MORT DE NAHEL ET VIOLENCES URBAINES
Mme la présidente. La parole est à Mme Mathilde Panot.
Mme Mathilde Panot. Madame la Première ministre, Nahel, 17 ans, est mort abattu par un policier. Quinze jours plus tôt, Alhoussein Camara décédait dans les mêmes circonstances. Depuis ces événements atroces, vous n'avez pris aucune mesure politique pour répondre au problème qui se dresse devant nous. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES et sur quelques bancs du groupe Écolo-NUPES.)
Comment, dans la République française, un jeune de 17 ans peut-il être tué par un policier ? Pourquoi seize personnes ont-elles trouvé la mort depuis un an et demi en France pour refus d'obtempérer…
M. Éric Ciotti. Parce qu'elles n'ont pas obtempéré !
Mme Mathilde Panot. …alors que l'Allemagne ne compte qu'un mort en dix ans ? Plus glaçant encore, combien de Nahel n'ont-ils pas été filmés ?
Aujourd'hui, pour justifier l'inaction, vous versez dans le déni. Vous m'avez dit hier : « Les émeutes que connaît le pays n'ont rien à voir avec la mort de Nahel. » Pire, vous voulez faire peser sur nous la responsabilité de la colère
M. Éric Ciotti. Absolument !
Mme Mathilde Panot. …quand elle prend racine dans un meurtre odieux.
Madame la Première ministre, ni les interpellations ni la répression ne viendront tarir la soif de justice de la jeunesse. Seule une réponse politique est de nature à apaiser durablement le pays. Le retour au calme ne se décrète pas, il se construit.
Lorsque les syndicats Alliance police nationale et Unsa police parlent d'entrer « en guerre » contre des « nuisibles », ils ne parlent plus la langue de la République, ce qui devrait interpeller fortement votre gouvernement et les relais d'opinion dans le pays. Regardez la situation en face, madame la Première ministre : il faut un débat à l'Assemblée nationale. (« Non ! » sur les bancs du groupe LR.)
Quand prendrez-vous au sérieux les propositions que nous vous faisons ?
M. Philippe Gosselin. On n'en veut pas !
Mme Mathilde Panot. Êtes-vous oui ou non favorable à l'abrogation du permis de tuer de la loi Cazeneuve, qui a provoqué l'explosion du nombre de morts en cas de refus d'obtempérer ? Allez-vous oui ou non créer un comité vérité et justice pour faire toute la transparence sur les cas de violences policières ? (Mêmes mouvements.)
M. Philippe Gosselin. Surtout pas !
M. Michel Herbillon. On n'en veut pas des propositions de la NUPES !
Mme Mathilde Panot. Allez-vous oui ou non créer un fonds d'indemnisation pour les commerçants et les collectivités victimes des événements de cette semaine ? Comptez-vous enfin dépayser les affaires de violences policières et allonger la formation des policiers ?
Mme la présidente. Merci, madame la présidente Panot !
Mme Mathilde Panot. Madame la Première ministre, l'ordre établi n'est plus tenable.
Mme la présidente. La parole est à Mme la Première ministre.
Mme la présidente. Un peu de silence, s'il vous plaît !
Mme Élisabeth Borne,Comme vous, madame Panot, et comme de nombreux Français, j'ai été émue et choquée par la mort d'un jeune de 17 ans la semaine dernière à Nanterre. Je l'ai dit au Sénat très clairement dès mercredi dernier. Le Gouvernement a fait preuve de la plus grande transparence dans cette affaire et la justice établira toute la vérité.
Dans un moment comme celui que nous traversons, nous devons en effet regarder la réalité en face. Depuis une semaine, face aux violences qui ont éclaté, je cherche vos condamnations et j'entends des excuses.
Avec votre parti, vous instrumentalisez un drame.Vous refusez de condamner clairement les violences et d'appeler au calme alors que nos policiers et nos gendarmes luttent pour préserver l'ordre républicain (Protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – Exclamations sur les bancs des groupes RE et LR),…
Mme Mathilde Panot. Répondez à ma question !
Mme Élisabeth Borne,…que des sapeurs-pompiers combattent des incendies, que des maires sont aux côtés des habitants et sont la cible de violences. Des mairies et des écoles sont incendiées, des magasins sont pillés , des élus et leurs familles sont attaqués, et vous vous cherchez des coupables partout dans nos institutions républicaines (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et Dem),…
Mme Nathalie Oziol. C'est vous qui êtes responsables ! C'est votre bilan !
Mme Élisabeth Borne,…sauf chez les auteurs de violences ! Vous auriez pu, comme vos alliés de la NUPES,…
M. Philippe Vigier. La NUPES n'existe plus, elle a explosé !
Mme Élisabeth Borne,…exprimer votre émotion à la suite du décès d'un jeune de 17 ans,…
Mme Sophie Taillé-Polian. Ce n'est pas une question à LFI, c'est une question au Gouvernement !
Mme Élisabeth Borne,…demander justice et appeler sans ambiguïté au calme, mais avec les autres parlementaires insoumis, vous avez choisi un autre chemin, celui de l'outrance, de la brutalité verbale et de l'excuse constante de la violence.
Madame la présidente Panot, quand vos députés rejettent tout appel au calme, vous sortez du champ républicain.
M. Philippe Gosselin. C'est même de l'irresponsabilité !
Mme Élisabeth Borne,Quand l'une de vos députés affirme que la fin justifie les moyens, vous sortez du champ républicain !
M. Raphaël Schellenberger. Enfin, vous ouvrez les yeux, madame Borne !
Mme Élisabeth Borne,Quand votre leader parle de permis de tuer pour les policiers et de peine de mort pour les jeunes des quartiers et nous traite de « chiens de garde », vous sortez du champ républicain !
M. Benjamin Lucas. Et Alliance ?
Mme Élisabeth Borne,Les violences, rien ne peut les excuser. Pendant que vous jetez de l'huile sur le feu,…
Mme Elsa Faucillon. Ça ne va pas ? Vous rendez-vous compte de ce que vous êtes en train de faire ?
Mme Élisabeth Borne,…pendant que vous trouvez des excuses aux délinquants, nous sommes engagés pour rétablir l'ordre républicain.
Mme Danièle Obono. Cela fait six ans que vous êtes au pouvoir !
Mme Élisabeth Borne,La justice ne vient jamais de la violence !