M. Fabien Gay attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion et du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, chargée de l'enseignement et de la formation professionnels sur le projet de réforme de la voie professionnelle, dont le Gouvernement prévoit l'entrée en vigueur en septembre 2023.
Construit dans l'idée de rapprocher le lycée professionnel du modèle de l'alternance, ce projet de réforme se fonde essentiellement sur le doublement des périodes de stage que les élèves sont tenus d'accomplir dans l'année. Cette réorganisation induit nécessairement une révision du programme scolaire des lycées professionnels.
De toute évidence, il est certain que l'accroissement du temps dédié aux stages professionnels conduira en contrepartie à la diminution des heures d'enseignement. Or, les élèves scolarisés en lycée professionnels ont, comme tout autre lycéen ou lycéenne, besoin de maîtriser les savoirs fondamentaux que ces heures d'enseignement leur permettent précisément d'acquérir.
À cet égard, il est important de rappeler que ces heures d'enseignement équipent les élèves de lycée professionnel d'un bagage de connaissances qui leur permet, dans la suite de leur parcours de vie, de faire le choix d'une réorientation si telle est un jour leur volonté. En outre, la maîtrise de ces savoirs leur confère la possibilité de s'inscrire par la suite dans un cursus d'études (BTS, licence, etc) et de se réorienter si ils ou elles se le souhaitent.
Or, en l'état actuel du projet de réforme, le doublement des périodes de stage aura pour conséquence d'hyperspécialiser les élèves et ce, dès leurs années de lycée. Dans un contexte de sélectivité des études supérieures toujours plus accrue, en particulier du fait de la mise en place de Parcoursup, la possibilité pour les élèves de lycée professionnel de s'inscrire en BTS ou en licence s'en trouvera dès lors considérablement affectée.
À cela s'ajoute la perspective revendiquée par le projet de réforme de faire correspondre la formation des élèves de lycée professionnel avec les secteurs de l'économie les plus touchés par un déficit de personnel. Il s'agit notamment des métiers de l'aide à la personne, de la restauration et du bâtiment.
Or, la pénurie de personnel rencontrée dans ces secteurs ne vient aucunement des modalités actuelles d'enseignement en lycée professionnel. Elle est intrinsèquement liée aux rémunérations précaires imposées à ces travailleurs et travailleuses, en comparaison des conditions de travail difficiles qui caractérisent pourtant leurs métiers.
Dès lors, la perte d'attractivité de ces métiers ne peut avoir pour solution qu'une revalorisation conséquente des salaires et une amélioration des conditions de travail. Or, le projet de réforme du lycée professionnel semble plutôt tendre vers la mise à disposition de lycéennes et lycéens dont les stages ne sont pas rémunérés dans ces secteurs en tension, comme en témoigne l'importante augmentation de leur volume d'heures de stages.
À cela s'ajoute la réduction de leurs chances d'accéder à des études supérieures et à des réorientations, qui limitera indéniablement leur possibilité de changer de métier si ils et elles le souhaitent un jour.
Au regard de ces éléments, il semblerait que ce projet de réforme soit davantage réfléchi pour pallier la perte d'attractivité de certains secteurs sans augmenter les salaires. Ce constat est d'ailleurs renforcé par l'opposition unanime des syndicats de l'enseignement professionnel à ce projet de réforme.
Il souhaite ainsi savoir si le Gouvernement compte faire aboutir ce projet de réforme.