M. Joël Labbé attire l'attention de Mme la ministre du travail sur l'arrêt au 15 mars 2019 du financement des formations des artisans causé par le déficit du fonds d'assurance formation des chefs d'entreprise artisanale (FAFCEA), qui a dépassé la barre des 30 millions d'euros.
Depuis le 1er janvier 2018, les contributions à la formation professionnelle des 1 200 000 chefs d'entreprise exerçant une activité artisanale sont collectées par les agences de l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) (et non plus par les services fiscaux), qui versent ensuite l'argent au FAFCEA, conformément à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.
Ce transfert a entraîné un assèchement de la collecte, donc des ressources du FAFCEA, en raison de l'impréparation de cette réforme. Sur la base des données du Trésor public précédemment chargé de son recouvrement, la collecte 2018 aurait dû être égale à celle de 2017, soit 72 millions d'euros. Après transfert, elle s'élève à 33,8 millions d'euros
La confusion dans laquelle s'est effectué ce transfert a fait disparaitre 170 000 entreprises cotisantes répertoriées précédemment des fichiers URSAAF, alors que dans le même temps, un nombre important de chefs d'entreprise ayant le statut de salarié n'ont pas versé la totalité de leur contribution.
Si aucune décision corrective n'est prise au plus vite, plus aucun artisan, conjoint collaborateur ou micro-entrepreneur ne pourra bénéficier des cofinancements formation, alors que les besoins n'ont jamais été aussi importants, pour faire face notamment aux défis de la transition énergétique et numérique.
Le développement des entreprises artisanales face à une concurrence toujours plus forte ne pouvant se maintenir sans une formation continue de qualité, il lui demande quelles mesures le Gouvernement entend mettre en place au plus vite pour rétablir ce préjudice porté à l'ensemble des entreprises artisanales du territoire.
L'article 41 de la loi du 8 août 2016 relative à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels a confié aux Unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations Familiales (URSSAF) la mission de recouvrement de cette contribution pour le compte des fonds de formation des artisans et de leurs chambres des métiers à compter de l'année 2018.
Il s'agit d'une mesure de simplification puisque les URSSAF sont déjà en charge de la collecte de cette même contribution pour le compte des fonds de formation des commerçants et des professions libérales. Les artisans assujettis à cette contribution comprennent : les artisans ayant le statut de travailleur indépendant, soit 414 000 cotisants ; les chefs d'une entreprise artisanale relevant du régime général de la sécurité sociale, soit 350 000 cotisants.
La cotisation est de 118 euros par an. Pour les premiers, la cotisation est appelée par les URSSAF au moment de l'échéance normale des cotisations sociales de novembre. Son recouvrement n'a posé aucune difficulté aux URSSAF en matière de recouvrement. Pour les seconds, le paiement de la contribution suppose une démarche volontaire de leur part puisqu'elle est collectée avec les cotisations de leurs salariés.
Or, seulement 20 % de la population concernée a accompli l'obligation de déclaration et de paiement à la date prévue, ce qui explique que seulement 11 M ont été encaissés sur 41 M attendus. Les URSSAF ont mené une campagne de relance individuelle des cotisants concernés. À ce jour celle-ci n'a pas été suivie d'effets significatifs.
Certains redevables contestent en effet le principe de la légitimité de leur assujettissement comme artisans : les chefs d'entreprise artisanale cotisent à la fois en tant que salariés du régime général auprès d'un organisme paritaire, d'une part, et en tant que chef d'entreprise artisanale auprès du fonds d'assurance formation des chefs d'entreprise artisanale (FAFCEA) ou des chambres régionales des métiers, d'autre part.
C'est la raison principale de la baisse de ressources des fonds de formation. Afin de ne pas interrompre le financement des formations, des mesures ont été prises rapidement au cours de l'année 2018 en faveur du FAFCEA et des chambres régionales des métiers, l'Agence France Trésor puis l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale leur ont avancé jusqu'à 22,6 M.
Et, des discussions se sont engagées avec les acteurs, notamment les chambres des métiers pour poursuivre les actions de formation. Pour l'année 2019, afin que les conseils de formation disposent d'un budget leur permettant de répondre aux demandes de financement de formations des artisans, la sécurité sociale a également réalisé une avance au FAFCEA ainsi qu'aux chambres régionales des métiers et de l'artisanat, représentant l'intégralité de l'enveloppe de contribution à la formation professionnelle collectée en février 2019, soit près de 39 M, sans imputer sur cette somme le montant des avances précédemment consenties.
Les pouvoirs publics ont donc pris toutes les mesures utiles pour éviter un impact sur les formations à court terme. Pour l'avenir, après plusieurs réunions de concertation avec les représentants des artisans, une réflexion globale a été lancée avec l'appui de l'Inspection générale des affaires sociales, sur le système de la formation des travailleurs non-salariés afin de formuler des perspectives et des pistes d'amélioration dans sa gestion, son financement, ses modalités de suivi et de contrôle, dont les conclusions sont attendues pour juin 2019.
De plus, les pouvoirs publics ont demandé au conseil d'administration du fonds d'assurance formation du commerce, de l'industrie et des services (FAF-AGEFICE) de mobiliser les réserves dont il dispose en soutien à la formation des artisans, sous forme de prêt aux chambres des métiers de l'artisanat et au FAFCEA.
Il est en effet nécessaire de trouver une solution pérenne puisqu'une partie des sommes nécessaires au financement n'ont pas été versées. Dans l'attente des résultats de cette réflexion, en droit, les contributions qui n'ont pas été versées restent dues.