger associé au E171 ».
En conséquence, il lui demande ce qu'elle compte mettre en uvre, afin de s'assurer de l'innocuité des nanoparticules dans l'alimentation et, en attendant d'avoir pu mener les études nécessaires, d'informer explicitement le consommateur de la présence d'additifs suspects.
Les nanomatériaux, substances à l'échelle du milliardième de mètre, présentent des propriétés différentes de celles des substances chimiques « conventionnelles », ce qui peut se traduire par une toxicité potentielle plus importante du fait de leur taille et de leur capacité de pénétration dans l'organisme.
Aujourd'hui, de nombreux produits contenant des nanomatériaux sont disponibles dans des secteurs tels que l'industrie agro-alimentaire, l'automobile, le bâtiment, les produits cosmétiques et la pharmacologie. Les pouvoirs publics sont très attentifs à l'évaluation des risques sanitaires liés aux nanomatériaux, et en particulier au dioxyde de titane (TiO2) utilisé en tant qu'additif alimentaire (E171).
Consécutivement aux conclusions d'une nouvelle étude de l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) menée sur des animaux publiée le 20 janvier 2017 qui montre que l'exposition orale au TiO2 est susceptible d'entraîner des effets sur la santé chez des animaux, les ministères chargés de l'économie, de la santé et de l'agriculture ont décidé de saisir conjointement l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) afin de déterminer si l'additif alimentaire E171 présente un éventuel danger pour les consommateurs.
Cette saisine s'inscrit dans le cadre des travaux de l'agence déjà engagés à la demande du Gouvernement, le 17 octobre 2016, sur l'impact potentiel sur la santé des nanomatériaux présents dans l'alimentation de manière plus générale. L'ANSES a publié son avis en avril 2017 et conclut que l'étude de l'INRA, à elle seule, ne permet pas de remettre en cause l'avis de l'autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) sur les risques liés à l'utilisation du TiO2 en tant qu'additif alimentaire.
Pour parfaire la caractérisation du danger associé au TiO2 (notamment les effets promoteurs de la cancérogénèse), il est nécessaire de réaliser des études complémentaires. L'ANSES précise que dans le cadre du Programme national de recherche Environnement-Santé-Travail (PNREST), d'autres études devraient être publiées prochainement sur des effets potentiels du TiO2.
De plus, la Commission européenne a également lancé un appel à données sur le dioxyde de titane en 2017, duquel il est ressorti que des études sur la taille et des études de toxicité étaient actuellement en cours par des industriels. L'ensemble de ces résultats devra faire l'objet d'un réexamen par l'EFSA dans le cadre de son évaluation des additifs alimentaires.
L'évaluation du TiO2 sous toutes ses formes est également prévue au programme de travail de l'ANSES pour 2018 dans le cadre du règlement européen REACH. Les premiers résultats des travaux de l'ANSES dans le cadre de la saisine générale sur les nanomatériaux dans l'alimentation sont prévus en juin 2018 et un avis final est attendu pour décembre 2018.
À l'échelle européenne, des réglementations sectorielles prévoient des dispositions concernant l'identification de la présence de nanomatériaux et la nécessité d'en informer les consommateurs via un étiquetage « nano » sur les produits en contenant (cosmétiques, biocides et denrées alimentaires). Le ministère chargé de l'économie (DGCCRF) a lancé plusieurs analyses concernant la présence de nano-ingrédients dans les denrées alimentaires dont les premiers résultats ont été présentés lors des États généraux de l'alimentation et seront également présentés à la Commission européenne.
La DGCCRF poursuivra en 2018 ses contrôles concernant l'étiquetage des nano-ingrédients. Le service commun des laboratoires (SCL) de la DGCCRF travaille dans le cadre d'un projet européen sur la mise au point d'une méthode d'analyses harmonisée des nanoparticules pour début 2018.