M. Jérôme Nury alerte M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur la nécessité de développer une stratégie permettant à la France de devenir un acteur de premier plan dans la production de batteries lithium-ion. Anticipant l'avènement des mobilités décarbonées, de nombreux acteurs économiques américains et asiatiques se sont lancés dans une course technologique et industrielle pour s'imposer dans le marché stratégique de la batterie lithium-ion, procédé technologique le plus abouti à ce jour pour le stockage d'électricité.
Ainsi, l'entreprise américaine Tesla prévoit dans sa Gigafactory du Nevada une production annuelle de 1,7 milliard de cellules lithium-ion en 2020, correspondant à 35 GWh, soit une puissance supérieure à celle de la production totale de batteries en 2012. L'entreprise China Molybdenum a acquis en 2016 la mine de cobalt de Tenke Fungurume, en République démocratique du Congo, qui produit 60 % du cobalt mondial, un matériau essentiel à la production des dites batteries.
La Chine disposerait ainsi de près de 75 % du marché des matériaux nécessaires à la production de batteries lithium-ion, ce qui lui a permis d'en accroître sa production de 51 % sur les huit premiers mois de 2017. L'entreprise japonaise Toyota a annoncé lors du dernier salon de Tokyo être en capacité de produire à grande échelle des batteries à électrolyte solide, renforçant ainsi la sécurité des batteries lithium-ion, dont les risques d'explosion constituent aujourd'hui le principal point faible.
On remarque quelques acteurs européens cherchant à émerger, comme l'entreprise suédoise Northvolt qui prévoit la construction de la plus grande usine de batteries électriques en Europe à Skelleftea. Toutefois, les acteurs économiques européens semblent moins bien positionnés que leurs concurrents américains et asiatiques.
La France ne doit pas rester en retrait sur cet enjeu industriel majeur car il en va de la capacité de la Nation à assurer les mobilités et son développement économique dans le monde de l'après-pétrole. Il lui demande donc de bien vouloir lui faire part des mesures que le Gouvernement pourrait prendre dans le cadre de sa politique industrielle pour permettre l'émergence d'acteurs économiques nationaux de premier plan en matière de stockage de l'électricité en général et de production de batteries lithium-ion en particulier.
La transition énergétique conduit à une forte croissance des besoins en batterie pour les applications de mobilité (électrification des véhicules) et stationnaires (en réponse à l'intermittence des énergies renouvelables). Avec près de 9 millions de véhicules électriques en circulation dès 2020, les besoins en stockage de l'énergie en mobilité vont se développer massivement.
Ces batteries représenteront une partie importante de la valeur des véhicules. La France est l'un des pays européens à disposer sur son territoire de l'ensemble de la chaîne de valeur de la batterie pour se positionner sur ce marché, avec des industriels mondialement reconnus (Saft, Arkema, Blue Solutions, Faurecia, Renault, PSA, Eramet…).
Le Gouvernement veut développer et soutenir une vraie filière européenne de la batterie électrique d'ici à 10 ans. Compte tenu du caractère stratégique de ce marché et de son poids économique, l'émergence d'une offre industrielle européenne est un chantier prioritaire du Gouvernement. Une mission, confiée par le conseil national de l'industrie au président du comité stratégique de filière automobile, au président du comité stratégique de filière chimie-matériaux et à la directrice du laboratoire d'innovation pour les technologies des énergies nouvelles et les nanomatériaux (LITEN), a permis d'identifier les défis à relever pour permettre le développement d'une filière française des batteries compétitive : la diminution des coûts (90€/kWh en 2022, 75€/kWh en 2030), l'aptitude à la charge rapide, les densités volumiques et massiques d'énergie (>500Wh/L) et la sécurité des cellules.
Son rapport souligne que les feuilles de route technologiques convergent vers des cellules de génération 4 (« tout solide ») à très haute performance à l'horizon 2023-2025. Cette rupture technologique constitue une opportunité pour l'Europe de revenir dans la course. L'industrialisation de cellules de 4ème génération performantes et compétitives passe par un effort de recherche et développement (R&D) sur les produits et les processus de fabrication qui doit être engagé rapidement.
Le Gouvernement envisage d'apporter un soutien pouvant aller jusqu'à 10 M€ à une première tranche de travaux R&D du programme, voire davantage en fonction de l'examen détaillé du projet. D'ores et déjà, un consortium a pu émerger autour du spécialiste français des batteries Saft, réunissant plusieurs acteurs européens de premier plan (Solvay, Manz, Siemens, …) en vue de développer une nouvelle génération de batteries lithium-ion (Li-ion) de pointe à haute densité énergétique et « tout solide », en particulier pour le marché de l'électromobilité, à l'horizon 2023.
Des avancées importantes sont intervenues dans la mise en place d'une industrie de fabrication de batteries en Europe. Un an après le lancement de l'alliance européenne pour les batteries le 11 octobre 2017, le plan d'action de la Commission européenne est en place, les premières installations de production pilotes sont en cours de construction et d'autres projets sont annoncés afin de faire de l'Union européenne le leader du secteur stratégique de la fabrication de batteries et de l'innovation en la matière.