M. Emmanuel Hamel appelle l'attention de M. le ministre d'Etat, ministre des affaires étrangères, sur la déclaration d'entente et de coopération rendue publique le 12 mai à Tallinn par les présidents des parlements de Lituanie, d'Estonie et de Lettonie et sur leur décision de faire renaître le Conseil de la Baltique.
Il lui demande quel soutien la France va apporter à ce Conseil, à la demande d'adhésion à l'O.N.U. et à la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe de chacun de trois pays baltes. Il lui demande d'autre part si la France a prévenu le Gouvernement soviétique que la continuation de ses pressions politiques et représailles économiques à l'encontre de la volonté d'indépendance, de coopération et de paix des trois nations baltes détruirait inévitablement l'effet psychologique que la propagande soviétique cherchait à créer en Europe occidentale au profit de l'U.R.S.S. en parlant de réformes, pérestroïka et progrès vers la démocratie etle respect des droits de l'homme.
Il lui demande enfin si le projet de voyage en U.R.S.S. fin mai du Président de la République est maintenu, compte tenu de l'attitude soviétique vis-à-vis des trois pays baltes dont la revendication pacifique, fondée par l'histoire, appelle et mérite le soutien actif des démocraties occidentales et particulièrement de la France.
Réponse. - L'honorable parlementaire a bien voulu interroger le Gouvernement sur sa position à l'égard de la Lituanie. La France n'a jamais reconnu l'annexion, intervenue en 1940 à la suite d'un pacte passé entre Hitler et Staline, des Etats baltes : Lituanie, Estonie, Lettonie. Cette position de principe a été maintenue avec constance par la France depuis cette date.
Elle a eu des applications pratiques : c'est ainsi que la France a toujours refusé de remettre aux autorités soviétiques l'or déposé auprès de la Banque de France par la Lituanie et la Lettonie. La position de principe de non-reconnaissance de l'annexion a également une conséquence juridique : la reconnaissance par la France des Etats baltes (le 24 janvier 1921 pour la Lettonie et l'Estonie, le 20 décembre 1922 pour la Lituanie) est toujours valide.
Aussi bien, la France a-t-elle accueilli avec ferveur et espoir les évolutions qui ont permis à la Lituanie d'exprimer sa volonté de restaurer son indépendance. Elle a salué la déclaration du Parlement lituanien en date du 11 mars. La France est en même temps consciente des problèmes que cinquante ans d'histoire n'ont pas manqué de créer.
Elle estime que seul un processus négocié est susceptible de permettre la recherche et la mise en place de solutions justes et acceptables pour toutes les parties. C'est cette voie, celle du dialogue et de la compréhension, que la France s'est employée à favoriser. Les autorités françaises ont pris au cours des derniers mois plusieurs initiatives dans ce sens, en commun ou en consultation avec nos partenaires de la Communauté européenne.
On peut à cet égard citer notamment la déclaration des Douze à Dublin du 21 avril et le message commun du Président de la République et du Chancelier Kohl au président du Parlement lituanien M. Landsbergis qui a rapidement exprimé son plein accord sur les suggestions que ce texte contenait. Par ailleurs, toutes les occasions de rencontres bilatérales sont saisies pour inciter les autorités soviétiques à ouvrir d'urgence le dialogue.
La Lituanie a ainsi figuré à l'ordre du jour des entretiens que le Président de la République a eus avec M. Gorbatchev à Moscou le 25 mai dernier. La situation dans les républiques baltes demeurant néanmoins préoccupante, la France entend poursuivre ses efforts en vue de favoriser un règlement négocié de la crise.