M. Emmanuel Hamel appelle l'attention de M. le ministre d'Etat, ministre des affaires étrangères, sur le refus opposé à Paris, le 19 novembre, aux ministres des affaires étrangères de Lettonie, Lituanie et Estonie d'accéder au centre de conférences internationales de l'avenue Kléber pour y assister à la conférence internationale sur la sécurité et la coopération en Europe.
Il lui demande : 1° comment la France a pu céder ainsi aux pressions du gouvernement soviétique s'opposant à la présence avenue Kléber des ministres des affaires étrangères des Etats baltes alors qu'ils ont un droit incontestable à leur indépendance puisqu'ils ont été annexés par la force par le communisme stalinien avec la complicité de l'Allemagne nazie ; 2° s'il ne lui paraît pas évident que ce refus soviétique de reconnaître l'indépendance des Etats baltes confirme que la participation de l'Union soviétique à l'actuelle conférence sur la sécurité en Europe n'est qu'une ruse diplomatique des dirigeants de l'U.R.S.S. pour endormir la vigilance des nations occidentales, les désarmer moralement et militairement, et favoriser ainsi la stratégie de conquête du Kremlin malgré les difficultés économiques consécutives à la gestion communiste.
Réponse. - Il convient tout d'abord de rappeler à l'honorable parlementaire la position générale de la France sur la question balte : la France n'a jamais reconnu l'annexion des républiques baltes en juin 1940. Elle a accueilli avec faveur la déclaration des parlements baltes réaffirmant l'indépendance des trois républiques annexées (mars 1990) ; elle a appelé au règlement des problèmes pendants entre ces républiques et l'U.R.S.S. par le dialogue et la négociation, seuls susceptibles de permettre aux république baltes de retrouver leur indépendance effective.
Cette position a été d'ailleurs réaffirmée par un communiqué du ministre des affaires étrangères du 9 janvier dernier, lors des événements survenus dans ces Etats. En ce qui concerne la présence des ministres baltes au Sommet de Paris, les faits sont les suivants : en tant que pays hôte du Sommet, nous étions astreints au strict respect des règles de procédure de la C.S.C.E., et en particulier de la nécessité d'un consensus s'agissant d'une demande de participation d'un nouvel Etat, ce qui était le cas pour les Etats baltes puisqu'ils n'avaient pas été invités lors des pourparlers préparatoires à la conférence d'Helsinski en 1973.
Or, l'Union soviétique avait fait savoir que la représentation au Sommet de Paris des républiques qu'elle considère comme fédérées ne pouvait se faire qu'au sein de la délégation soviétique. Nous ne pouvions qu'en prendre acte ; au titre national, la France, dont la position de non-reconnaissance de l'annexion des Etats baltes était connue, a fait tout son possible pour donner aux représentants des Etats baltes un statut spécial au Sommet de Paris.
Cette dernière proposition avait été elle aussi refusée en raison de l'absence de consensus par suite de l'opposition soviétique. Il peut être utile d'ajouter enfin que la France s'efforce d'utiliser au mieux les évolutions survenues au sein de la C.S.C.E. pour agir en faveur de la cause des Etats baltes : c'est ainsi qu'elle a soutenu, avec d'autres, l'inscription d'un débat sur la situation dans ces républiques à l'ordre du jour de la première réunion du comité des hauts fonctionnaires, une des instances nouvellement créées par la C.S.C.E., les 28 et 29 janvier derniers à Vienne.