M. Fabien Di Filippo alerte M. le ministre de la santé et de la prévention sur la nécessité d'interdire totalement la vente, la détention et la consommation du protoxyde d'azote pour les particuliers. L'usage récréatif de protoxyde d'azote, pratique particulièrement dangereuse pour la santé, augmente de façon préoccupante plusieurs régions d'Europe.
Cet usage représente « une préoccupation croissante », selon un rapport publié en novembre dernier par l'Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (OEDT), qui rappelle que si « les consommateurs ont généralement le sentiment que l'inhalation de protoxyde d'azote est sans danger, une consommation plus fréquente ou plus lourde du gaz augmente le risque de dommages graves, tels que des lésions du système nerveux ».
En effet, depuis plusieurs années, le protoxyde d'azote, habituellement utilisé dans le champ médical pour ses effets anesthésiants et analgésiants ou en cuisine pour les siphons à chantilly, est détourné de son usage par les jeunes qui l'utilisent comme gaz hilarant. Ce gaz connaît une popularité toujours plus importante en raison de sa disponibilité et de son faible prix.
Sa consommation constitue pourtant une pratique très dangereuse pour la santé, provoquant des effets indésirables immédiats et d'autres, à plus long terme. Les risques immédiats sont notamment l'asphyxie par manque d'oxygène, la perte de connaissance, la brûlure par le froid du gaz expulsé de la cartouche, la perte du réflexe de toux, l'altération des réflexes de déglutition, la désorientation ou encore le risque de chute.
En cas de consommations répétées, des troubles graves peuvent survenir, engageant parfois le pronostic vital : complications cardiovasculaires avec notamment des troubles du rythme cardiaque, pertes de mémoire, hallucinations, troubles neurologiques, troubles moteurs, convulsions, détresse respiratoire pouvant provoquer la mort. troubles psychiques (addiction) et atteintes neurologiques pouvant être sévères, dont des paralysies persistantes.
Face à cette situation, plusieurs pays ont décidé de prendre des mesures fortes. Aux Pays-Bas, la possession et la vente de protoxyde d'azote sont interdites depuis le 1er janvier 2023. Le Gouvernement britannique a annoncé en mars l'interdiction du protoxyde d'azote, dénonçant des consommateurs qui « saccagent les espaces publics », mais aussi « prennent une drogue qui peut avoir un effet psychologique et neurologique et qui contribue à un comportement antisocial ».
Le Gouvernement veut notamment que les ventes de ces bonbonnes soient « restreintes à des fins appropriées », c'est-à-dire comme additif alimentaire ou comme anesthésique en médecine. En France, un texte a été adopté le 25 mai 2021 par le Parlement pour lutter contre l'usage détourné du protoxyde d'azote et protéger les jeunes de cette pratique à risque de plus en plus répandue.
Leur vente est interdite aux mineurs et elle est totalement proscrite dans les débits de boisson et de tabac. Mais ce texte n'est pas assez protecteur. En effet, si les commerçants doivent désormais exiger une preuve de la majorité avant d'en vendre, la vente sur internet reste malheureusement possible et bien que les sites de vente en ligne soient dans l'obligation de mentionner l'interdiction de vente aux mineurs, cette mesure ne permet pas de lutter efficacement contre l'achat et la consommation de ce gaz, car il n'y a pas de véritable contrôle de l'identité et de l'âge de l'acheteur.
Dans les faits, la répression reste donc faible et le protoxyde s'achète toujours en grande quantité et à bas coût sur des sites de revente et via les réseaux sociaux. La loi actuelle doit être renforcée en urgence pour lutter contre l'usage détourné du protoxyde d'azote. En effet, en France, le gaz hilarant est actuellement le troisième produit psychoactif le plus consommé par les adolescents.
Le nombre d'intoxications recensées par les centres antipoison sont en hausse. 134 cas ont été signalés en 2020, contre 10 en 2017 et 46 en 2019, 254 signalements ont été effectués auprès des centres d'addictovigilance en 2020 contre 47 en 2019. Des chiffres corroborés par l'Association française des centres d'addictovigilance dans un communiqué du 23 juin 2022, qui souligne que le nombre de cas de complications sanitaires graves liés à l'usage non médical du protoxyde d'azote a été multiplié par 10 depuis 2019.
Le public concerné est jeune, avec des sujets âgés de 22 ans en moyenne, dont environ 1/10 sont mineurs. Dans la moitié des cas, les consommations sont quotidiennes et peuvent atteindre jusqu'à une dizaine de bouteilles par jour. En 2021, 5,5 % des élèves de classe de 3e disent avoir déjà consommé du protoxyde, les garçons deux fois plus souvent que les filles, selon l'enquête EnCLASS de l'Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT). 3 à 6 % des étudiants en consommeraient de façon occasionnelle ou régulière.
L'usage de protoxyde d'azote semble donc être devenu un enjeu sanitaire majeur, faisant courir un risque imminent d'accident grave, sinon de mort, à de jeunes consommateurs. Plus de 50 personnes seraient mortes en quelques années en France De plus, plusieurs accidents de voiture survenus ces dernières années, dont certains mortels, impliquaient des personnes ayant inhalé du protoxyde d'azote.
Il lui demande quelles mesures urgentes et fortes il compte prendre pour renforcer la lutte contre la consommation récréative de ce gaz par les particuliers, afin de les protéger et de protéger l'ensemble de la société de ses effets profondément néfastes.