M. Christian Bonnet expose à M. le ministre des postes, des télécommunications et de l'espace que la presse se fait de plus en plus fréquemment l'écho du passage de grands commis de l'Etat dans l'état-major d'entreprises dont ils étaient jusque-là appelés à contrôler l'activité. Il lui rappelle qu'il existe un article 175-1 du code pénal qui paraît être fâcheusement ignoré par les intéressés et, ce qui est plus grave, par les ministres dont ils étaient les collaborateurs.
Il lui demande de vouloir bien lui indiquer combien de mutations sont intervenues, au cours des cinq dernières années, à partir de son département, dans des conditions justifiant des poursuites pénales qui n'ont pas été exercées, et les mesures qu'il entend prendre pour faire cesser des pratiques aussi contraires aux principes d'éthique les plus élémentaires.
Réponse. - La nécessaire mobilité, en particulier des hauts fonctionnaires, vers des entreprises qui sont susceptibles de leur apporter une expérience enrichissante, doit éviter, ainsi que le relève l'honorable parlementaire, qu'elle ne contrevienne aux dispositions de l'article 175-1 du code pénal qui censure la prise illégale d'intérêt commise par un fonctionnaire ayant cessé son service.
A cet égard, les décisions de détachement, de mise en disponibilité ou de position hors cadres, prononcées en application des articles 14-5°, 40 et 45 du décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 relatif au régime des positions des fonctionnaires, font l'objet d'un examen particulier au regard des règles posées par l'article 175-1 du code pénal afin de s'assurer que ces derniers n'aient pas été amenés à exercer un droit de contrôle ou à passer des marchés avec les entreprises concernées avant d'y exercer leurs fonctions.
Ces décisions en nombre très limité (7 agents actuellement détachés auprès d'entreprises privées sur un total de 2 200 détachés) sont au demeurant, dans le cadre de l'article 50 du décret n° 85-986 susvisé, soumises préalablement pour avis aux commissions administratives paritaires compétentes. Cependant, cet examen s'avère parfois délicat ou difficile à mettre en oeuvre dans la mesure où il convient à la fois de concilier les droits légitimes des intéressés et les exigences de l'article L. 175-1 susvisé.
D'une part, les attributions exercées par chaque fonctionnaire ne font pas l'objet d'énumérations suffisamment explicites pour permettre de connaître toutes les entreprises avec lesquelles il a pu entrer en relation à raison même de ses fonctions et si celles-ci étaient bien au nombre de celles visées par l'article 175-1 du code pénal.
D'autre part, la qualification juridique des actes visés à l'article L. 175-1 du code pénal doit s'effectuer au regard des conditions posées par ce texte et de la jurisprudence la concernant, laquelle, en ce domaine, examine pour chaque emploi, notamment s'il comportait effectivement un droit de contrôle, de surveillance, de passation des marchés, ou de contrats par rapport aux entreprises en cause.
Or une telle appréciation, qui ne saurait s'accommoder d'a priori, nécessite une analyse prudente, sous peine d'une application extensive des règles du code pénal. Cependant, il est apparu utile à mon département de porter à la connaissance des services gestionnaires ainsi que des intéressés, lors de leur détachement, mise en disponibilité, ou position hors cadres, les termes de l'article 175-1 et la gravité des conséquences qui pourraient résulter même après leur nomination de leur non-respect par les fonctionnaires concernés.
Mais le Gouvernement partage, avec l'honorable parlementaire, le souci d'éviter que les départs de fonctionnaires vers le secteur privé ne se traduisent par des situations choquantes au regard de la déontologie de la fonction publique. C'est pourquoi il prépare actuellement un décret d'application de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat.Ce projet de décret prévoit la création d'une commission interministérielle indépendante qui pourra être saisie par le ministre dont dépend le fonctionnaire souhaitant rejoindre une entreprise privée.
Ce dispositif, souple et pragmatique, devrait permettre de porter un avis sur les quelques dizaines de cas litigieux qui se posent chaque année au niveau interministériel. Ce projet de décret sera étudié par le Conseil supérieur de la fonction publique le 7 janvier prochain et devrait être définitivement adopté en conseil des ministres courant janvier 1991.
; supérieur de la fonction publique le 7 janvier prochain et devrait être définitivement adopté en conseil des ministres courant janvier 1991.