M. Gérard Dériot attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la mise en application de l'article 44 de la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite « EGALIM ».
Son article 44 ajoute au code rural qu'« il est interdit de proposer à la vente ou de distribuer à titre gratuit en vue de la consommation humaine ou animale des denrées alimentaires ou produits agricoles pour lesquels il a été fait usage de produits phytopharmaceutiques ou vétérinaires ou d'aliments pour animaux non autorisés par la réglementation européenne ou ne respectant pas les exigences d'identification et de traçabilité imposées par cette même réglementation ».
À ce jour, aucune mesure réglementaire d'application de cet article 44 n'a été prise. Pourtant, force est de constater que l'agriculture française et européenne est confrontée à une forte importation déloyale. En effet, d'après un rapport n° 528 (2018-2019) d'information du Sénat publié en mai 2019, depuis 2000, les importations ont presque doublé en France (+ 87 %).
Or, le contrôle de conformité des produits importés se révèlent être largement parcellaire : entre 10 % et 25 % des produits importés en France ne respecteraient pas les normes minimales imposées aux producteurs français. En 2014, un rapport de la Cour des comptes pointait d'ailleurs déjà cette lacune.
Les sénateurs ont déploré que l'État dépense moins de 10 millions d'euros par an pour contrôler les denrées alimentaires importées. À défaut de contrôles physiques suffisants, ce sont donc probablement près d'1,7 milliard d'euros de denrées alimentaires non conformes qui, chaque année, entreraient sur le territoire français depuis des pays hors Union européenne (UE).
Par ailleurs, de nouveaux accords internationaux de libre échange risquant d'amplifier ce phénomène sont sur le point d'être ratifiés. En effet, l'accord entre l'UE et le Canada, dit CETA, mais aussi celui avec le marché commun du sud (Mercosur), se révèlent être sur plusieurs points incompatibles avec la législation française.
Dans le cadre du CETA, ce serait 65 000 tonnes équivalent carcasse (tec) de viandes canadiennes qui pourraient être importés à droits nuls, alors que les modes de production sont manifestement en totale contradiction avec l'article 44 de la loi EGALIM. Le constat est identique s'agissant de l'accord avec le Mercosur où le quota d'importation serait porté à 99 000 tonnes supplémentaires.
La lutte contre ces importations prédatrices constitue un enjeu économique, de sécurité sanitaire et de santé publique majeur. En effet, chaque denrée destinée in fine à la consommation humaine ou animale en provenance d'un pays tiers se doit de correspondre strictement à nos standards européens de production.
Mettre en application l'article 44 de la présente loi est donc devenu un impératif pour l'agriculture française. Pour ce faire, il apparaît indispensable d'établir un inventaire précis de l'ensemble des produits, médicaments vétérinaires et méthodes de traçabilité autorisés dans les pays tiers et interdits en Europe.
Aussi, il lui demande quelles mesures le Gouvernement entend mettre en uvre pour que cette disposition entre enfin en vigueur dans le but de garantir la sécurité alimentaire et la sauvegarde de notre agriculture.