M. Xavier Paluszkiewicz interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur l'adaptation des règles de télétravail pour les travailleurs frontaliers en vue de l'imposition effective de l'État français. Considérant la covid-19, les accords de télétravail entre la France et le Luxembourg en matière de fiscalité ont été prolongés jusqu'au 31 mars 2021 et en matière de sécurité sociale jusqu'au 30 juin 2021.
Bien que l'actuelle convention fiscale qui lie ces deux pays ait permis d'augmenter de façon pérenne le forfait de vingt-neuf jours de télétravail, M. le député sollicite M. le ministre afin de connaître le chiffrage financier sur les recettes fiscales de la France de l'impact du télétravail jusqu'à vingt-neuf jours autorisés par an en dehors du Luxembourg, ainsi que sur le nombre d'employeurs déclarant à l'administration fiscale française cette activité salariale menée en France en-deçà de cette même limite.
Il lui demande également de lui indiquer la moindre recette sur le droit d'imposition français d'un passage de vingt-neuf jours à une cinquantaine de jours dans la limite des règlements européens soit « 25 % maximum de temps de travail réalisé en France » sur les finances publiques, tout en précisant si l'État français vient recouvrir ou non de l'impôt sur ces derniers lorsqu'ils télétravaillent depuis la France au-delà de cette même limite de vingt-neuf jours par an.
Dès lors, cette question impactant particulièrement le bassin du Pays-Haut, largement dépendant des besoins de l'économie du Grand-Duché du Luxembourg et participant à la saturation des voies de transport ferroviaire ou routier meurthe-et-mosellanes, elle doit également prendre en considération, au-delà des implications fiscales, toutes les externalités positives que son usage massif provoque sur le territoire. Il souhaite connaître son avis sur ce sujet.
IMPOSITION DE L'ÉTAT SUR LE TÉLÉTRAVAIL DES FRONTALIERS FRANÇAIS AU LUXEMBOURG
Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Paluszkiewicz, pour exposer sa question, n° 1235, relative à l'imposition de l'État sur le télétravail des frontaliers au Luxembourg.
M. Xavier Paluszkiewicz. Monsieur le ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises, je souhaite vous interroger sur l'adaptation des règles fiscales, s'agissant de l'imposition effective de l'État français, pour les frontaliers, qui traversent chaque jour ou presque la frontière avec le Luxembourg, mais qui usent de cet outil depuis mars 2020 en raison de la crise sanitaire.
Nous sommes en effet confrontés à un véritable problème que nous ne pourrons résoudre que si le Gouvernement et, surtout, les hauts fonctionnaires de Bercy daignent prendre en compte une situation particulière au lieu de s'en tenir à une logique administrative et comptable.
Lors de ma dernière question au Gouvernement, je m'étais réjoui de la nouvelle convention fiscale adoptée la semaine dernière, de la création de ce fameux seuil de vingt-neuf jours de télétravail annuel en deçà duquel un frontalier français n'est pas redevable de l'impôt sur le revenu en France, tout en appelant à porter ce seuil à une cinquantaine de jours, le maximum permis par les règlements européens.
C'est sur cette requête que le bât blesse. Ce souhait émis par bon nombre de frontaliers du bassin du Pays-Haut s'est vu opposer une fin de non-recevoir sibylline de Bercy, sous prétexte que cette évolution du seuil occasionnerait « de façon pérenne, une perte de recettes fiscales pour la France. »
J'entends mais, pour sûr, je ne comprends pas. Lorrain obstiné et même têtu, je m'interroge, je réitère, j'insiste : comment Bercy peut-il avancer de pareils arguments alors qu'il n'est toujours pas en mesure de donner le montant de ces supposées pertes de recettes sur les vingt-neuf premiers jours de télétravail ? On pourra me répondre que la convention est trop récente pour disposer de ces données, ce que je peux comprendre, mais nous devons cesser de perdre du temps : en réalité, rien n'est prévu pour ce faire.
Hier encore, dans les bureaux de ma permanence parlementaire, j'ai rencontré un haut fonctionnaire de la direction départementale des finances publiques – DDFIP – de Meurthe-et-Moselle, qui me l'a confirmé : rien n'est prévu en matière d'échanges d'informations entre nos deux pays. Aucune entreprise luxembourgeoise ne recense ni n'informe notre administration fiscale du nombre de jours de télétravail, sachant que le contribuable français ne le fait pas davantage.
Ne perdons pas plus de temps, étant donné que les recettes fiscales liées au télétravail s'élèvent en réalité à zéro. Ne devrions-nous pas engager, dès à présent, une véritable réflexion sur la nécessité de porter ce seuil à cinquante jours et de doter notre territoire d'outils répondant au sacro-saint problème de mobilité, ce qui améliorerait le quotidien des frontaliers ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises.
M. Alain Griset,Permettez-moi, monsieur le député, de saluer votre implication en la matière, de rappeler que vous avez été rapporteur du projet de loi ratifiant la convention franco-luxembourgeoise de 2018, et de vous féliciter pour la détermination et l'insistance dont vous faites preuve dans la recherche de solutions. C'est une qualité que de persévérer pour défendre ses convictions et ses idées.
La nouvelle convention fiscale, applicable depuis le 1er janvier 2020, prévoit que les salariés frontaliers résidant en France et exerçant au Luxembourg demeurent soumis à l'impôt luxembourgeois lorsqu'ils télétravaillent depuis la France, dans une limite de vingt-neuf jours par an. Auparavant, ils étaient imposables en France dès le premier jour de télétravail sur notre territoire.
Ce forfait de vingt-neuf jours permet d'alléger la charge administrative en cas de pratiques exceptionnelles de télétravail, en assimilant celui-ci à l'activité ordinaire du travailleur dans l'autre État. Vous souhaitez porter ce seuil à cinquante jours par an.
Pour tenir compte de la situation exceptionnelle due à l'épidémie du covid-19, des accords passés avec le Luxembourg et renouvelés jusqu'au 31 mars 2021 permettent de considérer que les jours télétravaillés en raison des mesures sanitaires ne seront pas décomptés du calcul des vingt-neuf jours.
De manière plus générale, cette épidémie doit permettre à chacun de revoir sa manière de travailler, le télétravail étant toujours la règle pour les salariés qui peuvent y recourir.
Comme vous, monsieur le député, je pense que nous devons continuer à nous adapter à la situation et à chercher – avec vous, si vous le voulez bien – les solutions adaptées.
Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Paluszkiewicz.
M. Xavier Paluszkiewicz. Je suis ravi de votre réponse, considérant toutes les externalités positives de l'usage massif du télétravail depuis 2020, s'agissant notamment du temps de transport et du désengorgement du trafic routier.
De surcroît, les dernières discussions avec les membres du gouvernement luxembourgeois laissent présager une éventuelle compensation, toujours dans le but de travailler dans une logique de codéveloppement. Je ne manquerai donc pas de faire cette demande aux ministres concernés lors du prochain séminaire intergouvernemental franco-luxembourgeois.