POLITIQUE MIGRATOIRE
M. le président. La parole est à M. Pierre-Henri Dumont.
M. Pierre-Henri Dumont. Monsieur le Premier ministre, après avoir élargi les conditions du regroupement familial, vous semblez enfin découvrir la faillite de la politique migratoire du Président de la République. En 2019, vous aviez délivré 3,5 millions de visas, soit 67 % de plus qu'en 2011.
Vous aviez accordé 275 000 premiers titres de séjour, soit 72 % de plus qu'en 2011. Vous n'aviez réussi, en parallèle, à n'éloigner que 15 % des 152 000 étrangers destinataires d'une obligation de quitter le territoire français.
Vous êtes resté inerte face au détournement de cet acquis essentiel de notre République qu'est le droit d'asile, transformé en voie paralégale de clandestinité. Vous vous félicitez même du fait que, pour la première fois, le montant de l'aide médicale d'État pour les sans-papiers dépasse le milliard d'euros.
Ces chiffres, ce sont ceux de votre impuissance et de votre incapacité chronique à choisir qui entre et qui s'installe en France. Ce sont ceux d'une immigration incontrôlée, dictée par les passeurs et non par le législateur.
Depuis 2017, les députés du groupe Les Républicains vous demandent de conditionner la délivrance de visas à la reprise par les pays d'origine de leurs clandestins, proposition sans cesse rejetée.
Mme Frédérique Meunier. Eh oui !
M. Pierre-Henri Dumont. Ce qui, hier, vous semblait impossible est aujourd'hui, par la grâce de la proximité de l'élection présidentielle, devenu réalité.
Réduire les visas délivrés aux citoyens des pays du Maghreb, afin de les forcer à reprendre leurs ressortissants indésirables, est une bonne décision, mais c'est trop peu et trop tard. Au-delà des effets d'annonce électoralistes, voulez-vous réellement, monsieur le Premier ministre, réduire l'immigration incontrôlée dans notre pays et expulser ceux qui doivent l'être ?
Dès lors, appliquez nos propositions : étendez le principe « pas de retour de clandestin, pas de visa » à tous les pays, dénoncez l'accord bilatéral entre la France et l'Algérie, conditionnez notre aide publique au développement au retour des clandestins dans leur pays, et fixez, devant le Parlement, un plafond annuel de migrants. Monsieur le Premier ministre, il n'est pas trop tard, surtout pour faire preuve de courage !
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Gérald Darmanin,La question de savoir qui doit entrer ou non sur notre territoire est évidemment très importante, en évitant – vous en conviendrez – les caricatures, ce d'autant que les chiffres parlent. J'ai d'ailleurs eu l'occasion de l'évoquer, la semaine dernière, avec une grande dirigeante de votre famille politique.
M. Pierre Cordier. C'était la vôtre, avant que vous ne la trahissiez !
M. Gérald Darmanin,Tout d'abord, vous oubliez de mentionner le covid-19 et la fermeture des espaces aériens, dans presque tous les pays du monde. Peut-être l'ignorez-vous, mais il a été très difficile de prendre l'avion ces derniers temps…
Deuxièmement, vous constaterez que nos grands voisins font tous moins bien que nous, notamment chez Mme Merkel, que les députés de votre famille politique aiment prendre en exemple. Ainsi nous faisons mieux que l'Allemagne, tant sur le plan économique que sur le plan de l'immigration, ce qui est une bonne chose.
Troisièmement, Jean-Yves Le Drian et moi-même n'avons pas attendu vos propositions, ni même votre intervention, pour réduire de manière draconienne les visas, sous l'autorité du Président de la République. Cela a notamment déjà été le cas pour l'Algérie, depuis trois ans et demi : il faut vous réveiller !
Enfin, je constate, comme vous, que nous avons fait un choix différent : celui de sélectionner les étrangers pour ce qu'ils font et non pas pour ce qu'ils sont.
M. Pierre Cordier. Cela existe depuis longtemps !
M. Gérald Darmanin,Nous ne sommes pas essentialistes et ne refusons pas tous les étrangers : cela n'aurait pas de sens.
Vous avez évoqué le chiffre de 3,5 millions de visas, mais il correspond à des touristes ou à des gens qui font des affaires, pour des entreprises françaises. Ainsi, certaines personnes viennent dans le Calaisis, y investissent, et sont d'origine étrangère. Allez-vous refuser de leur accorder des visas, ainsi qu'aux étudiants qui apprennent la plus belle langue du monde, le français ? Tant vont les LR vers Zemmour, qu'à la fin il les pourfend, monsieur le député.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Henri Dumont.
M. Pierre-Henri Dumont. Monsieur le ministre, on vous savait infidèle politiquement. On vous sait désormais malhonnête intellectuellement. Vous savez très bien…
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Gérald Darmanin,Vous avez épuisé votre temps de parole, monsieur le député. Lorsque vous avez un doute, référez-vous à Jacques Chirac, à Nicolas Sarkozy et au général de Gaulle : cela aidera votre famille politique à avoir des électeurs.
M. Jean Castex, Premier ministre. Bravo !