Question écrite de
Mme Tatjana ŽDANOKA
-
Commission européenne
Objet: Pratiques discriminatoires à l’encontre des minorités en Slovaquie
En 2007, le Parlement slovaque a affirmé la validité juridique ininterrompue des «décrets Beneš». Adoptés en 1945, ces décrets présidentiels ont institutionnalisé la discrimination fondée sur l’appartenance ethnique à l’encontre des citoyens slovaques d’origine allemande et hongroise. Ils ont privé les ressortissants des minorités allemande et hongroise de leurs biens et de leur citoyenneté et ont introduit des mesures telles que le travail forcé, portant gravement atteinte aux droits fondamentaux des personnes concernées. Malheureusement, aujourd’hui encore, plus de 15 ans après l’adhésion de la Slovaquie à l’Union européenne, les autorités slovaques continuent d’appliquer ces décrets discriminatoires. Dans de nombreux cas, elles exécutent les mesures de confiscation des propriétés et des terres de façon rétroactive, en invoquant les décrets Beneš (voir l’affaire Bosits c. Slovaquie, Cour européenne des droits de l’homme – 75041/17). Le droit de propriété est non seulement un droit fondamental inscrit à l’article 17 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, mais la propriété foncière peut permettre à ses détenteurs de bénéficier de programmes financiers de l’Union, tels que la politique agricole commune. En pareils cas, l’application d’une loi discriminatoire n’est pas uniquement une question qui relève des droits de l’homme et viole l’article 2 du traité sur l’Union européenne, mais elle peut aussi avoir des incidences sur la mise en œuvre du droit européen.
La Commission envisage-t-elle d’enquêter sur ces pratiques discriminatoires et sur les violations flagrantes du droit de l’Union européenne en Slovaquie?
Réponse donnée par M. Reynders au nom de la Commission européenne (23 août 2021)
Le respect des droits des personnes appartenant à des minorités est l'une des valeurs fondatrices de l'Union européenne et un principe explicitement mentionné dans le traité sur l'Union européenne. En outre, toute discrimination fondée sur l'origine ethnique ou l'appartenance à une minorité nationale est expressément interdite par l'article 21 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, tandis que le droit de propriété est consacré à l'article 17 de la charte. Toutefois, conformément à son article 51, paragraphe 1, la charte prévoit que ses dispositions s'adressent aux États membres uniquement lorsqu'ils mettent en œuvre le droit de l'Union.
La Commission considère que les «décrets Beneš» sont des actes historiques, entrepris par les autorités de l'ancienne Tchécoslovaquie avant l'adhésion à l'Union européenne et qui ne continuent pas de produire des effets juridiques qui seraient contraires au droit de l'Union. En conséquence, cette question relève de la compétence nationale et il appartient aux autorités slovaques de veiller à ce que les droits fondamentaux soient effectivement respectés et protégés conformément à leur droit national et à leurs obligations internationales dans le domaine des Droits de l'homme.