M. Claude Jeannerot. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adressait à M. la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Depuis mardi dernier, le Sénat est mobilisé sur la question des retraites. La France tout entière nous regarde avec espoir.
C'est pourquoi, malgré la procédure accélérée que le Gouvernement nous impose, nous, socialistes, ne voulons pas seulement nous opposer.
Monsieur le Premier ministre, je vous le confirme, nous proposons un autre projet, juste, efficace et durable, permettant d'assurer un avenir également juste et durable à nos retraites ! (Marques d'ironie sur les travées de l'UMP.) Et, contrairement à vos affirmations, nous avons agi ! En particulier, nous sommes fiers d'avoir institué la retraite à 60 ans ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) Elle nous a permis d'ajouter de la vie aux années pour les plus fragiles et les plus faibles.
Dans le débat que nous tentons d'engager depuis mardi, la question de l'emploi est omniprésente.
Tout comme nous, nos concitoyens savent que la pérennité des systèmes de retraite passe par une politique de l'emploi active et dynamique. Or, que constatent-ils ? Malgré les artifices statistiques, le chômage ne cesse d'augmenter dans notre pays !
Je rappelle que nous atteignons aujourd'hui les 2 693 000 chômeurs. Au mois d'août dernier, nous avons de nouveau franchi la barre des 10 %. Plus d'un tiers des chômeurs sont dans cette situation depuis plus d'un an. En outre, un jeune sur quatre est sans emploi. Et le nombre de jeunes en chômage de longue durée augmente.
Dans un tel contexte, l'emploi, surtout celui des jeunes, devrait être une priorité. Votre politique de rigueur devrait épargner cette politique. Même en temps de crise, on peut, on doit faire des choix ! Et ces choix définissent non seulement une politique, mais aussi une vision, un avenir pour la société.
Mais que faites-vous ? Non seulement vous préparez pour 2011 une diminution drastique des contrats aidés mais aussi vous réduisez les moyens de Pôle emploi ! Vous commencez par supprimer une part de ces moyens, alors qu'il faudrait au contraire les renforcer pour aider à la fois les entreprises et les chômeurs.
La solidarité entre les générations passe d'abord par l'emploi des jeunes. Quand allez-vous proposer un grand plan national ? Admettez en tout cas que c'est un préalable à tout système de retraite juste socialement et pérenne financièrement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique. Monsieur le sénateur, la clé de tout, c'est bien évidemment l'emploi.
M. Jacques Mahéas. C'est pour ça que vous supprimez des emplois de fonctionnaire ?
M. Éric Woerth, ministre. La clé de la création de richesses en France, la clé du pouvoir d'achat, la clé de notre capacité à financer nos services publics et nos systèmes sociaux, c'est l'emploi !
Mme Annie David. C'est pour ça que vous faites la RGPP ?
M. Éric Woerth, ministre. En effet, c'est la masse salariale qui finance nos systèmes sociaux ! Quand elle augmente, le déficit des retraites diminue !
Mme Annie David. Alors, arrêtez la RGPP !
M. Éric Woerth, ministre. Nos systèmes sociaux fonctionnement mieux quand la situation de l'emploi est favorable. Nous sommes bien d'accord sur ce point ; d'ailleurs, c'est une simple question de bon sens.
Au demeurant, en concevant le financement de la réforme des retraites, nous avons pris en compte les prévisions pour les années à venir du Conseil d'orientation des retraites.
La politique de l'emploi menée par le Gouvernement,
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On en voit les résultats !
M. Éric Woerth, ministre.
en particulier par Christine Lagarde et Laurent Wauquiez, est une politique active.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous n'êtes pas bons sur l'emploi !
M. Éric Woerth, ministre. Au fur et à mesure, cette politique va conduire la France à sortir du chômage d'après-crise.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. L'an dernier, 260 000 postes ont été supprimés !
M. Éric Woerth, ministre. Le chômage a bondi en France du fait de la crise, tout comme d'ailleurs dans d'autres pays. Mais rappelez-vous, voilà deux ans, nous étions en train de réduire considérablement le chômage ; c'est à cause de la crise qu'il est reparti à la hausse pour atteindre le niveau que nous connaissons ! (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
D'ailleurs, actuellement, le chômage baisse de nouveau dans notre pays. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Jacques Mahéas. N'importe quoi !
M. Marc Daunis. Un peu de décence !
M. Éric Woerth, ministre. En 2010, la France créera de l'emploi !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est la méthode Coué !
M. Éric Woerth, ministre. Vous semblez le regretter ; la création nette d'emplois devrait pourtant vous réjouir ! Je ne comprends pas !
Mme Annie David. Ne nous prenez pas pour des imbéciles !
Mme Gisèle Printz. C'est la méthode Coué !
M. Éric Woerth, ministre. En outre, dans cette réforme des retraites, nous privilégions l'emploi des seniors.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est faux !
M. Éric Woerth, ministre. Nous avons ainsi fait en sorte que, dans le projet de loi, un article permette d'aider les entreprises à créer de l'emploi pour les seniors.
M. Didier Boulaud. Oh !
M. Éric Woerth, ministre. En réalité, en reportant l'âge légal de départ à la retraite, nous permettons aussi aux seniors de mieux s'intégrer dans l'entreprise. À 55 ans, l'avenir, ce n'est pas forcément la retraite ! Cela peut également être le travail ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Guy Fischer. Parlez-nous des chômeurs, qui sont de moins en moins indemnisés ! Aujourd'hui, un chômeur sur deux n'est plus indemnisé !
M. Éric Woerth, ministre. À 55 ans, on a encore des choses à dire à son entreprise et à la société française !
Mme Patricia Schillinger. À condition que les entreprises embauchent !
M. Éric Woerth, ministre. Les chefs d'entreprise doivent également changer de regard sur les seniors au travail.
Nous devons simplement adapter les conditions de travail. Faisons en sorte de prendre en compte non seulement l'âge, mais aussi l'expérience. C'est formidable lorsque nous permettons à des personnes de rester en activité !
Mme Annie David. Mais sur quelle planète vivez-vous ?
M. Éric Woerth, ministre. Croyez-moi, ce n'est pas parce que nous aurons reporté l'âge légal de départ à la retraite qu'il y aura moins d'emplois pour les jeunes.
M. Bernard Vera. Bien sûr que si !
M. Éric Woerth, ministre. Ce n'est pas le travail des personnes âgées de plus de 60 ans qui va augmenter le chômage des jeunes. Croire cela, c'est croire à la vieille idée du partage du temps de travail ! C'est ce que vous avez fait en instituant les 35 heures, qui ont été une erreur fondamentale pour la France ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP. Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)