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Préservation du droit français

Question écrite de - Justice

Question de ,

Diffusée le 19 mai 2010

M. André Lardeux attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'arrêt du 13 septembre 2005, dans l'affaire C-176/03 de la Cour de Luxembourg admettant « qu'en principe, la législation pénale tout comme les règles de la procédure pénale ne relevant pas de la compétence de la communauté », elle autorise le législateur communautaire à prendre des mesures en relation avec le droit pénal des Etats membres pour garantir la pleine effectivité des normes qu'il édicte ! Un tel arrêt vise ni plus ni moins qu'à dépouiller les parlements nationaux de la compétence pénale, élément essentiel de la souveraineté nationale.

Cet arrêt a donné tort au Conseil de l'Union européenne. On constate donc que la Cour de Luxembourg a pris une décision qui n'a manifestement pas le consentement des peuples et de ceux qui les représentent. La même dérive risque de se produire pour le droit civil avec les travaux très confidentiels du groupe Von Bar dont la légitimité n'est pas avérée.

Aussi, il souhaite savoir quelles initiatives le gouvernement français compte prendre pour préserver le droit français et la souveraineté nationale, tant pour le droit pénal que pour le droit civil.

Réponse - Justice

Diffusée le 19 juin 2006

Le garde des sceaux, ministre de la justice partage les préoccupations de l'honorable parlementaire quant à la portée de l'arrêt du 13 septembre 2005 de la Cour de justice des communautés européennes par lequel a été annulée la décision-cadre du 27 janvier 2003 relative à la protection de l'environnement par le droit pénal.

Si la Cour reconnaît, sans contestation possible, une compétence du législateur communautaire pour « prendre des mesures en relation avec le droit pénal des Etats membres » lorsque celles-ci sont nécessaires pour garantir la pleine effectivité des normes communautaires, elle n'en rappelle pas moins que « en principe, la législation pénale tout comme les règles de procédure pénale, ne relèvent pas de la compétence de la Communauté ».

Elle souligne également l'importance du domaine particulier que constitue la protection de l'environnement, en tant qu'objectif « essentiel, transversal et fondamental » de la Communauté, pour justifier la compétence du législateur communautaire. Dès lors, il apparaît bien que la compétence reconnue à la Communauté pour édicter des normes relevant du droit pénal ne saurait être regardée comme globale.

Il convient donc, à ce stade, d'être circonspect quant à la réelle portée de l'arrêt, et attentif à l'appréciation des conséquences qui pourraient en être tirées, tant au regard des instruments juridiques déjà adoptés qu'en ce qui concerne les travaux futurs du Conseil. Sur ce point, l'arrêt du 13 septembre n'autorise pas, en l'état, la définition d'un domaine bien circonscrit, et une fois pour toutes, de compétence pénale pour la Communauté, les situations devant être appréciées au cas par cas, dans le respect des compétences dévolues au troisième pilier et aux Etats.

En outre, il est indispensable que le Conseil « Justice et Affaires Intérieures », quelle que soit la base juridique retenue, conserve une compétence générale pour l'élaboration des instruments visant généralement au rapprochement des normes de droit pénal. A cet égard, le Comité des représentants permanents du Conseil de l'Union européenne a adopté en février 2006 un document définissant une méthode de travail pour l'orientation des projets d'instruments du premier pilier qui comportent des dispositions affectant la matière pénale.

Ce document prévoit notamment que, pour le choix de la formation du Conseil en charge de la négociation et de l'adoption des projets, la Présidence saisira systématiquement le Comité des représentants permanents du Conseil de l'Union européenne, pour avis, et que la filière « Justice et affaires intérieures » sera informée des projets comportant de telles dispositions en se voyant offrir la possibilité d'émettre des avis.

Cette position soutenue par le garde des sceaux lors du Conseil JAI de Vienne le 13 janvier 2005 a été très largement partagée. La question ne se pose pas dans les mêmes termes pour le droit civil, qui est le socle de nombreux champs de compétences communautaires. Le groupe de recherche auquel se réfère l'honorable parlementaire est constitué d'universitaires de nombreux Etats membres, et notamment d'universitaires français, et il a été choisi sur appel d'offres par la Commission pour mener des recherches dans le cadre du « plan d'action pour un droit européen des contrats plus cohérent ».

L'objectif affiché de ce projet par la Commission est l'établissement d'un « cadre commun de référence » dans le domaine du droit des contrats, afin de favoriser le rapprochement des droits nationaux sur certaines notions et de rendre l'acquis communautaire plus pertinent, notamment dans le cadre du droit de la consommation.

La Commission associe régulièrement les Etats membres à ces travaux, à travers notamment des réseaux d'experts. Dans ce contexte, le ministère de la justice a rappelé à plusieurs reprises que la Communauté devait oeuvrer dans les limites de ses compétences et dans le respect des principes de proportionnalité et de subsidiarité encadrant son action.

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