Mme Brigitte Lherbier attire l'attention de Mme la secrétaire d'État auprès de la Première ministre, chargée de l'enfance, sur l'impossibilité matérielle pour les départements de mettre à exécution les ordonnances de placement d'enfants en danger.
Le secteur de la protection de l'enfance est en grande souffrance depuis de nombreuses années.
Les difficultés que rencontrent les départements pour mener à bien cette mission sont nombreuses.
Parmi elles ; le manque de places en établissements spécialisés et en famille d'accueil, pour accueillir les mineurs en danger confiés au service départemental de l'aide social à l'enfance (ASE).
Actuellement, dans le département du Nord, 270 ordonnances de placement ne peuvent être exécutées faite de places. Cela signifie que 270 bébés, enfants ou adolescents, ne peuvent être retirés de leur milieu familial et restent, dans l'attente qu'une place se libère, exposés aux dangers qui les menacent et qui ont motivé une décision de placement.
Ainsi, nous ne savons plus répondre aux besoins des plus fragiles, c'est une situation dramatique, indigne d'un pays comme la France. Cela engendrera de lourdes conséquences, pour ces enfants et pour la société puisqu'il est très difficile de devenir un adulte équilibré et épanoui pour un enfant au parcours de vie si difficile.
Elle souhaite donc savoir quels moyens seront mis en uvre par le Gouvernement pour que les mineurs en danger puissent être placés sans attente.
La protection de l'enfance est une compétence décentralisée confiée aux conseils départementaux. Néanmoins, au regard de l'importance des enjeux, le Gouvernement a décidé de construire une Stratégie nationale de prévention et de protection de l'enfance 2020-2022 pour soutenir les collectivités dans leur action en faveur des mineurs en danger.
Ainsi, dans le cadre de contrats locaux tripartites, préfet, Agence régionale de santé (ARS), département, engagés en 2020, des actions concrètes ont pu être impulsées ou renforcées pour assurer une meilleure convergence des réponses à leurs besoins dans les territoires. Dans cette perspective, différents objectifs concourent à répondre aux problématiques de manque de places en établissements, en établissements spécialisés et en famille d'accueil, pour accueillir les mineurs en danger confiés au service départemental de l'aide sociale à l'enfance (ASE).
Ainsi, l'objectif 14 a pour ambition de favoriser la création de relais parentaux sur le territoire. Ces dispositifs de prévention contribuent à répondre aux besoins de relais ou de répit des parents isolés ou confrontés à des difficultés passagères, en cohérence avec la Stratégie de mobilisation et de soutien des proches aidants 2020-2022.
L'objectif numéro 9 via les crédits mobilisés sur l'ONDAM médico-social vise pour sa part à permettre de développer l'offre d'accompagnement médico-social au titre du handicap en étroite articulation avec le service de l'aide sociale à l'enfance du conseil départemental, pour mieux répondre aux besoins des enfants simultanément bénéficiaires d'une orientation par la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) et d'une mesure de protection de l'enfance.
A des créations ou transformations de places peuvent venir s'ajouter, sans financement spécifique, des mesures visant à renforcer l'interconnaissance et la coordination entre les acteurs. Par ailleurs, l'objectif numéro 18 vise à créer 600 nouvelles places d'accueil en fratries au niveau national. L'objectif dans le cadre de la Stratégie nationale de prévention et de protection de l'enfance est de développer des solutions d'accueil répondant à ce besoin, avec une attention particulière portée aux villages d'enfants, qui reposent sur un partage du quotidien au sein de petites unités de vie, dans un cadre de type familial.
L'objectif 19 vise à diversifier l'offre en matière de protection de l'enfance à domicile pour mieux répondre aux besoins des enfants et de leurs familles, notamment s'agissant des enfants en bas âge. Sont également visées dans cet objectif les actions qui permettent une intensification et une meilleure articulation des interventions à domicile (protection de l'enfance et « droit commun ») mais aussi la possibilité d'expérimenter une mesure intégrée et modulable permettant d'apporter des réponses plus soutenues et globales.
L'objectif 20 vise à structurer et développer le soutien aux tiers de confiance et aux tiers bénévoles. En outre, la loi du 7 février 2022 relative à la protection des enfants prévoit que le juge des enfants doit étudier systématiquement la possibilité d'un accueil de l'enfant chez un membre de la famille ou un tiers digne de confiance.
L'objectif dans le cadre de la Stratégie nationale de prévention et de protection de l'enfance est d'accompagner cette diversification des modes d'accueil et d'accompagnement, en structurant le soutien apporté aux tiers de confiance et aux tiers bénévoles, pour qu'elle corresponde bien à une amélioration de la qualité de la réponse apportée aux besoins des enfants.
Enfin, l'objectif 21 dans le cadre de la Stratégie nationale de prévention et de protection de l'enfance est de développer les centres parentaux, le cas échéant, à partir des centres maternels existants. De plus, il est possible de soutenir toute action visant à développer les centres maternels pour qu'ils renforcent leur approche du développement des compétences parentales, en associant pleinement les deux parents, dès lors que cela correspond à l'intérêt de l'enfant.
Ces différentes actions soutenues par des crédits dédiés permettent d'agir le plus précocement possible pour répondre aux besoins des enfants et de leurs familles, mais aussi de sécuriser les parcours des enfants protégés et prévenir les ruptures. Au-delà de ce soutien contractualisé, l'Etat promeut l'amélioration de la coordination entre les acteurs engagés, de façon à faciliter l'analyse des besoins et le travail partenarial pour y répondre.
Depuis 2020, sont ainsi mises en place des instances quadripartie restreinte réunissant le conseil départemental, le tribunal pour enfants, le parquet des mineurs et la direction territoriale de la PJJ dans chaque département, afin d'améliorer la prise en charge des enfants protégés. Ces instances doivent, notamment, faciliter l'adéquation de l'offre de prise en charge aux besoins, les places disponibles au sein des établissements de placement et des services de milieu ouvert ou encore les délais d'exécution des décisions de justice.
Ces instances sont également l'occasion pour les membres d'aborder leurs préoccupations et les spécificités du territoire. Cette instance se réunit trimestriellement dans chaque département. Par ailleurs, l'article 37 de la loi du 7 février 2022 propose une expérimentation autour d'un comité départemental pour la protection de l'enfance dans les départements volontaires pour une durée de cinq ans pour assurer la coordination des politiques publiques mises en uvre dans le département en matière de protection de l'enfance.
Le comité mentionné sera composé de représentants des services du département chargés de la protection de l'enfance, de la protection maternelle et infantile et du handicap, des services de l'État, dont ceux de la protection judiciaire de la jeunesse, de l'éducation nationale et de l'agence régionale de santé, du procureur de la République et du président du tribunal judiciaire, des organismes débiteurs des prestations familiales, des professionnels de la protection de l'enfance et des gestionnaires des établissements et services de l'aide sociale à l'enfance.
Le comité assurera la coordination des politiques publiques mises en uvre dans le département en matière de protection de l'enfance et pourra décider d'engager des actions communes de prévention en faveur de la protection de l'enfance.