RÉFORME DE LA FISCALITÉ LOCALE
M. le président. La parole est à Mme Christine Pires Beaune.
Mme Christine Pires Beaune. Monsieur le Premier ministre, les départements de France viennent de tenir leur congrès, mais vous n'avez pas daigné y participer, tentant d'esquiver un débat sur les solidarités pourtant indispensables entre les hommes et les territoires – solidarités qu'incarnent au quotidien les politiques publiques menées par les départements.
Les présidents des départements avaient pourtant beaucoup à vous dire. Fait rare, et symbole de leur grande colère, ils ont même quitté la salle pendant le discours de Mme Jacqueline Gourault. Ils ont unanimement exprimé leur refus de la réforme fiscale bâclée et injuste que vous tentez de leur imposer.
Dans le prolongement de la mise sous tutelle des budgets départementaux engagée avec les « pactes de Cahors », le projet de loi de finances pour 2020 met tout simplement fin à l'autonomie fiscale et financière des collectivités départementales, en leur retirant le bénéfice de la taxe foncière. Vous les privez de toute liberté fiscale en leur retirant la seule ressource dont ils pouvaient fixer le taux, que vous remplacez par une fraction de TVA nécessairement tributaire de la conjoncture.
Une nouvelle fois, votre gouvernement s'attaque aux fondements de la décentralisation, qui ne peut exister sans autonomie fiscale et budgétaire. La recentralisation est bel et bien en marche !
M. Bruno Millienne. Mensonges !
Mme Christine Pires Beaune. Sur le plan budgétaire, l'État doit aux départements près de 9 milliards d'euros de sous-compensations d'allocations, auxquels s'ajoutent 2 milliards au titre de l'accueil des mineurs non accompagnés, soit 11 milliards au total. De ce point de vue, le petit fonds de compensation de 250 millions d'euros introduit en urgence hier, lors de nos débats, est vraiment loin du compte. La dette de l'État envers les départements reste entière.
Ma question est double, monsieur le Premier ministre : face au refus unanime des départements, comptez-vous revoir votre copie ? comptez-vous enfin prendre vos responsabilités en matière de dépenses engagées par les départements pour le compte de l'État, en assumant leur plein financement ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Mme Jacqueline Gourault,Vendredi dernier, en première lecture, l'Assemblée nationale a adopté une réforme de la fiscalité locale.
M. Fabien Roussel. Adopté… à l'arrache !
Mme Jacqueline Gourault,Avant toute chose, le Gouvernement défend une baisse d'impôts sans précédent pour les Français, de 18 milliards d'euros. Dans votre département, madame la députée, cela représente un gain de 682 euros par foyer.
M. David Habib. Pour certains foyers !
M. Thibault Bazin. C'est une arnaque !
Mme Jacqueline Gourault,Nous y procédons sans créer un nouvel impôt. C'était un engagement du Président de la République, et il a été tenu.
À l'égard des collectivités, le schéma de compensation de la suppression de la taxe d'habitation est juste et adapté. Nous maintenons l'autonomie financière des collectivités en compensant, pour chacune, l'intégralité des ressources perdues ou transférées par des ressources fiscales dynamiques.
M. Jean-Louis Bricout. C'est un impôt, ça !
M. Pierre Cordier. Ce n'est pas vrai, il manque 250 millions !
Mme Jacqueline Gourault,Le choix d'affecter l'intégralité de la taxe foncière aux communes est très important. Les départements percevront pour leur part une fraction de la TVA, ce qui est précisément l'inverse d'une dotation. À cet égard, le passé est éclairant. En 1999, quand la part « salaires » de la taxe professionnelle a été supprimée par la gauche…
M. Fabien Di Filippo. C'est monsieur Dussopt !
Mme Jacqueline Gourault,…par quoi a-t-elle été remplacée ? Par une dotation, une vraie, sans dynamique de croissance ! Nous en voyons encore les effets aujourd'hui.
M. David Habib. Prenez vos responsabilités !
Mme Jacqueline Gourault,Ce n'est donc certainement pas l'actuelle réforme fiscale qui soulève ou aggrave la question du niveau de ressources des départements.
Enfin, sachez que le Premier ministre a pour habitude de se rendre aux congrès auxquels il est invité.
M. Thibault Bazin. C'est la faute de Dominique Bussereau !