SERVICES DE RÉANIMATION
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Valentin.
Mme Isabelle Valentin. Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, la pérennité des services de réanimation en France est une véritable inquiétude. La situation s’est considérablement dégradée en dix ans : au total, en 2021, 329 postes de médecins réanimateurs ne seront pas pourvus, contre 163 en 2012.
Le mal est profond, puisqu'il manque un à deux médecins dans chaque service de réanimation, hors pandémie. La situation ne pourra qu'empirer si rien n'est fait rapidement. Les soignants sont épuisés, la surcharge de travail est devenue quotidienne et de nombreux départs de l’hôpital public sont à craindre.
Les postes ouverts ces dix dernières années n’ont jamais été pourvus faute d’un nombre suffisant de médecins réanimateurs formés. Pour pouvoir prendre en charge les patients, 36 % des services de réanimation ont recours à des intérimaires. Or, outre son coût très élevé pour les finances publiques, le recours au personnel intérimaire joue un rôle négatif en matière de stabilité des équipes et de continuité du soin.
L’abandon du numerus clausus pouvait laisser penser que les choses allaient s'améliorer, mais les facultés de médecine et les agences régionales de santé (ARS) n’ont ni les moyens, ni les locaux, ni les enseignants suffisants pour augmenter le nombre de places dans les formations médicales.
Il s’agit non pas d’un déficit de vocations, mais d'un manque d'anticipation quant aux moyens alloués à la formation des médecins. Seulement soixainte-dix places d'intensivistes sont ouvertes chaque année par décret ministériel, c'est-à-dire à peine de quoi compenser le nombre de départs à la retraite – ces derniers atteindront le chiffre de 300 dans les cinq ans.
La situation est particulièrement inquiétante. Le énième report du projet de loi relatif au grand âge et à l'autonomie est un signal supplémentaire du désintérêt de votre gouvernement pour la gestion du vieillissement dans notre pays. Qu’attendez-vous pour doubler le nombre d’internes en réanimation ? Quels moyens supplémentaires comptez-vous allouer aux ARS et aux facultés de médecine pour qu'elles puissent, enfin, former un nombre suffisant de soignants ?
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran,Si la crise sanitaire liée au covid-19 aura, en effet, montré que la France ne disposait pas d'un nombre suffisant de lits de réanimation pour faire face à une pandémie d'une telle ampleur, elle a aussi mis en lumière la grande réactivité de l'hôpital et des soignants.
Ces derniers ont été capables de passer de 5 000 à près de 11 000 lits de réanimation quand cela s'est avéré nécessaire. Chaque fois qu'il a fallu augmenter le nombre de lits de réanimation, ils ont réussi à le faire.
La crise sanitaire a aussi montré la technicité et l'importance cruciale des infirmiers spécialistes. Je pense aux infirmiers anesthésistes diplômés d'État (IADE) et aux infirmiers de bloc opératoire diplômés d'État (IBODE), très nombreux à intervenir tout au long de la crise. Il est évident que nous devons en tirer des conclusions s'agissant de la mobilisation du parc de réanimation, c'est-à-dire de la création et de la non-fermeture de lits.
Chacun des hôpitaux qui bénéficient du Ségur depuis son lancement a vu la différence : certains lits qui devaient être supprimés ne le seront finalement pas, d'autres sont rouverts ; chaque semaine, ou presque, j'ai l'occasion d'annoncer des dizaines de lits de réanimation et de soins intensifs supplémentaires.
Une mission de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) est en cours pour définir et répartir les besoins territorialisés en matière de réanimation ; elle s'attache à déterminer comment structurer la réanimation dans une France post-covid. Le rapport me sera rendu dans le courant de l'été et des décisions seront prises en conséquence.
Sachez aussi que nous avons supprimé le numerus clausus dans l'admission aux études de médecine : de plus en plus de médecins seront donc formés et, dès cette année, plus de 10 000 médecins seront admis en formation - vous voyez que le chiffre augmente puisque nous étions moins de 4 000 lorsque j'ai passé le concours, il n'y a pas si longtemps.
Une attention particulière sera évidemment portée aux postes d'internes en anesthésie-réanimation et en médecine intensive-réanimation au moment des prochains choix d'internats, de manière à renforcer nos capacités en la matière, et il en est de même pour les IADE - infirmiers anesthésistes diplômés d'État.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Valentin.
Mme Isabelle Valentin. Monsieur le ministre, le numerus clausus a en effet été supprimé mais les moyens des facultés de médecine sont toujours insuffisants. Il manque de professeurs, il manque de locaux et il n'est pas possible de former nos médecins !