Mme Françoise Laborde attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel de censurer le droit de préemption des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) en cas de ventes partielles des terres par des sociétés agricoles.
En mars 2017, le Conseil constitutionnel validait pourtant la loi n° 2017-348 du 20 mars 2017 relative à la lutte contre l'accaparement des terres agricoles et au développement du biocontrôle. Cette dernière a pour objectif principal d'éviter l'acquisition de terres agricoles par des sociétés financières, améliorant la protection du foncier agricole en renforçant, notamment, le rôle d'arbitrage et de contrôle des SAFER tout en favorisant la réduction de l'utilisation de produits phytopharmaceutiques.
Les SAFER peuvent exercer un droit de préemption sur les ventes de terres agricoles afin d'éviter les prises de contrôle des terres par des sociétés financières, droit de préemption étendu aux ventes d'exploitations agricoles constituées en sociétés par la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt.
Les notaires sont, en effet, obligés de notifier aux SAFER toute vente de terres agricoles dont ils sont chargés. En 2015, par exemple, 1 260 préemptions ont été exercées, soit 0,6 % du nombre de ventes. Dans sa décision n° 2017-748 DC du 16 mars 2017, le Conseil constitutionnel censurait, cependant, une disposition de la loi permettant aux SAFER de préempter les ventes partielles des terres par des sociétés agricoles.
Or, depuis plusieurs mois, il s'avère que des groupes d'intérêt industriels, agricoles et financiers, le plus souvent étrangers, contournent les dispositifs de ladite loi précisément grâce au vide juridique laissé par cette décision. Ils continuent de s'accaparer des terres appartenant à des exploitants, le plus souvent dans la détresse.
La propriété du foncier agricole devenue une valeur sûre à l'échelle mondiale, les simples exploitants agricoles sont démunis. Partant de ce constat et tirant les conclusions de nombreux exemples de tentatives d'accaparement des terres dans le sud-ouest de la France, notamment mais pas seulement, le législateur a voulu donner aux SAFER le pouvoir de résister à ces offensives délétères.
En effet, l'accaparement des terres agricoles remet en cause une matière première précieuse, la terre, source de vie, transformant les exploitations agricoles qui font vivre nos territoires et nos terroirs, en champs de production industrielle. C'est pourquoi, elle lui demande de faire de toute urgence une première évaluation de l'impact de la loi du 20 mars 2017 pour prendre rapidement les mesures nécessaires afin de mettre un terme au vide juridique entourant la cession partielle des terres agricoles, qui échappe encore aux compétences des SAFER, détournant de fait l'esprit même de la loi et la volonté du législateur.