M. Alexis Corbière attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le dispositif policier déployé le samedi 7 mars 2020 à la veille de la journée internationale des droits des femmes. À l'appel de collectifs et d'associations féministes, plusieurs milliers de personnes ont participé samedi 7 mars 2020 à une marche nocturne à la veille de la journée internationale des droits des femmes.
Réunies aux abords de la place de la République, dans le calme et sans provoquer de troubles visibles à l'ordre public, plusieurs centaines de militantes féministes ont fait l'objet d'une répression sans retenue de la force. Venues pour dénoncer les violences sexuelles et sexistes, les militantes présentes se sont retrouvées dans une nouvelle spirale de violences.
Chargées violemment, traînées par les cheveux et violentées tout au long de l'opération, les images circulant sur les réseaux sociaux attestent du désordre provoqué par la gestion calamiteuse des manifestations ordonnée par le préfet de police. Cet épisode en rappelle bien d'autres, tous placés sous le signe de la disproportion et de la violence.
Il remet à l'ordre du jour les mêmes déboires intolérables ayant rythmé les manifestations gilets jaunes ou les marches pour le climat et bien d'autres contestations aux revendications légitimes. Face à cela, les réactions de l'exécutif sont à géométrie variable. Après s'être émue de ces événements, Mme la secrétaire d'État chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes les a ainsi relativisés en indiquant que « le tracé de la manifestation n'aurait pas été respecté ».
Encore une fois, ces pratiques interrogent la chaîne de commandement, censée permettre un encadrement pacifique des manifestations. Or les ordres donnés sont de fait à l'opposé de l'objectif d'apaisement et du respect des droits, notamment celui de la liberté fondamentale de manifester. Le sentiment de défiance de la population envers les forces de l'ordre n'en ressort que grandi dans un climat déjà largement émaillé de tensions.
Il lui demande donc s'il entend faire toute la lumière sur ces pratiques policières et engager une réelle inflexion dans la gestion du maintien de l'ordre.
La manifestation du 7 mars 2020, organisée à l'occasion de la journée internationale pour les droits des femmes, a fait l'objet d'une déclaration en préfecture. Toutefois, les services de police déplorent ne pas avoir eu de réponse des organisateurs de la manifestation à leur demande de prise de contact au début du rassemblement.
Le cortège devait partir de la place des Fêtes et rejoindre la place de la République via les rues du Pré Saint Gervais, de Belleville et du Faubourg du Temple. La fin de l'évènement était fixée à 22h00. Les forces de police ont été mobilisées pour prévenir tout incident et ont été employées dans le cadre d'une manœuvre permettant d'orienter et de canaliser les manifestants tout au long de l'itinéraire, tout en disposant d'une capacité d'intervention rapide pour faire face à d'éventuels groupes violents.
C'est au moment de la dispersion de la manifestation que des tensions sont survenues. 200 à 300 personnes se sont couchées au sol rue de Malte et rue du Faubourg du Temple. Par ailleurs, à plusieurs reprises, de nombreux manifestants se sont dirigés vers l'est de la place de la République, notamment vers les quais du canal Saint-Martin et ont refusé de se disperser, en contradiction avec les termes de la déclaration préalable qui prévoyait la dispersion sur la place.
Les forces de l'ordre ont bloqué ces tentatives et ont dirigé les manifestants vers le centre de la place afin que ces derniers puissent emprunter le métro et quitter le secteur. Peu avant minuit, un groupe d'une cinquantaine de personnes a décidé de bloquer l'accès au métro en se positionnant en haut des marches.
Afin d'éviter le risque d'une bousculade à l'aplomb des marches, les manifestants les plus récalcitrants ont été accompagnés par les effectifs de police. Cette manœuvre a été réalisée sans violence et aucun blessé n'est à déplorer. Une dizaine d'individus a poursuivi ce blocage et ces derniers ont finalement été dispersés à 00h15.
Il convient de souligner qu'aucune interpellation n'a été effectuée pour le motif d'une manifestation non déclarée, mais uniquement pour des faits de violences ou de dégradations : une manifestante a été interpellée pour violences volontaires sur agent de la force publique et six autres personnes pour dégradations sur un taxi.
Au cours de la soirée, et à chaque fois que nécessaire, des sommations ont été réalisées et les appels à dispersion, qui n'ont pas été suivis d'effet, ont été nombreux. L'emploi très restreint de gaz lacrymogène a été nécessaire, uniquement pour mettre fin aux jets de projectiles qui visaient les fonctionnaires de police.
Les forces de l'ordre ont ainsi fait face au cours de leurs opérations, à une foule parfois hostile, véhémente, n'hésitant pas à faire usage de projectiles et à proférer des insultes ; certains n'ont pas hésité à blesser des policiers, dont un à la tête au moyen d'un projectile. Enfin, le ministre de l'intérieur rappelle, que si la mission de la préfecture de police est de garantir à Paris le droit de manifester, ce qui dans un État de droit, constitue un principe essentiel, cette dernière est aussi habilitée en cas de nécessité à faire usage de la force, de manière strictement proportionnée, afin de faire cesser tous troubles à l'ordre public.
Cet emploi est toutefois strictement encadré et tout manquement de la part des forces de sécurité intérieure chargées d'assurer l'ordre public, peut faire l'objet, après saisine du procureur de la République, d'une enquête diligentée par les inspections générales pouvant déboucher le cas échéant, à des sanctions disciplinaires.