MESURES EN FAVEUR DES SOIGNANTS
M. le président. La parole est à Mme Caroline Fiat.
Mme Caroline Fiat. L'Organisation mondiale de la santé estimait hier que la pandémie de covid-19 s'aggrave. Même si le virus recule en France, nous devons nous préparer à une éventuelle recrudescence. Pourtant, force est de constater que vous n'apprenez pas de vos erreurs. À l'hôpital, nous continuons de travailler en mode dégradé, avec surblouses faites de sacs-poubelles et pénurie de masques FFP2.
M. Maxime Minot. Exactement !
Mme Caroline Fiat. Qu'attendez-vous pour fournir aux professionnels du matériel de protection ? Midazolam, propofol, curares, nombreux sont les médicaments qui font défaut. Quelles mesures prenez-vous pour y remédier ?
M. Pierre Cordier. Aucune !
M. Fabien Di Filippo. Rien !
Mme Caroline Fiat. Est-ce incompétence ou mépris ? Il y a quinze jours, vous avez vidé de son contenu notre proposition de loi visant à créer un pôle public du médicament. En refusant ainsi d'assurer notre souveraineté sanitaire,…
M. Nicolas Dupont-Aignan. Eh oui !
Mme Caroline Fiat. …vous faites le jeu des industries pharmaceutiques et de leurs actionnaires. Que vous faut-il, encore une hécatombe ? Une pénurie de gants s'annonce ; allez-vous attendre que nous soyons une nouvelle fois au pied du mur ? Soit votre arrogance vous aveugle, soit vous refusez de regarder la situation en face.
M. Nicolas Dupont-Aignan. Eh oui !
Mme Caroline Fiat. Vous mettez la population en danger. Vos propositions se réduisent à ce jour à des promesses, à l'exception d'une prime inégale et pas pour tous.
Dans le cadre du Ségur de la santé, vous êtes déjà parvenus à vous mettre à dos les paramédicaux, les médecins de ville, tous exclus des négociations, de même que le syndicat Jeunes médecins, dont la justice vous a heureusement imposé la participation. Comble du mépris, les préfets interdisent les manifestations de soignants prévues le 16 juin.
Le message des soignants est clair : ne nous donnez pas de jours de congé en guise de chèque-vacances, accordez-nous plutôt un congé le 16 juin, et venez nous aider à obtenir de réels moyens pour notre profession et pour nos établissements de santé !
Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, étant médecin, vous savez que nous autres, soignants, nous connaissons l'importance des gestes barrières et ne manquerons pas de les pratiquer le 16 juin. Il y a peu, vous nous applaudissiez ; maintenant, vous nous interdisez de manifester, alors que vous ne nous donnez pas les équipements nécessaires à notre travail. Nous ne voulons pas d'un défilé le 14 juillet ; nous voulons manifester le 16 juin.
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran,Madame Fiat, nous sommes deux soignants – vous, la députée, et moi, le ministre. Il y a des aspects de votre question qui sont importants, auxquels je souscris. Vous nous reprochez l'absence de dialogue, mais voyez sur quel ton vous engagez le dialogue avec nous ! Il n'est pas nécessaire de nous intenter des procès pour arrogance, pour interdiction de manifester, pour absence d'équipements.
Depuis le premier jour de la crise, nous faisons tout notre possible afin de protéger les soignants. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)
Mme Caroline Fiat. Cela ne marche pas !
M. Olivier Véran,Je ne nie pas les difficultés que nous avons rencontrées dans des conditions que chacun, au fil des semaines, a amplement eu l'occasion de mesurer. Nous avons peiné à fournir suffisamment de masques et à fournir des médicaments anesthésiques aux hôpitaux français. Mais les hôpitaux européens et américains ont connu des pénuries similaires, alors que la consommation de médicaments explosait, à plus 2 000 %.
Nous n'avons pas rejeté votre proposition de loi visant à créer un pôle public du médicament : vous l'avez retirée après son examen en commission, avant qu'elle ne parvienne en séance !
Mme Caroline Fiat. Vous l'aviez vidée de son contenu !
M. Olivier Véran,Enfin, ce n'est certainement pas moi, ministre des solidarités et de la santé, qui ai, dans ce pays, le pouvoir d'interdire quelque manifestation que ce soit. Une telle décision relève de l'autorité préfectorale.
M. Sébastien Jumel. Non, du ministre de l'intérieur !
M. Patrick Hetzel. Je ne connais pas préfet free-lance !
M. Olivier Véran,Madame Fiat, vous avez pris part aux travaux du Ségur de la santé, ce dont je vous remercie. La semaine dernière, vous êtes venue à mon ministère, vous avez pu vous exprimer, nous avons pu échanger. Je vous invite à continuer à faire des propositions car nous avons besoin de tout le monde.
La santé n'est ni de droite, ni de gauche, ni en marche ; elle est universelle, pour tous les Français ! Ce ne sont pas des polémiques que les soignants attendent de nous, mais une revalorisation, un travail collectif, pour que la situation change et que nous ne nous trouvions plus jamais dans une situation comparable à celle qu'a connue le monde entier face à cette épidémie dévastatrice. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, MODEM et Agir ens.)
Mme Caroline Fiat. Et les gants ?